Médias et gouvernance de l’Internet

Un pointeur prêt à cliquer dans la barre d’adresse
Un pointeur prêt à cliquer dans la barre d’adresse

Nous savons tous que les médias jouent un rôle important en tant que quatrième pouvoir dans le monde. Qui d’entre nous n’a pas entendu parler d’un scandale mis en lumière par un journal qui a coûté son poste à un fonctionnaire, un ministre, ou parfois un président? Certains journalistes sont devenus nos « maîtres » à penser par leur capacité à nous faire entendre autre chose que ce que les grandes entreprises privées veulent que nous gardions à l’esprit. Les réalités des petites villes sont devenues presque familières dans le monde entier grâce à l’activisme de certains journalistes.

Mais alors que d’une part, cette responsabilité et le pouvoir des médias sont maintenant acceptés et reconnus dans le monde entier, de l’autre côté, certains pays continuent à restreindre la liberté d’expression de leurs médias, des journalistes et aussi leurs citoyens. En faisant cela, c’est aussi à nous qu’ils privent de notre droit à l’information, notre droit à la liberté d’expression, et de notre droit à la diversité.

Heureusement, dans de nombreux pays où la liberté d’expression est menacée, les médias alternatifs ont émergé et la plupart profitent des avantages de l’Internet. Selon les contextes, les médias ont été mis en ligne pour diverses raisons. Que ce soit pour éviter les coupures dans les subventions qui les ont forcés à mettre la clé sous la porte, ou en raison de licence d’exploitation prohibitive, l’Internet a été une solution pour eux.

Lorsque des problèmes de sécurité ont empêché la publication des articles sous leur véritable identité, l’anonymat rendu possible grâce à l’Internet les a aidés.

Au-delà des médias traditionnels, les médias sociaux tels que Facebook, Twister, Youtube ont également contribué à diffuser des images de violations des droits humains parfois quelques minutes seulement après qu’elles aient été commises. Des campagnes internationales contre la violence soutenue par l’État ont porté des fruits d’une manière inimaginable depuis une décennie.

Mais encore, ceux qui suppriment la liberté, ceux qui se donnent le droit de penser à notre place, et ceux qui veulent nous manipuler ont trouvé la parade. Ils embauchent des bloggeurs professionnels pour imiter les points de vue de « l’opposition», ou multiplier le vote populaire à leur avantage.

Ces personnes violent la vie privée des utilisateurs d’Internet, et parfois les envoient refroidir dans une prison ou font «disparaître» ceux qui écrivent pour documenter ses violations.

Au nom de la morale, de la lutte contre la pornographie et l’exploitation des enfants à des fins sexuelles, la sécurité de leurs Etats, de leurs frontières (mais nous savons aussi que c’est pour protéger leurs investissements et leurs intérêts dans différents pays), ils restreignent l’ouverture qui a fait de l’Internet un outil si puissant et populaire : un média qui appartient à tout le monde, indépendamment du sexe, de la race, de l’orientation sexuelle, de l’obédience religieuse ou de la classe sociale.

Donc, ce sont toutes ces choses qui m’ont convaincue et m’aident à dire que nous devons exiger à tout prix que nos médias nous soient rendus. C’est pourquoi j’essaie comme je le peux de prendre part aux travaux du forum sur la gouvernance de l’Internet qui se tient chaque année, d’abord au niveau sous-régional, régional puis au niveau mondial.

Mais si nous les usagers et les consommateurs de l’Internet ne sommes pas prudents, les valeurs qui nous sont si chères et font notre force peuvent également être perdues et conduire à notre destruction.

La convergence – la capacité de l’ Internet de mettre ensemble et consolider les services et les outils numériques qui étaient autrefois indépendants – a permis le développement d’ appareils multifonctions, des plates-formes et des réseaux à travers plus de contacts et des échanges entre les hommes et les différents éléments spécifiques à un outil numérique homogène.

Mais cette convergence a créé un monopole dans le domaine de la communication et des médias. Des études ont montré que les dix premières sociétés de publicité dans le monde contrôlent seul 71 % de la publicité en ligne, comme l’a dit un délégué de l’observatoire des médias et de la communication néerlandaise. Ceci leur donne une très forte chance de nous faire acheter, accepter tout ce qu’ils veulent. Tout et n’importe quoi.

La convergence signifie aussi moins de diversité de l’information. Par exemple, un journal populaire aux États-Unis, le Washington Post, a décidé de fermer ses bureaux en dehors de la capitale des États-Unis en décembre 2009. Je ne parle même pas des journaux africains qui ont juste disparu parce qu’il n’y avait plus d’intérêt à les financer, car on peut désormais savoir tout ce qu’on veut de l’Afrique sur Internet «.

Dans tous les cas, cela signifie plus de travail pour les quelques journalistes qui restent, et avec moins d’argent. Moins d’argent signifie peu de diversité dans l’information, moins de voyages d’enquête, une hiérarchisation arbitraire de l’information ainsi que la nécessité d’agir rapidement pour livrer le produit, comme dans une usine.

Pendant ce temps, les crises oubliées les sont à jamais. La violence domestique que les femmes et les enfants vivent tous les jours ne peut rivaliser avec la guerre en Afghanistan. La violence que les femmes craignent dans la vie s’adapte ainsi au nouveau monde numérique.

Entre temps, disons-le, les régulations menacent l’ouverture, l’anonymat, la diversité des voix et bien plus encore.

Vous comprenez pourquoi les conversations sur la gouvernance de l’Internet doivent intéresser tous citoyens du monde.