Pacifier la sous-région Afrique centrale, sans trop d’accrocs ?

Les mulitaire de la Mission de stabilisation en République Centrafrique, (photo AFP)
Les mulitaire de la Mission de stabilisation en République Centrafrique, (photo AFP)

Du M23 tristement célèbre, en passant par les maï-maï, les mbororo jusqu’aux antibalaka, certes que la sous-région des grands lacs africains ou encore le centre de l’Afrique connaît une forte ébullition dont la pacification, bien qu’en cours d’avancées significatives, demeure encore un casse-tête au regard des contingents à déployer pour mâter les groupes armés par-ci et les rébellions par-là. D’aucuns se demandent si de l’Organisation des Nations Unies et de l’Union Africaine, incluant aussi les forces des pays eux-mêmes en proie à ces agitations guerrières, la formule de la paix durable peut être aisément évoquée à ce stade.

Pourtant, le processus de pacification est réel depuis la maîtrise en novembre dernier du mouvement du 23 mars, une rebellion considérée comme la plus farouche de la contrée, vaincue par les FARDC, appuyés par la brigade d’intervention de la Monusco. Cette victoire a donné des ailes jusqu’à effrayer bon nombre des groupes armés dont on a appris la reddition de plus de 11000 combattants à nos jours. Mais après ces opérations, Business et Finances a reçu à sa rédaction des rapports inquiétants qui font montre des violences et exactions récentes commises à l’encontre de la population civile, en particulier dans les zones reculées, entraînant des dégâts matériels et économico-financièrs importants. C’est le cas de celui de l’Ong Oxfam publié le 27 janvier dernier, souligne la crainte d’une résurgence des ces actes barbares bien que « 2014 a commencé tout juste à donner des motifs d’espoir de paix dans l’Est de la RDC».

Il s’est observé des initiatives nationales et des engagements politiques au niveau régional et international en 2013 qui ont donné lieu à de nouveaux accords-cadres pour résoudre le conflit et l’insécurité dans la contrée. «Depuis le départ du M23, les gens peuvent commercer à nouveau, aller au marché, ils sont désormais libres de travailler. Plus personne ne nous importune, et les FARDC nous protègent», a affirmé à Oxfam une personne employée dans une administration, à Nyiragongo (Nord-Kivu) précisant tout de même que rien ne garantit pour l’instant que cela suffira à mettre un terme à l’insécurité dans la région. La situation de nombreuses personnes reste précaire, en particulier dans les villages reculées, où l’État est relativement absent. Le début de la traque des adf en territoire de Beni, des mbororo le haut-uélé, sans oublier les antibalaka en Centrafrique et une rébellion intense au Sud Soudan, n’a pas empêché la recrudescence de l’insécurité dans la sous-région.

Fin janvier et début février 2014, plus de 70 civils, hommes et femmes, sont exécutés sommairement dans l’est de la République Démocratique du Congo, par des groupes armés à Nyamaboko I et II, dans le Masisi. «La grande majorité des personnes tuées les sont à coups de machette», précise un communiqué de la Monusco. Ici, une dizaine de groupes armés locaux et étrangers n’ont pas encore désarmé et poursuivent les pillages, au nez et à la barbe de la brigade d’intervention de l’Onu, et ceci pour des raisons ethniques et économiques. Les bonnes intentions ne suffisent pas comme pour paraphraser Martin Kobler le Chef de la Monusco, qui dit «ne ménager aucun effort pour neutraliser tous ces groupes armés responsables de tels actes». Entretemps, les opérations de nettoyage se poursuivent en territoire de Beni comme ailleurs pour neutraliser les adf et les fdlr, même si ces derniers se sont déclarés prêts à déposer les armes, mais pas avant des pourparlers avec les autorités du Rwanda, qui s’y refusent. « On a déposé les armes volontairement. plus aucun combattant armé des FDLR», avait affirmé dimanche dernier Wilson Irategeka, secrétaire exécutif par intérim du mouvement. «on ne les a pas données à la Monusco», et il n’est pas question de les rendre avant que débutent des «négociations avec Kigali», a-t-il précisé à l’Afp.

Face à l’Onu, les anti-balaka menacent et résistent

C’est un peu au même jeu de ping pong auquel l’on assiste en République centrafricaine où les chefs autoproclamés des miliciens anti-balaka ont mis en garde, jeudi 13 janvier dernier, contre toute attaque les visant, répliquant ainsi à la déclaration prononcée le lendemain par la présidente Catherine Samba Panza qui a promis «une guerre sans merci» s’ils ne cessaient pas de commettre des crimes contre les musulmans. Des centrafricains, épuisés par une année de violences incessantes, ont déclaré que « les anti-balaka en majorité des chrétiens, veulent nous entraîner loin, plus loin que les ex-Séléka » à dominante musulmane qui avaient porté l’ancien président Michel Djotodia au pouvoir en mars 2013.

A Bangui, les tirs d’armes continuent à crépiter, bien souvent d’origine indéterminée, même dans la ville quadrillée par les soldats français et la force de l’Union africaine (Misca). Des poches de tensions extrêmes perdurent autour du PK-5, le grand quartier commerçant de la capitale, majoritairement musulman. «Une fosse commune a été découverte dans un ancien camp Séléka situé près du camp Béal », a indiqué le procureur de la république à Bangui, Ghislain Grezenguet qui précise que de nombreux corps ont été vus dans un ancien réservoir de carburant par des soldats de la Misca chargés de la surveillance du site, alertés par l’odeur nauséabonde. Les milices anti-balaka, une myriade de groupes formés à l’origine de paysans chrétiens de l’ouest de la Centrafrique pour se défendre contre les exactions des combattants majoritairement musulmans de la Séléka, sont devenues en quelques mois une nébuleuse qui se caractérise par des crimes visant les civils musulmans. Amnesty international a qualifié ces actes de « nettoyage ethnique » car non seulement elles ont redoublé, mais entraîne un exode massif des populations musulmanes, même si la présidente centrafricaine parle plutôt «un problème d’insécurité».

Rébellion, conflit entre les Nuer et les Dinka au Sud soudan

En dépit des appels aux cessez le feu, les combats se poursuivent au Sud soudan entre l’armée nationale et les rebelles affiliés à l’ancien Vice président, Riek Machar. Et ce, malgré l’engagement mercredi 12 février dernier du chef de la diplomatie sud-soudanaise qui a déclaré que les auteurs d’atrocités «répondront de leurs actes» quelle que que soit leur origine ethnique, en annonçant l’arrestation d’une centaine de militaires Dinka, l’ethnie du président Salva Kiir. «Nous traiterons de la même manière tous ceux qui sont impliqués dans les massacres et qui ont essayé d’utiliser la carte ethnique, notamment dans l’armée, afin qu’ils répondent de leurs actes», a déclaré à l’Afp, Barnaba Marial Benjamin lors d’une conférence de presse à Londres.  L’armée sud-soudanaise loyale au président Kiir et des troupes mutinées fidèles à M. Machar s’affrontent depuis mi-décembre au Soudan du Sud, indépendant depuis juillet 2011. Les combats, accompagnés de massacres entre communautés Dinka et Nuer, ont fait des milliers de morts. Le cessez le feu a été conclu le 23 janvier dernier mais violé à plusieurs reprises par les deux parties en conflit. Quatre personnalités politiques détenues à Juba depuis mi-décembre constituent une source de contentieux entre les deux camps et malgré la pression, le gouvernement confirme qu’ils resteront derrière les barreaux tant que « la procédure judiciaire» est en cours. Au Soudan, les négociations ont débutée en Ethiopie sous l’égide de l’Union africaine entre le gouvernement et le SPLM-N, (ex-rébellion sudiste) qui se font la guerre dans les régions du Kordofan et du Nil-Bleu (sud). «Les deux parties sont appelées à proclamer une cessation immédiate des hostilités, permettant aux équipes humanitaires de fournir le soutien nécessaire à ces régions », a déclaré dans un communiqué Ali Al-Za’tari, chef de la mission de l’ONU au Soudan. Aucun bilan des victimes n’a jamais été établi dans ces combats où des rebelles s’en prennent au gouvernement depuis près de trois ans. Selon l’ONU, le conflit a affecté 1,2 million de personnes.

Responsabilités, négociations, pourpalers toujours…

Des milliers des diplomates nationaux et internationaux ont fait le tour dans cette région de l’Afrique centrale pour, selon différentes missions, tenter de sortir cette partie du continent dans ce puzzle d’insécurité violente. Pendant que les Forces armées de la RDC pilonnent les positions des adf, les Mbororo, les Fdlr et autres groupes armées, l’envoyée spéciale de l’ONU pour la région des Grands Lacs, Mary Robinson, est revenu le mercredi 12 février dernier à Kinshasa pour une tournée régionale axée sur un retour à la paix. Ses contacts dans les trois pays visés, la RDC, l’Angola et le Rwanda, ont comme finalité d’accélérer la mise en oeuvre de l’accord-cadre de paix d’Addis-Abeba.
Signé par onze pays africains fin février 2013 y compris le Rwanda et l’Ouganda, les deux accusés. Le défi pour 2014 est maintenant de consolider tout cela, de faire en sorte que les engagements pris soient mis en oeuvre», a insisté mercredi dernier le coordinateur principal de l’Union européenne pour les Grands Lacs, Koen Vervaeke. Y a-t-il des mesures contraignantes pour amener les signataires à réaliser cet accord? Là est toute la question. Les pays de la région ont l’obligation de s’impliquer dans la recherche d’une paix durable dans la contrée au lieu d’attendre que des étrangers viennent les faire à leur place. A l’exemple d’autres pays du monde, le développement durable ne peut provenir d’un sous bassement conflictuel, d’où la nécessité de planifier des actions interrégionales communes à l’instar de la vrai CPGL.