La Banque centrale et le mobile banking

Le téléphone mobile est en passe de devenir la banque de demain. Le magnat américain Bill Gates estime que, d’ici 2030, environ 2 milliards de personnes dans le monde dont une majeure partie en Afrique, n’ayant pas actuellement de compte bancaire, épargneront et réaliseront des paiements avec leur téléphone.

Le siège de la Banque centrale du Congo.

Les fournisseurs de services de transfert d’argent par mobile rivalisent pour offrir un large éventail de services financiers, des comptes d’épargne au crédit d’assurance. C’est tout dire sur l’avenir du mobile banking qui remet en question la problématique de la bancarisation. Consciente de l’enjeu et des défis, la Banque centrale du Congo (BCC) a inscrit le développement du mobile banking dans son ambitieux plan de modernisation du système national de paiement en application depuis mars 2012. Déjà en 2003, l’opérateur réseau Celtel avait tenté l’expérience du service Celpay en partenariat avec le groupe financier sud-africain First Rand International Ltd et en collaboration avec quelques banques dont Rawbank.

Conçu comme un compte bancaire électronique, accessible par le téléphone mobile ou par l’Internet, Celpay permettait au client de gérer ses comptes, de transférer et retirer des fonds et de payer ses factures… L’expérience a tourné court faute de cadre juridique et réglementaire adapté mais aussi à cause du coût élevé des marges bénéficiaires de l’opérateur réseau, des banques et des distributeurs dans les transactions.

Inclusion financière

L’introduction du mobile banking dans le système national de paiement est une étape importante pour l’accroissement du taux de bancarisation et de l’inclusion financière des Congolais qui n’ont pas encore un compte bancaire ou accès aux services financiers. Cette catégorie représente la population la plus démunie et exclue du circuit bancaire classique, ainsi que tous ceux qui opèrent dans le secteur informel. Airtel qui a repris Zain, anciennement connu sous le nom de Celtel, a été le premier opérateur de téléphonie cellulaire à se lancer dans le mobile banking ou dans le secteur de la monnaie électronique en République démocratique du Congo. En accordant son agrément à Airtel Money ou Airtel Falanca, la BCC espérait accroître rapidement le nombre des comptes bancaires et le taux de bancarisation, notamment dans l’arrière-pays, là où le téléphone mobile était déjà présent.

Avec Airtel Money, les plus démunis, les non bancarisés et les populations vivant en milieux ruraux avaient enfin accès facile aux services financiers minima tels que l’épargne, le transfert d’argent, le paiement des biens et services et aux crédits. D’autres opérateurs réseau ont emboîté le pas : Tigo avec Tigo Cash, Vodacom avec M-Pesa, Orange avec Orange Money. La Trust Merchant Bank (TMB) s’est lancée dans ce marché avec Pepele Mobile. Les sociétés de téléphonie mobile s’investissent actuellement pour avoir le contrôle du mobile banking. Dans ce marché très porteur, Airtel et Vodacom revendiquent, chacun, plus de 3 millions d’utilisateurs de mobile banking et rivalisent dans le maillage du pays via un important réseau de points de vente. Mais ils ont été rattrapés, voire dépassés par Tigo qui contrôle plus de 37% du marché selon l’Autorité congolaise de régulation de poste et des télécommunications (ARCPT).

Utilisateurs satisfaits 

Pratique et sûr, le mobile banking fonctionne à la satisfaction des utilisateurs. Par exemple, le gouvernement s’en sert pour la paie des fonctionnaires et des agents de l’État dans les contrées non encore couvertes par les banques. Le mobile banking offre la possibilité de dépôt et de transfert d’argent, de consulter le solde de son compte, d’afficher l’historique des dernières opérations effectuées, de payer les factures d’eau et d’électricité ou encore d’acheter dans des boutiques ou magasins, à partir de n’importe quel téléphone mobile sans avoir besoin d’un compte bancaire classique… Autres avantages : plus besoin d’effectuer de longs déplacements coûteux et de manipuler de grandes sommes d’argent ou la monnaie fiduciaire…

L’expérience a montré que les opérateurs réseau ont une marge de manœuvre plus large que les banques et les institutions de microfinance, notamment dans certains milieux ruraux, où les téléphones mobiles sont plus nombreux et les personnes ayant accès à un service bancaire est infime. Le nombre d’abonnements mobiles accroît d’année en année.

C’est pourquoi les banques et les institutions de microfinance lorgnent désormais la dizaine de millions d’utilisateurs de téléphone mobile pour booster le taux de bancarisation en RDC, l’un des plus faibles en Afrique subsaharienne. L’engouement pour l’accès aux services des banques traditionnelles via le téléphone est de plus en plus perceptible. Transferts, retraits, paiements de factures, communications prépayées à moindre coût et uniquement accessible depuis les téléphones mobiles a du succès auprès de la population. Dans la foulée, les relations sociales et d’affaires ainsi que la productivité s’améliorent.

Différents modèles de mise en œuvre de la banque mobile sont actuellement à l’étude (forces du marché, modèles commerciaux et d’écosystèmes…), avec plus ou moins de succès. La simplicité et l’accessibilité des applications, couplées à de faibles coûts, sont des facteurs d’attractivité pour l’essor des applications de mobile banking. Ce système « gagnant-gagnant » est à l’origine de la création d’entreprises et de partenariats pour fournir d’autres services utiles à la population : services financiers numériques tels que l’accès à une gamme complète de produits bancaires, y compris les intérêts, l’assurance des dépôts et l’accès au crédit.