La danse contemporaine africaine invitée à Kinshasa

Après l’Afrique du Sud et le Gabon, la capitale congolaise a accueilli les lauréats du  programme Visa pour la Création 2014, un Béninois et un Sud-Africain, en plus d’un troisième larron.

La présente tournée conduira les trois artistes dans quatorze pays africains.
La présente tournée conduira les trois artistes dans quatorze pays africains.

C’est dans le cadre d’une tournée internationale organisée par l’Institut français que le Béninois Marcel Gbeffa et le Sud-Africain Fana Tshabalala (accompagné de son compatriote  ThulaniChauke) se sont produits, le 8 avril, à la Halle de la Gombe devant un public curieux de découvrir les nouveaux visages de la danse contemporaine en Afrique. Au total, deux spectacles qui se complètent tout en étant différents, et trois danseurs pour une heure trente de prouesses.

C’est  Marcel Gbeffa qui  a ouvert le bal, en  solo avec, “Derrière le rideau” pour une soirée consacrée à la créativité de la danse africaine contemporaine. Ce spectacle est un travail tout en finesse de l’artiste, marqué par une grande sensibilité et qui  invite à découvrir  les difficultés de la création chorégraphique que rencontrent les artistes avant la présentation du produit fini.

Marcel Gbeffaexplique : « Derrière le rideau » traduit tout ce qui se passe dans les coulisses avant que l’artiste ne monte sur scène. Le public ne voit que le résultat final, mais il ne sait pas forcément tout ce qui s’est passé pour arriver à créer le spectacle. Toutes les heures passées à répéter les mêmes mouvements jusqu’à trouver une qualité parfaite, les erreurs techniques qui arrivent pendant que l’artiste est sur scène et qui le perturbent. Je parle aussi de la vie, des liens que nouent l’artiste et son œuvre (on voit beaucoup de cordes sur la scène) qui le détachent en même temps de quelque part à force de passer des heures dans des studios. C’est aussi, en même  temps, cette douleur d’abandon qui existe chez l’artiste. » Pour ce qui concerne la qualité du mouvement, Marcel Gbeffa estime qu’« elle est inspirée du quotidien en Afrique et partout ailleurs. Les mouvements traduisent la manière dont les femmes attachent un pagne, un foulard, comment les hommes nouent la cravate, ou attachent les lacets… »

Le deuxième spectacle, « Between us » de Fana Tshabalala est un duo qui débute par une musique de Nicholas Aphane. L’artiste aborde une esthétique qui se déploie autour d’une gestuelle plus expressive. Le chorégraphe Fana Tshabalala et ThulaniChauke lèvent le voile sur l’ambiguïté des relations abusives  entre deux personnes. Ils interrogent la distance et la perception sensorielle comme instruments d’une écriture de l’approche. Le projet des deux hommes : faire se rencontrer leur puissance de performeurs à travers le partage et la virginité d’une expérience de création qui les engage d’une manière égale. Comme si le choix d’un terrain neutre rendait possible la mise à plat d’une relation, un bilan entre erreurs et valeurs.

Des artistes aguerris

Marcel Gbeffa et Fana Tshabalala sont deux chorégraphes de talent, reconnus en Afrique, qui ont pu faire leurs premiers pas sur la scène internationale grâce à Visa pour la création, un programme de résidence artistique destiné à des artistes résidant en Afrique et aux Caraïbes, qui souhaitent développerun projet  précis de recherche ou de création dans tous les domaines de la création contemporaine : les arts visuels  comme la photographie et la  peinture ainsi que les arts scéniques comme la danse, le théâtre, la musique.

Marcel Gbeffa a découvert la danse contemporaine en 2001 au sein de l’association béninoise ORIculture où, en plus de la danse, il assurait la logistique du festival solo « Seul sur scène ». Grâce à une bourse, il  a participé à plusieurs ateliers et stages de danse traditionnelle et contemporaine d’Afriqueà l’Ecole des Sables au Sénégal. Il  a travaillé avec des chorégraphes et pédagogues de renom comme Norbert Senou et Caroline Fabre, Patrick et Germaine Acogny, LongafoEyeoto et tant d’autres. Actuellement, il est directeur artistique de la Compagnie Multicorps, cofondée en 2008 avec sa collaboratrice Valérie d’Almeida. De la Compagnie Multicorps est sortie une école de danse qui deviendra, en septembre 2011, le premier centre chorégraphique du Bénin.

Quant à Fana Tshabalala, il a débuté sa carrière de danseur dans les rues deJohannesburg. en pratiquant la danse traditionnelle zoulou dans différentes compagnies où il a occupé diverses fonctions, d’assistant à chorégraphe. Devenu chorégraphe pour la compagnie MovingInto Dance, il mène des projets spécifiques auprès de groupes communautaires. Ses récents travaux sont  Indumba, qu’il a chorégraphié pour le National Art Festival, et Between us. Il a rencontré  le danseurThulaniChauke  avec qui il travaille sur le projet du duo Between us alors qu’il est directeur artistique associé de la compagnie de danse sud-africaine Forgotten Angle Theatre Collaborative. Fana Tshabalala a obtenu le prix « Jeune talent danse » (2013) de la Standard Bank et  le prix « Visa pour la création » (2014) de l’Institut français. Un prix qu’il a partagé avec Marcel Gbeffa. Leur  tournée les conduira, au total, dans quatorze pays  du continent.