La RDC s’applique à mettre en œuvre la politique agricole commune de la SADC

La date butoir, c’est fin décembre 2019. Le pays bénéficie, pour ce faire, de l’appui de la FAO. Depuis New-York, du haut de la tribune des Nations Unies, le chef de l’État a dit vouloir révolutionner le secteur agricole national, en finir avec un système archaïque à faible rendement et libérer le potentiel agricole des provinces.

INTERVENANT, lors du lancement des travaux en atelier de la mise en œuvre de la politique agricole commune régionale de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), fin septembre, au centre Caritas de Kinshasa, le représentant résident de la FAO a déploré, en des termes diplomatiques et bien édulcorés, l’absence d’une véritable politique agricole en République démocratique du Congo. Aristide Obame a fait comprendre que « le dynamisme d’un pays ou d’une région se mesure par la capacité de son leadership de mettre en place une véritable vision qui puisse induire une politique agricole et de la sécurité alimentaire ». 

L’État a ainsi mobilisé quelque 172 930 dollars pour ce faire. Au ministère de l’Agriculture, l’on fait comprendre que l’atelier n’est que le premier d’une série d’activités qui seront réalisées jusqu’à la fin de l’année. 

Pour la FAO, la RDC devrait élaborer des actions concrètes pour améliorer l’information sur la production agricole, la durabilité et la compétitivité pour une prise de décisions fondée sur des faits avérés, ainsi qu’améliorer l’accès aux marchés par la mise en œuvre de stratégies de lutte contre les parasites et les maladies des plantes et des animaux au niveau régional. 

En d’autres termes, la mise en œuvre d’une politique agricole ayant pour objectifs d’augmenter la production, la productivité et la compétitivité durable des produits agricoles, d’améliorer le commerce régional et international ainsi que l’accès aux marchés des produits agricoles, de renforcer non seulement l’engagement du secteur privé et public, mais aussi les investissements dans les chaines de valeurs agricoles et enfin réduire la vulnérabilité sociale et économique tant dans le contexte de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, de l’évolution de l’environnement économique que climatique. 

Alors que la SADC mise sur la RDC pour se garantir un filet alimentaire, les exportations agricoles du pays de Tshisekedi ne représentent qu’environ 10 % du PIB, contre 40 % en 1960. 

Jadis florissant, avec une production plus réduite, le secteur agricole aujourd’hui de la RDC – totalement paralysé – connaît une asthénie de productivité conduisant 73 % de la population congolaise à vivre en insécurité alimentaire, les importations de denrées alimentaires (produits de première nécessité) augmentent et les exportations des produits de rente baissent. 

La production s’est en effet réduite depuis quelques années à des activités de subsistance malgré des conditions naturelles favorables (environ 97 % des terres arables bénéficient d’une saison culturale de plus de huit mois dans l’année. De plus, 34 % du territoire national sont des terres agricoles dont 10 % seulement sont mises en valeur. Mais selon certains experts, la grande difficulté dans la mise en œuvre de la politique agricole commune dans l’espace SADC résulte dans les mesures fiscales que chacun de 15 États membres applique pendant que la RDC, elle, peine à faire exécuter sa loi portant principes généraux applicables dans le secteur agricole. 

Certains pays de la SADC accordent, en effet, un abattement pour amortissement de 100 % la première année. C’est notamment le cas de la Tanzanie. Le Mozambique applique depuis peu un abattement de 100 % sur le matériel technologique. Les autres déductions initiales en vigueur dans la région vont de 10 % à 60 % et couvrent notamment les PME, l’agriculture et organismes implantés dans certaines régions. L’Afrique du Sud a créé un programme d’investissement stratégique (SIP) dans le cadre duquel des déductions initiales pour amortissement sont accordées au titre d’abattements supplémentaires.

 Indice de Gini 

Et de l’avis des organisations paysannes membres des associations de la société civile, avec 14 207 740 333 FC, soit environ 8 128 930 au taux budgétaire de 1747,8 FC le dollar, le budget de l’agriculture est d’un niveau faible et ne représente que 3,56 % du budget général. Alors que le protocole de Maputo que la RDC a souverainement ratifié recommande qu’au moins 10 % du budget soient alloués au secteur agricole. De l’avis des experts, le développement du secteur contribuerait à la création d’un grand nombre d’emplois, à lutter durablement contre la faim, à la sécurité alimentaire, à la diversification de l’économie et à l’émergence de l’économie endogène, qui mettrait fin à l’extraversion de notre économie. 

En RDC, grâce à l’agriculture, le coefficient de Gini qui est en fait la mesure classique du degré d’inégalité, est assez bas. Le pays est, en effet, passé de 10 millions de cultivateurs, selon un rapport du PNUD à plus de 35 millions de cultivateurs. Des chiffres qui ont tout l’air de bois mort, quand dans la plus riche région de la RDC, au Katanga, l’on doit encore importer de la farine de maïs, à prix fort, pour se mettre à l’abri de la famine. Il est vrai que le secteur agricole de la RDC regorge d’énormes potentialités : 80 millions d’hectares de terres arables, soit près de deux tiers de toute l’Afrique et un fort potentiel halieutique alimenté par de nombreux cours d’eaux et des lacs dont le lac Tanganyika, le plus poissonneux au monde. 

La RDC serait avant tout un scandale agricole avant d’être un scandale géologique, selon le Réseau gouvernance économique et démocratie, une mouvance de la société civile. Qui estime que l’implantation de nouveaux parcs agroindustriels devrait être suspendue tant qu’une évaluation du parc agroindustriel Bukanga-Lonzo, projet pilote, ne serait pas effectuée et conclue.  Ce qui permettrait de capitaliser les leçons à tirer avant la création d’autres parcs agroindustriels pour l’avenir. 

Faute d’investissements, les potentialités agricoles congolaises pourraient devenir porteuses des risques sécuritaires au regard non seulement du fait du réchauffement climatique qui a créé des réfugiés d’un genre nouveau, (Mbororos, Maldives, etc.) mais aussi du fait des besoins en terres agricoles exprimés par des majors industriels prêts à tout pour occuper de grands espaces arables. Il y a 10 ans, en marge du Sommet mondial sur la sécurité alimentaire de la FAO qui s’était tenu à New York, les altermondialistes avaient dénoncé le phénomène d’accaparement des terres qui était dorénavant encouragé par des gouvernements de pays riches dans de nombreux pays du Sud, tout particulièrement l’Afrique, où, selon un rapport, existent encore d’importantes réserves de terres sous-exploitées, non exploitées ou supposées vierges et disponibles à bas prix. 

Il s’est dit que la Chine aurait en catimini multiplié des accords fonciers, sous le label doucereux d’accords de coopération agricole avec la RDC. Pékin aurait ainsi obtenu 2,8 millions d’hectares pour y implanter la plus grande palmeraie du monde. Difficile d’en avoir la confirmation. 

Toutes les démarches menées par Business & Finances auprès du ministère de l’Agriculture pour faire la lumière sur ce deal se sont avérées vaines. Mis à l’index, le Suisse Nestlé, première société mondiale d’alimentation et de boissons, a annoncé le 1er février dernier, qu’elle ne rendrait publique qu’en mi-2019, la liste des fournisseurs de 15 produits agricoles prioritaires représentant 95 % de son approvisionnement global en matières premières.

Les données devant être divulguées comprennent des informations sur les fournisseurs, les emplacements en amont, les pays d’origine et les volumes achetés pour chaque commodité.  « D’ici fin-2019, nous publierons aussi des informations sur les chaînes d’approvisionnement d’autres produits comme la noix de coco, les épices, le café, le cacao, le lait, les céréales, le sucre, les légumes et les fruits de mer », a indiqué Magdi Batato, le responsable des opérations pour la multinationale helvétique.  Nestlé a fermé, en 2018, son usine de Kinshasa mais en possède encore dans 85 pays. La firme serait intéressée par le cacaoyer de Bengamisa, dans la province de Tshopo.