Un cabinet singapourien recruté pour dessiner Kinshasa de demain

Dans dix ans, si rien n’est fait, Kinshasa va disparaître. L’alerte est du ministre provincial en charge de l’Aménagement de Kinshasa. Pour lui, c’est un problème crucial qui demande d’agir vite.

L’exécutif urbain est très attentif aux problèmes d’aménagement dans la capitale. Selon les experts, Kinshasa qui compte déjà plus de 10 millions d’habitants, est en voie de devenir la plus grande ville d’Afrique. Dans une approche prospective, l’Hôtel de ville de Kinshasa a recruté un cabinet singapourien pour lui faire le plan général d’aménagement de la capitale. Le ministre provincial du Plan, Robert Luzolo, mène un plaidoyer dont l’argumentaire consiste à dire que « si l’on n’y prend garde, la capitale disparaîtra dans dix ans ». D’où, la nécessité d’inscrire les actions dans le cadre de cette planification générale.

Urbanisation sauvage

En 2012, le gouvernement a fait un constat selon lequel la RDC accuse un déficit important des logements décents. Certaines analyses estiment le déficit à plus de 12 millions de logements. La question de disponibilité de logement décent a engendré d’autres problèmes dont le développement incontrôlés des bidonvilles et l’occupation anarchique des terrains, avec ses corollaires, la gestion des déchets et la destruction du milieu physique par les érosions. L’urbanisation sauvage, caractérisée par l’occupation des terrains non viabilisés et des sites à risque, la dissémination des villages non viables au niveau national, ainsi que les problèmes fonciers récurrents, affectent négativement le cadre de vie de la population. L’objectif du programme gouvernemental dans ce secteur visait donc principalement à accroitre le taux d’accès de la population au logement décent ; améliorer la gestion du foncier, en vue de réduire le développement des bidonvilles ; étendre les villes et moderniser certains quartiers de grandes villes ; créer des villages économiquement viables.

Dans ce cadre, les actions à mener devraient permettre, au niveau de l’urbanisme et de l’habitat, d’inventorier et sécuriser le patrimoine immobilier du domaine privé de l’État en vue de le réhabiliter, le moderniser et le rendre rentable ; doter le pays d’un plan d’aménagement général du territoire et des plans particuliers de chaque province et grandes villes; réaliser une étude de faisabilité en vue de la création d’une banque de l’habitat et finaliser la loi sur le crédit bail. Une chose est d’élaborer des programmes qui font rêver, une autre est de les mettre en application. Sur ce terrain, la RDC n’est pas bon élève.  Pour le ministre provincial Luzolo, face à l’urgence, il est question de partir à temps et non de chercher à rattraper les autres. En effet, l’Afrique s’urbanise rapidement. La géographie économique indique que la prospérité et la densité vont de pair dans la mesure où une meilleure productivité demande des économies d’agglomération, de plus grands marchés et une meilleure connectivité.

Besoin d’infrastructures

La colonisation avait aménagé les villes et les territoires en fonction de ses besoins d’exploitation des ressources de la colonie. La tendance architecturale de l’époque était plutôt à des constructions pavillonnaires et à la mobilité par la voiture. Des experts de la ville pensent qu’il faut inverser la tendance en privilégiant la concentration et le déplacement par des moyens de masse (bus, train, ferry…). D’après eux, la concentration et l’urbanisation déclenchent la prospérité, dans les zones aussi bien urbaines que rurales. Les villes qui fonctionnent bien favorisent le commerce, la transformation de la production rurale et les activités non agricoles. Le débat sur le développement rural ou urbain doit donc être remplacé par la compréhension du fait que ces deux types de développement dépendent l’un de l’autre et que l’intégration économique de la ville et de la campagne est la seule voie menant à la croissance et à un développement inclusif. Les villes peuplées d’Afrique, comme Kinshasa, ont besoin d’infrastructures pour améliorer la compétitivité de leurs activités et la productivité de leurs travailleurs. L’énergie, les routes, l’eau et les technologies de l’information et de la communication (TIC) donnent aux économies africaines la capacité de se développer.

La croissance à long-terme exige un système efficace de centres urbains comprenant des villes petites, moyennes et grandes produisant des biens industriels et des services à fort rapport économique, ainsi que des réseaux de transport de bonne qualité (routes, chemins de fer, ports) pour relier les économies nationales aux marchés régionaux et mondial. Les villes africaines grandissent vite, mais à cause de l’insuffisance des infrastructures et de la faiblesse des institutions, la plupart des nouveaux habitats sont informels et manquent de services de base. Cette situation a de graves conséquences.