Les places fortes étaient déjà dans le zig, les voilà maintenant dans le zag

Les places financières ont connu la semaine dernière l’une de leurs pires semaines de l’histoire, avec la propagation du coronavirus à travers la planète, les mesures prises par les Banques centrales pour tenter d’enrayer la pandémie et ses répercussions économiques.

LA SÉRIE noire se poursuit. Les qualificatifs manquent pour caractériser la semaine boursière du 9 au 13 mars. La panique des investisseurs a entraîné un véritable effondrement des indices. Entre les sorties à tout prix pour défaut de couverture, les arbitrages en faveur du marché obligataire et les ventes de protection, les arguments techniques pour pousser les cours à la baisse ne manquaient pas. Ce contexte a généré un niveau de volatilité historique, à l’image du S&P500 qui a enchaîné sur ses 15 dernières séances, 12 amplitudes de plus de 3 %, du jamais vu.

Les différentes interventions des Banques centrales n’ont pas eu l’effet escompté, il aura fallu des interventions hyper-accommodantes des États, en soutien de leur économie, même si ces annonces se font sans grande coordination internationale, pour stopper momentanément la vague d’un des plus grands tsunamis baissiers de l’histoire de la bourse moderne. 

Les actifs risqués ont subi des dégagements massifs, rapporte zonebourse.com, avec l’annonce de la suspension pendant un mois des vols européens vers les États-Unis, parallèlement au retour de la guerre des prix sur l’or noir. Les mesures de confinement prises en Europe sont également de nature à inciter les opérateurs à l’extrême prudence. Déjà dans la semaine du 2 au 8 mars, toutes les places financières avaient décroché. En Asie, le Nikkei avait perdu 15.7 %, le Hang Seng et le Shanghai Composite s’en étaient tirés un peu mieux, avec des replis respectifs de 8 % et 4.8 %. 

En Europe, les grands indices ont décroché. La semaine dernière, le CAC40 et le DAX ont reculé de plus de 20.5 % alors que le Footsie a cédé 21 %. Pour les pays périphériques de la zone euro, le Portugal a enregistré une perte hebdomadaire de 17.5 %, l’Espagne et l’Italie ont perdu 22 % (malgré un rebond respectif de 1.5 % et 8 % le vendredi 13 mars), avec l’interdiction de la vente à découvert sur certaines actions italiennes et espagnoles. Aux États-Unis, le Dow Jones a cédé 17 %, le S&P500 15.2 % et le Nasdaq100 a reculé de 13.5 %, limitant comme en Europe, quelque peu leurs pertes, grâce à cette dernière séance de la semaine.

Matières premières

La semaine dernière a été intense sur les marchés des matières premières, minés par un krach pétrolier. Les cours du pétrole ont subi des dégagements d’une rare violence, lestés par la guerre des prix déclenchée par le refus de la Russie de concéder, à nouveau, des efforts pour équilibrer le marché. L’Arabie saoudite a donc pris des mesures inédites, en abaissant significativement ses prix de vente et en augmentant sa production. Le cours du Brent a enregistré une baisse de 23 % sur la semaine, cumulant ainsi un déficit de 30 % depuis le 1er janvier. 

La panique boursière n’aura pas épargné les cours de l’or, qui n’a pas entièrement joué son rôle de valeur refuge sur la semaine. Les pertes sont restées toutefois modestes par rapport à la chute des marchés actions, l’once d’or ne cédant « que » 6 % sur la semaine à 1565 dollars. Le segment des métaux industriels a reculé aussi sur la semaine, à l’image de la baisse hebdomadaire de 4.2 % du cuivre, qui se négociait à 5 386 dollars la tonne métrique la semaine dernière.

« Stay At Home », c’est le nouvel indice à la mode en provenance de Wall-Street. Ce dernier regroupe les « soi-disant » entreprises américaines qui devraient profiter du confinement pour enrayer la diffusion du coronavirus. On y trouve des plateformes numériques aidant au télétravail, à l’enseignement à distance ou encore à la pratique de la télémédecine. À ces compagnies aux technologies innovantes se rajoutent les entreprises de loisirs, comme les jeux vidéo ou encore les diffusions de contenu vidéo et audio, telles Netflix ou Activision. Les grands de l’internet ne sont pas écartés, permettant à Facebook, Alibaba, Tencent ou Slack de faire partie de cette sélection.

La liste exhaustive de cet indice original se compose de la manière suivante : Activision Blizzard, Alarm.com, Alibaba, Amazon, Atlassian, Blue Apron, Boingo Wireless Campbell Soup, Central Garden & Pet Co., Citrix Systems, Clorox, Diamond Eagle, eBay, Facebook, GrubHub, JD.com, Match, Netflix, New York Times, Nexstar Media, Okta, Peloton, Purple Innovation, Shutterstock, Sirius XM, Slack, Sonos, Sturm Ruger & Co., Tencent Music, Yelp, Zillow, Zoom et Zynga. 

Les amplitudes sur les taux se caractérisent par une volatilité exceptionnelle. Comme la multitude de supports, les mouvements se veulent historiques sur le marché obligataire avec une tension sur les emprunts « corporates ». 

Le rendement du 10 ans américain, après avoir touché un plus bas à 0.54 % a repris le chemin de la hausse et s’est situé en fin à la clôture du 13 mars sur 0.92 %. Cette correction sur les marchés des titres souverains se vérifie de manière majoritaire, sauf pour le Bund allemand qui s’est stabilisé à -0.64 %. L’évolution des rendements obligataires sont déterminés par l’annonce de mesures budgétaires et monétaires, d’où la remontée des taux pour l’OAT française à -0.06 % et surtout pour la dette italienne à 1.8 %. La référence suisse à 10 ans s’est stabilisé sur des bases très négatives à -0.73 %, tout en ayant touché au plus bas -1.02 %. 

Marché des changes

Les cambistes se dirigent massivement sur les devises refuges. Ces arbitrages intensifs valorisent le yen qui a gagné du terrain sur l’ensemble de ses contreparties la semaine dernière. Les variations sur le couple USD/JPY ont affolé les écrans, passant de 112 à 101 JPY pour un dollar. La ruée sur le franc suisse démontre également cet état d’esprit de privilégier les monnaies résilientes. La parité USD/CHF a connu une forte baisse jusqu’à 0.92 CHF (-300 points de base). Une baisse des taux d’intérêt par la Banque Nationale Suisse (BNS) paraît de plus en plus probable. Néanmoins, elle ne pourra pas aller à l’encontre d’un éventuel tsunami de liquidités déversé par les autres Banques centrales.

La livre sterling n’a pas échappé à la déroute, perdant du terrain face à toutes les monnaies principales. Mercredi 11 mars, la Banque d’Angleterre avait annoncé par surprise une baisse de 0.5 point de son taux directeur. Si dans un premier temps, la devise n’avait pas souffert, elle n’a malheureusement pas réussi à se maintenir de manière durable. Le billet vert a gagné 400 points de base à 1.25 GBP contre la devise britannique.

En parallèle à ces devises majeures, les monnaies émergentes subissent les vents violents de la tempête, à l’image du rouble qui a accusé le coup, baissant de 6.5 % face au billet vert. Ce n’est pas la seule monnaie à être concernée puisque le peso mexicain a perdu 5.25 %, le rand de l’Afrique du Sud, 3.8 % et la couronne norvégienne près de 3 %, ces trois dernières étant impactées par la décision de l’Arabie saoudite de figer ses quotas de production de pétrole.

Statistiques économiques. Après la réduction surprise du taux directeur des États-Unis par la Réserve Fédérale (Fed), le 5 mars dernier, les marchés espéraient un tir groupé des autres Banques centrales. Ce fut chose faite avec la Banque centrale anglaise (BOE) qui a annoncé une réduction de son taux directeur de 0.5 pdb, amenant ainsi le taux à 0.25 %. En revanche, la BCE n’a pas bougé son coût de refinancement. Il faut dire que les marges de manœuvre ne sont pas les mêmes, chez la BCE ou chez la BNS qui doivent trouver des alternatives. C’est, en effet, sur ces dernières mesures annoncées par Madame Lagarde que le marché a été déçu.