Le Comesa approuve l’acquisition de la BCDC par le groupe Equity

De toute évidence, en tant qu’une « transaction stratégique » pour les opérations d’EGH en RDC, c’est clair que la fusion des activités de la Banque Commerciale Du Congo avec celles d’Equity Bank Congo devrait passer par les fourches caudines de la régulation.

SELON les règles d’usage dans le secteur bancaire, la transaction d’acquisition des parts est soumise aux conditions habituelles des opérations du genre, à la réalisation d’une Due Diligence, à la conclusion des conventions d’opération détaillées, à l’obtention et l’approbation des actionnaires, ainsi qu’à celles réglementaires de l’Autorité des marchés financiers, de la Banque centrale du Kenya, de la Banque centrale du Congo (BCC) et des autorités de régulation, le cas échéant. 

Le 18 novembre 2019 à Nairobi, Equity Group Holdings (EGH) publiait un communiqué dans lequel il annonçait la conclusion d’un accord d’achat d’actions avec George Arthur Forrest, en vue d’acquérir 66,53 % des actions détenues par ce dernier dans la Banque Commerciale Du Congo (BCDC), une société anonyme (S.A.) supervisée par la Banque Centrale du Congo en République démocratique du Congo. Après la réalisation de la transaction, poursuivait le même communiqué, les activités de la BCDC seront éventuellement fusionnées avec celles de la filiale bancaire existante d’EGH en RDC, Equity Bank Congo S.A. (EBC).  

Naturellement, l’accord devait être soumis aux approbations réglementaires, entre autres de la Banque Centrale du Kenya, de la Banque Centrale du Congo (BCC), de la Commission de la concurrence du COMESA et des conseils d’administration de la BCDC et d’EGH. Voilà que la Commission de la concurrence des États du marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA), autorité chargée de promouvoir la concurrence entre les opérateurs économiques au sein de la communauté, a rendu une décision approuvant l’acquisition par EGH d’une participation majoritaire de 66,53 % au sein de la BCDC.

Fusion en vue

Comesa Competition Commission a fondé sa décision sur la position du comité responsable de la détermination initiale (CID), selon laquelle l’accord augmentera la part de marché des actions sans nuire à la concurrence. En effet, pour le CID, « la fusion ne devrait pas sensiblement réduire ou empêcher la concurrence dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci ». Le CID a, en outre, déterminé qu’« il est peu probable que la transaction affecte négativement le commerce entre les États membres ». 

Après l’approbation de l’opération d’acquisition par les conseils d’administration d’EGH et de la BCDC, et maintenant de la Commission de la concurrence du COMESA, il reste désormais la finalisation de la transaction par l’approbation de la BCC et celle du Kenya. Selon des sources proches du dossier, cela ne devrait pas tarder. 

Dans le capital de la BCDC, l’État congolais détient 25,53 % des parts, les 7,94 % restants sont détenus par d’autres actionnaires minoritaires. « Cette acquisition donnera un nouvel élan à la banque basé au Kenya pour concrétiser son rêve de devenir une banque panafricaine d’ici 2024 », avait déclaré le Dr Mwangi, directeur général et CEO du Groupe Equity.

Une fois la boucle bouclée, Equity prévoit de fusionner la BCDC avec sa filiale locale en RDC, Equity Bank Congo S.A. La fusion de la BCDC (873 millions de dollars d’actifs fin 2018) avec Equity Bank Congo (570 millions) fera d’Equity Bank la deuxième plus grande banque de la RDC après Rawbank (1,68 milliard. En outre, avec la fusion, la filiale d’Equity Bank Congo serait renforcée. Equity Bank Congo est déjà la deuxième meilleure filiale du groupe Equity, après le Kenya, en termes de bilan, de dépôts et de réseau, devant la Tanzanie et l’Ouganda. Elle est cependant moins performante en termes de rentabilité et d’efficacité opérationnelle. Elle affichait, au premier semestre 2019, un rendement des capitaux propres moyens de 17,9 %, contre 28,9 % au Kenya, 23 % en Ouganda. Son ratio coûts sur revenus reste particulièrement élevé à 70,9 %, contre 44,9 % au Kenya et 62,4 % en Ouganda, indique Jeune Afrique.

Pour rappel, EGH a versé ou versera une contrepartie en espèces de 105 millions de dollars pour les 625 354 actions à acheter, y compris les dividendes déclarés après le 1er janvier 2019 au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2019, soit un prix de dividende cumulé par action de 167,9 dollars par action. EGH a proposé également d’augmenter sa participation dans Equity Bank Congo. Les actionnaires d’EGH avaient approuvé l’achat par EGH des actions détenues par KfW représentant 7,6 % du capital social souscrit d’Equity Bank Congo, à la suite de l’exercice d’une option de vente accordée à KfW, en vertu d’une convention conclue entre actionnaires d’Equity Bank Congo, dont EGH et KfW. Le projet d’acquisition des actions détenues par la KfW est également soumis à l’approbation de la BCC. 

Pour James Mwangi, directeur général et CEO d’Equity Group Holdings Plc, il s’agit d’une opportunité pour le groupe de concrétiser sa vision de bâtir la première institution financière d’Afrique subsaharienne, en fournissant des produits et services innovants à ses clients, en particulier l’utilisation efficace des technologies. En acquérant la BCDC et les actions de la KfW dans Equity Bank Congo, EGH va étendre sa présence en RDC. Le Groupe a pour objectif de fournir un accès aux services financiers compétitifs et adaptés afin de transformer la vie et les moyens de subsistance des populations, d’accroître les opportunités de création de richesse tout en apportant une valeur significative à ses parties prenantes. 

Attachement sentimental

La crise financière mondiale de 2008-2009 a laissé des traces sur les activités bancaires qui sont devenues de plus en plus difficiles, notamment avec les nouvelles règles pour lutter contre le blanchiment d’argent, le trafic de drogues et le financement du terrorisme. À cela, s’ajoute le risque qui fait que les banques correspondantes internationales n’acceptent plus de travailler avec les institutions bancaires établies en RDC. « Mon souci majeur ainsi que celui de ma famille a toujours été de protéger notre banque, assurer sa pérennité en toute transparence et en toute tranquillité pour le bien-être et la sécurité de nos clients », avait déclaré George A. Forrest, actionnaire majoritaire de la BCDC. 

Mais au vu du contexte financier international, et malgré son « profond attachement sentimental » à la banque par son histoire, la famille Forrest a décidé de « rechercher un partenaire sérieux, digne de pérenniser cet espoir et le travail accompli par les fondateurs de la BCDC et ensuite par ma famille ». Il a encore dit que la décision pour sa famille de vendre sa participation n’était pas facile à prendre. Après de nombreuses sollicitations, pour certaines très intéressantes au projet, du point de vue des offres, le choix s’est porté sur Equity Bank du Kenya. Certes, sa proposition n’était pas la plus attractive, financièrement ; mais elle offrait toutes les garanties pour la continuité de la vision de sa famille. 

« Equity sécurisera tout le monde pour l’avenir. Avec plus d’1 milliard de dollars, son positionnement, sa situation financière et la qualité de son actionnariat, elle garantira toutes les opérations, toutes les transactions de la BCDC à travers le monde. Seul, cela allait devenir de plus en plus difficile. Equity Bank gardera le nom de la BCDC. Le management restera en place pour la période de transition », avait rassuré George A. Forrest, en signe d’adieux à la communauté de la banque.