Le débat se corse sur l’apport des minings aux recettes de l’État

La société civile est pour la révision du code minier hic et nunc. La Fédération des entreprises du Congo ne veut rien entendre en arguant que le contexte ne s’y prête pas. Les parlementaires sont dans l’embarras. 

Une séance plénière au Palais du peuple.
Une séance plénière au Palais du peuple.

 

Le code minier a été adopté en 2002. Depuis près d’une décennie, le secteur des mines joue un rôle important dans la croissance économique en République démocratique du Congo, étant donné que les finances publiques dépendent des exportations de matières premières. Un document de la chambre des mines de la Fédération des entreprises du Congo estime à 64,1 % la contribution du secteur extractif (mines et hydrocarbures) aux recettes ordinaires de l’État, soit en 2012, un montant de 1,5 milliard de dollars payés par les sociétés minières et 460 millions par les entreprises pétrolières.

Les positions en présence

D’après la BCC, les recettes générées par le secteur minier ont représenté respectivement 38,0 % et 41,0 % du total de recettes respectivement en 2013 et 2014. Pour ce qui est de la Direction générale des recettes administratives, domaniales et de participation (DGRAD), les apports des rubriques « autres recettes » et « pétroliers producteurs », leurs apports ont représenté respectivement 11,0 % et 7,0 % de l’enveloppe totale. En 2013, ces recettes avaient atteint 14,6 % du PIB. Mais selon Stefaan Marysse, « les profits rapatriés par les miniers excèdent maintenant les entrées de capitaux. Grâce au code minier de 2002 et aux contrats miniers considérés comme très libéraux en ce qui concerne le rapatriement des profits. Se fondant sur les statistiques du FMI, il estime que selon les projections, ces profits rapatriés pourraient être, en 2019, trois fois plus importants : 2 milliards de dollars d’entrée d’investissement direct étrangers (IDE) contre 7 milliards de profits expatriés.

Pour sa part, la société civile milite pour la révision de la loi réglementant le secteur minier. Elle multiplie ateliers et campagnes de sensibilisation et voudrait obtenir un nouveau code plus contraignant, transparent et profitable à l’État, aux communautés locales et aux investisseurs étrangers. Dans le débat actuel, un consensus se dégage sur les faiblesses de la loi minière quant à la contribution de ce secteur à l’économie nationale, l’attribution des concessions et titres miniers, aux droits des communautés locales…Mobilisés simultanément dans l’ex-Katanga et dans l’ex-Province Orientale, les organisations de la société civile disent ne pas comprendre comment, avec plus de 1 million de tonnes de cuivre produites par an, la République démocratique du Congo présente un budget de 7 milliards de dollars auquel le secteur minier ne contribue qu’à hauteur de 10 %.

Des juristes réunis à Bunia recommandent au Parlement d’adopter un texte consensuel pour faciliter les investissements dans ce domaine. Selon eux, le secteur minier est régi par une superposition des textes légaux, certains étant même anticonstitutionnels. Par contre, la chambre des mines de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) exhorte le gouvernement à maintenir le régime fiscal du code minier actuel et souligne que les changements unilatéraux auront un effet néfaste dans le secteur.

Se soumettre à la transparence     

Ceux qui réclament la révision mettent en avant le manque de transparence. Des investisseurs miniers usent de manœuvres pour ne pas payer à l’État ses droits et déclarer ce qu’ils ont gagné. Ce qui est déclaré avoir été payé n’est pas toujours ce que l’État reconnaît avoir perçu. Le gouvernement a reconnu cette réalité. Environ 20 milliards de dollars échappent chaque année au Trésor public. Le code minier révisé, déclarait le Premier ministre, permettra au gouvernement d’atteindre ses assignations à l’horizon 2016 en faisant passer la contribution de ce secteur au budget national de 10 à 25 %. La société civile soutient que le gouvernement ne devrait pas se plaindre de manquer de moyens si le secteur minier était transparent.

D’après Georges Bokundu, chef de bureau à l’Observatoire des ressources naturelles en Afrique australe, l’obligation de transparence permettra de combattre l’opacité qui caractérise le secteur minier. Dans leurs recommandations adressées au gouvernement et au Parlement, les chefs coutumiers, les ONG, les confessions religieuses et les autres structures de la société civile déclarent qu’il est indispensable d’intégrer l’obligation de publier ce que l’on paie à l’État, de prévoir des sanctions, de clarifier dans la nouvelle loi les attributions des provinces et celles du pouvoir central quant à l’octroi des titres miniers. Initié par la Banque mondiale, l’actuel code minier a montré ses limites. D’où la nécessité de sa révision. Il a mis l’État dans l’incapacité d’endiguer la spéculation. Le dégel souhaité est devenu le fait de maffieux. Bien informés, ils ont usé de la corruption pour tisser des liens étroits avec les administrations.