Le deal de l’État avec la FEC n’est pas du goût des régies financières

Le fisc et le plus grand patronat du pays conviennent d’un régime de « troc fiscal ». À trois mois de la fin de l’exercice 2018, le paiement de la TVA remboursable se chiffre à 103 052 990 488 FC, alors que les opérateurs économiques espéraient 188 394 995 015 FC à fin septembre 2018, selon le ministère du Budget. 

SELON la Direction de préparation et suivi du ministère du Budget, le taux d’exécution de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) remboursable à fin septembre se situe à 54.7 %. Une performance tout de même au regard des années antérieures, même si le gouvernement aurait dû plutôt verser 188 394 995 015 FC. Et sur l’ensemble de l’année, il devra décaisser, à titre de TVA remboursable, quelque 251 193 326 687 FC, selon les chiffres fournis au ministère des Finances. 

Pour Albert Yuma Mulimbi, le président national de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), le plus grand patronat du pays, un « Gentlemen Agreement » a été trouvé avec le gouvernement. Un modus operandi, en fait, pour le remboursement de la TVA aux sociétés minières, membres à la FEC. Il s’agit d’un mécanisme de compensation avec d’autres paiements à l’État congolais.

Un troc déséquilibré ? 

Rien de nouveau, en pratique. L’État et la FEC sont, en effet, revenus à une pratique ancienne, c’est-à-dire le « troc fiscal », pourtant décriée par les régies financières. Tenez, le gouvernement a, déjà, enjoint la Direction générale des douanes et accises (DGDA) de ne plus percevoir la TVA sur les importations des miniers sur une période de 12 mois, c’est-à-dire d’août 2016 à août 2017. Cette décision a entrainé un manque à gagner de 30 milliards de nos francs par mois, soit plus de 25 millions de dollars. Cette somme, projetée sur la durée de la suspension de la perception de la TVA, représente une bagatelle somme de 360 milliards de francs, soit quelque 300 millions de dollars. 

Le troc fiscal a été jugé « déséquilibré », d’autant plus que les sommes dues à l’État en termes de TVA se sont avérés plus élevés que les compensations accordées par le gouvernement aux entreprises minières notamment. À titre exemplatif, il y a six ans, suite à une recommandation expresse du gouvernement, la DGDA avait accordé un régime préférentiel à la Société Anhui Congo d’investissement minier (SACIM). Il s’agit, en pratique, des facilités au titre de « partenariat stratégique » sur les chaînes de valeur conformément au Décret n°03/049 du 6 octobre 2013, dont l’exonération des droits de douane et la suspension de la perception de la TVA à l’importation, la suspension de la TVA sur les produits intermédiaires ou finis ainsi que sur les prestations des services produits par l’entreprise. 

Autres facilités : l’allègement des coûts de la rémunération de certaines prestations dans le cadre institutionnel conformément au décret susmentionné. Fin juin, la SACIM a annoncé une production mensuelle de 392 000 carats de diamant. Avis d’experts : le Trésor public aurait pu gagner plus si l’entreprise minière avait payé toutes ses obligations fiscales et douanières, même si l’État lui reversait une partie de la TVA. 

Selon la Banque centrale du Congo (BCC), la République démocratique du Congo a exporté 52 000 tonnes de cobalt au premier semestre 2018, contre 39 500 tonnes sur la même période en 2017. Il se dégage ainsi une hausse de 32,8 %. Côté recettes, le minerai essentiel pour la construction des voitures électriques aura rapporté près de 3.3 milliards de dollars. Mais la part de l’État dans cette somme ne tient qu’aux royalties et autres taxes, droits et redevances. 

Electronic Fiscal Device

À la Direction générale des impôts (DGI), l’on voudrait visiblement améliorer le système de perception et de remboursement de la TVA pour l’exercice 2019. Le fisc veut, en effet, se doter des dispositifs électroniques fiscaux ou les « Electronic Fiscal Device » (EFD) pour la collecte des données de la TVA sur les opérations réalisées par les assujettis.

Ce programme rentre dans le cadre du projet de mise en place d’un système d’information pour la collecte et la gestion des données de la TVA sur les opérations réalisées par les assujettis (Projet SYCO-GD-TVA). Pour ce faire, la DGI, par délégation de maîtrise d’ouvrage, a chargé le Bureau Central de Coordination (BCECO) de solliciter des offres sous pli fermé de la part des candidats éligibles et répondant aux qualifications requises pour la conception, la fabrication et le montage de ces fameux EFD pour la collecte des données de la TVA sur les opérations réalisées par les assujettis. 

La passation du marché sera conduite par appel d’offres international ouvert, tel que défini dans la loi relative aux marchés publics, à tous les candidats éligibles. La date de remise d’offre est fixée au 27 novembre 2018. 

TVA sur les marchés publics provinciaux

Le marché de la mise en place du système d’information pour la collecte et la gestion des données sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les opérations réalisées par les assujettis a été confié au 1Rivet-Tracom pour un montant d’environ 6 millions de dollars. Le projet est piloté par le Bureau central de coordination (BCECO) pour le compte de la Direction générale des impôts (DGI). La régie financière a mûri depuis deux ans le projet de l’implémentation du dispositif de la remontée au serveur installé à l’hôtel des impôts des informations sur la TVA collectée (caisses enregistreuses) pour quelque 15 milliards de francs, soit près de la moitié du montant retenu par le BCECO. 

Cependant, la DGI compte tirer profit de la facturation par les services des gouvernements provinciaux de la TVA sur les marchés publics financés par le gouvernement à travers les caisses enregistreuses. Leurs premières estimations sont de l’ordre de quelque 39 milliards de francs l’an. Fort probable, il va falloir attendre la fin du second semestre de l’exercice 2018 pour l’opérationnalité du système d’information pour la collecte et la gestion des données sur la TVA de la DGI.