Perenco : vers d’autres horizons

 

Ce groupe pétrolier français compte se lancer dans l’exploitation et la production de gaz dans le bassin côtier. Cependant, il n’est pas prêt à se désengager de la RDC, malgré la fin annoncée de sa production de brut à Muanda. Le gaz non utilisé est brûlé par torchère. On compte sur des réserves de 20 milliards de m³ en offshore et à 10 milliards de m³ en onshore.

Dans ce cadre, le gaz est déjà utilisé comme carburant, pour alimenter les générateurs et les turbines de la centrale électrique de Kinkazi, qui dessert en électricité les installations onshore et offshore de Perenco, à Muanda. Une partie de l’électricité produite, soit 1 mégawatt, est offerte à la Société nationale d’électricité (Snel) pour l’électrification d’une partie de la ville et de la cité. Par ailleurs, la Snel dispose de générateurs, qui sont alimentés par le gaz produit dans les champs d’exploitation de la société. Plusieurs autres générateurs ont été installés sur le territoire. Ils alimentent en électricité les villages de pêcheurs de Nsiamfumu, Muanda Village, la base militaire de Kitona et le village de Kindofula. Le gaz est aussi utilisé pour l’activation des puits de production par le système appelé « gaslift » et le fonctionnement des chaudières du terminal pétrolier.

Dans l’amont pétrolier, la Congolaise des Hydrocarbures (COHYDRO) réalise, en association avec les sociétés pétrolières multinationales, les travaux d’exploration et de production des hydrocarbures dans les bassins sédimentaires. Depuis 2002, elle produit du pétrole brut dans le bassin côtier, en association avec le groupe Perenco. En ce qui concerne l’exploration pétrolière, la Cohydro participe depuis 2006, à des travaux dans ce sens dans les différents bassins sédimentaires du pays, en association avec les sociétés multinationales ayant signé des contrats de partage de production (CPP). On peut citer Surestream (bloc Yema-Matamba et Makanza), Eni (bloc Ndunda), Energulf (bloc Lotshi), Soco EP-DRC (bloc V dans le Graben albertine). Mais, ces travaux ont pris un retard considérable suite à la lourdeur de l’administration et l’absence d’un cadre législatif approprié. D’autres n’ont pas abouti.

Le Kivu oublié

Le lac Kivu est découpé en quatre concessions gazières dont une seule est ouverte à l’exploitation. Les réserves en gaz méthane dissoutes dans ce lac sont évaluées à environ 66 milliards de normaux mètres cubes (Nm³) renouvelables. À ces réserves sont associés 300 milliards de normaux mètres cubes (Nm³) de dioxyde de carbone (CO2). Elles sont communes à la RDC et au Rwanda.

Il y a quelques années, un appel d’offres avait été lancé en vue de recruter un opérateur qui aura pour mission d’exploiter le gaz méthane du lac en vue de réduire le déficit énergétique dans la région.

De même, le dégazage du lac par la société Limnological Engineering a été prévu. Mais le lac comporte un risque imminent d’explosion gazeuse sur le plan humain et environnemental. Au regard de ce risque, des membres du gouvernement affirmaient que le dégazage sera « réalisé dans un bref délai ». Depuis cette annonce, trois ans sont déjà passés.

Toutefois, les travaux de pré-exploration sont en cours d’exécution par les experts du ministère des Hydrocarbures. Bilan : un appel d’offres a été lancé pour le recrutement d’un bureau d’études spécialisé en exploration pétrolière. Aussi, pour faire le choix de l’emplacement optimal des stations d’extraction, des points d’ancrage et du tracé du gazoduc, des études de petite bathymétrie devaient être réalisés avec le financement de la Coopération technique belge (CTB). Une source affirme que le matériel commandé pour ces études était déjà arrivé à Goma.

Pour veiller à la stabilité du lac Kivu, une structure de surveillance devra être mise en place par la RDC et le Rwanda.

En ce qui concerne le choix de la société qui devra signer un contrat pour l’exploitation du gaz méthane du lac, un Plan de passation de marchés (PPM) a été soumis à l’approbation du Premier ministre, en vue de procéder à l’appel d’offres restreint, en commençant par la publication de la liste des sociétés (une dizaine) qui ont déjà manifesté leur intérêt.


Le syndrome de Muanda

Des actions sociales réalisées en faveur de la population du Kongo central, en général, et de Muanda, en particulier sont à compter sur les doigts d’une main. À titre d’exemple, il s’agit de la construction de bornes fontaines, la réhabilitation de quelques écoles, des centres de santé, des bâtiments administratifs, quelques kilomètres de routes, de la desserte en eau…La formation des jeunes se limite à quelques spécialités pour la main-d’œuvre (maçonnerie, électricité, mécanique …). Avec Perenco, le montant conventionnel prévu dans le contrat de partage de production (CPP) est de 210 000 dollars par an, auxquels il faut ajouter d’autres sommes débloquées pour l’entretien des générateurs à gaz de la Snel, des puits de la Régideso, quelques infrastructures, notamment des routes.

En ce qui concerne le volet environnement, le français avait initié un projet d’agroforesterie sur 170 hectares, avec la mise en terre de 40 000 plantules d’acacias, sur 40 hectares. Perenco est présent dans 17 pays d’Europe du Nord, d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie du Sud-est). Sa production totale atteint 375 000 barils de pétrole par jour. Pour rappel, la contribution du secteur des hydrocarbures a atteint 450 millions de dollars en 2011, soit 10 % du budget national. Elle était de 550 millions, pour l’exercice 2008-2009. En 2013, la société a contribué pour plus de 400 millions de dollars au budget de l’État.


 

Une législation défaillante

La RDC regorge d’importantes réserves pétrolières. Il convient de la doter d’un cadre légal convenable devant régir l’attribution des blocs pétroliers, pour l’intérêt des parties impliquées dans l’exploitation. Le gouvernement entendait, à travers la loi portant régime général des hydrocarbures, garantir le contrôle des activités pétrolières, le respect des règles d’hygiène, de sécurité, de la protection de l’environnement. Il visait également l’obtention d’une part équitable des revenus, du système fiscal à mettre en place et de la réalisation par les investisseurs des actions sociales pour le développement des communautés locales. Ce secteur est encore régi par l’ordonnance-loi du 2 avril 1981, portant législation générale sur les mines et les hydrocarbures. Le code des hydrocarbures, qui était en discussion au Parlement depuis 2014 n’a pas été adopté. Ce code devrait apporter des réponses satisfaisantes aux préoccupations des investisseurs, à savoir le droit de monétiser la production, la stabilité du régime applicable et son caractère obligatoire. Dans le cadre de l’exploitation des hydrocarbures, le partenariat entre l’État et le secteur privé est déséquilibré du fait que celui-ci est encore géré sous le régime conventionnel (des accords de concession), même si sa contribution s’élève à 450 millions de dollars, soit 10% du budget national. L’adoption et la promulgation de la loi devraient favoriser le passage du régime conventionnel au régime de contrat de partage de production (CPP) pour tous les opérateurs. Autres conséquences de la querelle de clocher entre députés autour de la nouvelle loi : jusqu’à ce jour, la gestion du charbon reste confiée au ministère des Mines, en attendant l’adoption de la nouvelle loi sur les hydrocarbures. Le projet de l’exploitation des schistes bitumineux ont été remis au placard.