Le message du président de la République au Sommet Action Climat à New York

En attendant la conférence COP25 qui est prévue au Chili en décembre au cours de laquelle sera défini le calendrier des premiers projets, le secrétaire général de l’ONU a réuni les gouvernements, les entreprises et la société civile le 23 septembre autour du thème de changement climatique devenu l’enjeu planétaire le plus important de notre époque. Plusieurs chefs d’État et de gouvernement y ont pris part, dont Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le président de la RDC. Il a pris la parole à la tribune, au nom de ses pairs de l’Afrique Centrale. Ci-après, le contenu de son intervention.

« C’EST pour moi un grand honneur d’intervenir sur ce sujet important, et particulièrement au nom de la sous-région d’Afrique Centrale, qui a tenu à se mobiliser dans le cadre de ce Sommet, au travers de la Communauté Économique des États d’Afrique Centrale, CEEAC.

Excellences Mesdames et Messieurs,

Comme vous le savez, environ 30 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre sont séquestrées par les forêts et les tourbières.

Nous savons tous que la Nature offre des solutions très efficaces, durables et le plus souvent peu couteuses à long terme.

Fort heureusement, notre région abrite un des plus beaux et plus important patrimoine mondial : les Forêts du Bassin du Congo qui, à cet égard, constituent une part importante de la réponse à ces grands défis qui menacent notre belle planète.

Ces magnifiques forêts sont malheureusement encore largement méconnues et trop peu valorisées par la communauté internationale.

S’étendant sur 250 millions d’hectares, avec un stock de 70 milliards de tonnes de carbone et absorbant environ 750 millions de tonnes de CO2 par an, les forêts du Bassin du Congo jouent un rôle crucial dans la régulation du climat.

La forêt du Bassin du Congo permet de contrôler la pluviométrie jusqu’aux confins de l’Ethiopie et de l’Egypte.

Cependant, de nombreux signaux indiquent que l’Afrique Centrale pourrait devenir le prochain front de déforestation massive, répétant l’histoire des deux autres grands bassins forestiers et de l’Afrique de l’Ouest.

La disparition de cet écosystème provoquerait une crise écologique sans précédent. Elle déstabiliserait l’ensemble du continent africain du fait d’une gigantesque perte de biodiversité, d’une désertification de la sous-région et de la montée considérable des pressions migratoires.

À cet égard, nous demeurons préoccupés et mobilisés par la situation du Lac Tchad et ses lourdes conséquences socio-économiques. L’adaptation aux effets du changement climatique pour certains espaces de la région Afrique Centrale est intrinsèquement liée aux efforts entrepris pour les forêts. 

C’est pourquoi, Nous, Chefs d’État de la sous-région, sommes hautement conscients que les actions que nous conduirons affecteront l’écosystème mondial. 

Sans être exhaustif et à titre illustratif, la RDC s’est engagée à stabiliser son couvert forestier à 63 % du territoire et à réduire de 17 % ses émissions de 2020 à 2030.

Le Gabon et la République du Congo, couverts respectivement à 88 et 60 % de forêts, ont interdit la déforestation des forêts à haut stock de carbone et haute valeur de conservation, tout comme ils se sont engagés à respecter des seuils minimes de déforestation de tout type de forêts.

En application du principe de zéro déforestation, les pays disposant de zones savanicoles, à l’instar de la République du Congo, de la RDC et du Gabon ont décidé d’orienter la production agro-industrielle hors des zones forestières.

Également, les deux Congo se sont engagés à préserver et gérer durablement nos zones de tourbières, qui représentent 30 milliards de tonnes de carbone, en évitant leur assèchement et leur drainage.

Quant au Gabon, après avoir interdit l’exportation de bois brut et rendu obligatoire la certification de l’ensemble des concessions forestières, Il vient de signer un accord historique avec la Norvège à travers l’initiative CAFI visant à compenser les réductions d’émission d’un montant de 150 millions de dollars américains, valorisant pour la première fois dans un pays en développement la tonne de dioxyde de carbone forestier au double de son prix habituel, de 5 à 10 dollars.

S’agissant de la RDC, j’entends accroître significativement les aires protégées y compris certains cours d’eau, sur l’ensemble du territoire afin de renforcer la préservation de la biodiversité.

Mon pays s’est par ailleurs engagé à accélérer, pour ses populations, l’accès universel à l’électricité, afin de sortir de la dépendance au bois, qui représente plus de 90 % de l’énergie consommée par les ménages.

Ce rêve peut devenir très vite réalité, nos potentialités hydro électriques évaluées à ce jour à 100 mille Mégawatts peuvent résoudre les problèmes de la population industrielle en besoins énergétiques.

Mais au-delà de la République Démocratique du Congo, le site Inga est retenu dans le cadre du NEPAD comme le moteur d’industrialisation de l’Afrique.

Excellences Mesdames et Messieurs,

Répondant à l’appel du Secrétaire Général de Nations Unies, les pays d’Afrique Centrale s’engagent ici à actualiser leurs Contributions Déterminées au niveau National pour 2020 avec comme priorité l’intégration du secteur Utilisation des terres et Foresterie.

Nous devons aussi refléter cela dans les discussions avec les institutions de Bretton Woods.

Car il est difficilement concevable que les forêts les mieux conservées au monde ne captent qu’1 % des financements disponibles.

Il nous faut faire plus, tous ensemble : Gouvernement, organisations multilatérales, ONG et surtout le secteur privé.

Ce n’est qu’en nous mettant tous ensemble que nous parviendrons à préserver les forêts du bassin du Congo. Il faut une solution équitable, c’est-à-dire prenant en compte nos besoins de développement et nos efforts de préservation, mais également la valeur de nos services écosystémiques.

Je vous remercie. »