En mal de pénétration en RDC, Startimes perce au Congo d’en face

Le groupe chinois avait marqué son intérêt pour l’avènement de la fibre optique en RDC, car il envisageait de couvrir un vaste marché de 30 millions de foyers dans 30 pays africains à fin 2018. Malheureusement, il doit déchanter. 

STARTIMES tourne désormais son regard vers la République du Congo. De l’autre côté du fleuve Congo, à Brazzaville, le groupe chinois compte rendre opérationnel son projet du partage de la télévision numérique terrestre (TNT) à la fin du premier trimestre de 2019. En guise de projet, il s’agit de mettre à portée les futures chaînes de Startimes et les chaînes locales à travers les télévisions, les téléphones mobiles et les tablettes. Les villes pilotes déjà équipées en numérique par Startimes sont Pointe-Noire, Dolisie, Ouesso et Oyo. 

Les Chinois de Startimes se disent un peu déçus par la République démocratique du Congo, qui était l’une de leurs principales cibles. Début 2017, le président de Startimes avait sollicité du gouvernement de la RDC la restitution des fréquences de son média pour l’expansion dans notre pays de sa télévision numérique terrestre. On s’en souvient, l’affaire TNT de Startimes a fait polémique au sein du gouvernement sur fond de conflit des compétences entre le ministère des Postes, Téléphones, Télécommunications et des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (PT&NTIC). 

Xin Xing Pang, le directeur général de Startimes, espérait obtenir gain de cause auprès de Samy Badibanga Ntita,1ER Ministre. Mais rien n’est venu. Et l’affaire semble s’être enlisée à ce jour. En 2016, on se rappelle, la société Startimes avait écrit à Stéphane Kitutu Oleontwa, le directeur général de Canal Congo Télévision (CCTV) et de Radio Liberté, deux chaînes appartenant à Jean Pierre Bemba. Dans cette correspondance, Xin Xing Pang exigeait que CCTV cesse d’émettre à partir du 1er février 2017 sur la fréquence (5 690 Mhz sur le canal 48) qu’elle a acquise auprès des autorités congolaises.

Confusion

À l’époque des faits, le chargé des questions juridiques auprès des chaînes appartenant à Jean-Pierre Bemba avait estimé qu’il revenait aux autorités compétentes de saisir Olentwa et non le DG de Startimes. Et depuis, le dossier n’a guère évolué, si ce n’est que CCTV est régulièrement victime de coupure de sa fréquence. 

Startimes a fait son entrée dans le microcosme médiatique congolais via la chaîne de télé Télé7 appartenant à l’époque à Modeste Mutinga Mutwuishayi, patron de média devenu sénateur. Ce deal entre Startimes et Télé7 avait été jugé « contraire à la loi en matière » par Tryphon Kin-kiey Mulumba, alors ministre des PT&NTIC, mais Startimes avait le soutien de Lambert Mende Omalanga, le ministre de la Communication et des Médias ainsi que du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC).

Date butoir 

Il est vrai toutefois que la migration vers la TNT piétine en RDC, depuis que le mécanisme a été déclenché. La RDC a, en effet, migré depuis le 17 juin 2015 de la télévision analogique vers la TNT. Quelques chaînes de la capitale seulement ont été concernées dont Kin24, Digital Congo, Télé50, Antenne A, B-One, Tropicana TV, RTNC1 et RTNC2, toutes relevant des bandes de fréquences UHF. Mais pour les bandes de fréquences VHF, elle se fera le 17 juin 2020, sauf imprévu. 

« Le défi que doit relever le gouvernement congolais pour la réussite de cette mutation consiste à l’extension, au déploiement et à l’installation des infrastructures et équipements numériques dans tous les centres stratégiques du réseau des réémetteurs terrestres du pays », avait déclaré Lambert Mende. Et de poursuivre : « Dans le nouveau paysage médiatique qui s’installe avec cette nouvelle technologie, les chaînes de télévision actives à l’heure actuelle deviennent des éditeurs de programmes, qui vont avoir plus à se concentrer sur les tâches de production des contenus ». 

Pour le principe, un décodeur est indispensable pour adapter les télévisions analogiques à capter les chaînes en numérique. Selon les experts du ministère de la Communication et des Médias, en charge de la TNT, il y a quatre étapes essentielles dans la numérisation de la télévision : les outils de production, les réseaux de transmission des signaux, le système des diffusions, des terminaux de réception. 

En définitive, Startimes ne renonce pas encore à la RDC, mais le groupe chinois veut aller plus vite et faire simple, a laissé entendre Xin Xing Pang. Startimes mise, en effet, sur la RDC pour s’imposer sur le marché africain. Il y a peu, la firme chinoise et Eutelsat Communications spécialisé dans les communications électroniques avaient annoncé la signature d’une convention de partenariat. Lequel devrait déboucher sur « l’accélération du déploiement des services de radiodiffusion numérique à travers l’Afrique ».

D’après les termes de cet accord, Startimes va utiliser les satellites d’Eutelsat pour étendre la diffusion de ses bouquets à plus de 7 millions de foyers dans 13 pays africains. « Startimes et Eutelsat sont des partenaires stratégiques sur le long terme. Nous comptons sur la technologie de communication par satellite de pointe d’Eutelsat pour rendre nos signaux disponibles sur l’ensemble du continent africain. À l’avenir, nous allons continuer à travailler avec Eutelsat dans l’optique de fournir le meilleur service de télévision numérique dans des pays africains », a déclaré le président de Startimes. Aujourd’hui, Startimes transmet plus de 200 chaînes TV parmi lesquelles des chaînes internationales, régionales, et même locales.

Emery Okundji Ndjovu, le ministère des PT&NTIC, envisage de vendre des licences d’exploitation de la fibre optique à partir de 2019. Les prévisions des recettes de ce ministère sont considérablement réduites par rapport à 2018, soit de 125,1 à 104,3 milliards de nos francs. Pourtant, à fin juin 2018, le PT&NTIC a déjà dépassé ses assignations annuelles avec des recettes de plus de 140 milliards. Le ministère des PT&NTIC aurait pu faire mieux si les fréquences analogiques étaient libérées par les opérateurs afin de permettre la migration vers la TNT. L’Autorité de régulation des postes et des télécommunications au Congo (ARPTC), passage obligé pour disposer d’une fréquence, table aussi sur des recettes de 95 219 561 12 FC.