Kinshasa : les indispensables « wewa »

La décision de l’autorité urbaine d’interdire la circulation des motos, au-delà de 19 heures et avant 6 heures, a rendu plus difficile le transport en commun, surtout dans des milieux périphériques de la ville, dépourvus de routes carrossables. 

 

Quelques motocyclistes résistent à la décision du gouverneur. (R.O.)
Quelques motocyclistes résistent à la décision du gouverneur. (R.O.)

Mercredi 6 août. Il est 21 heures, au marché UPN, dans la commune de Ngaliema. L’arrêt Sanga Mamba est inondé de personnes qui attendent désespérément un moyen de transport. Il a toujours difficile, à ces heures, d’attraper une locomotion menant vers ce quartier. L’état impraticable de la route ne facilite pas le trafic sur ce tronçon. Seuls, des véhicules un autre âge tentent le tout pour le tout. Mais, ils ne résistent pas jusques tard, sur cette route très ensablée, en cette saison sèche. Les taxi-motos, dans cette partie de la ville, suppléent à cette insuffisance. Mais, depuis la décision prise, fin juillet, par le gouvernement provincial d’interdire la circulation des motos dans la ville au-delà de 19 heures et avant 6 heures, la situation se complique davantage pour ces populations. « Nous sommes ici depuis 19 heures, sans attraper un taxi. Les taxis-motos qui nous permettraient de faire face à cette situation sont interdits », indique, en chœur, un groupe de femmes commerçantes de légumes. Elles ont finalement résolu de faire le pied, pour rejoindre leur quartier.

La résistance 

Quelques motocyclistes, appelés dans le jargon kinois « wewa », essayent de résister, clandestinement, à cette décision. Evitant de tomber dans le filet des agents de l’ordre, ils rodent tout autour des arrêts, pour gagner quelques clients. « Dans la vie, j’ai appris qu’il faut avoir le goût du risque. Je travaille, malgré l’interdiction. Je sais que je risque d’être arrêté, mais je n’ai pas de choix », indique un taximan moto. La nuit, c’est le moment où ces motocyclistes réalisent plus de recettes, par rapport à la journée. La course passe de 500, la journée, à 1000 francs, le soir. Ne pas travailler la nuit, provoque un véritable manque à gagner, pour ces conducteurs dont certains doivent verser jusqu’à 15.000 francs au propriétaire de la moto, à la fin de la journée. Quelques motocyclistes comptent sur la largesse de certains agents de l’ordre, pour contourner cette décision et travailler, pendant les heures interdites. Ce goût du risque est apprécié par les usagers de ce moyen de transport, qui vivent déjà mal cette mesure.

La solution des couche-tard 

Sans taxi-moto, il est difficile de se déplacer à Sanga Mamba.

La présence des taxi-motos est indispensable dans certains coins de la capitale, difficilement accessibles, faute des routes praticables. « Sans moto, il est difficile de se déplacer, ici, à Sanga Mamba. Quand les autorités prennent des décisions, ils doivent tenir également compte de la population, qui vit dans des coins enclavés », indique une habitante de ce quartier.

Même dans des quartiers accessibles, les « wewa » sont précieux aux heures tardives pendant lesquelles, il est difficile d’attraper des véhicules. Une vraie solution trouvée, par les couche-tard.

Pour le gouverneur de la ville de Kinshasa, cette mesure, prise au lendemain des attaques du camp Tshashi, à Ngaliema, vise à contenir l’insécurité. L’autorité provinciale remarque que, de plus en plus « des malfrats » utilisent des motos, pour leurs opérations. En outre, l’acquisition de la plaque d’immatriculation pour tous les taxis-motos, le port des casques et gilets marqués de numéros attribués par l’Hôtel de ville sont obligatoires.

Après la grève du 5 août, l’association des taximen moto a plaidé pour la rallonge des heures de service, au plus tard, à 22 heures. L’exécutif provincial, de son côté, a promis de répondre dans un bref délai.