Quand le prix de l’inox bondit, le fer de la RDC est victime d’une intox aux USA

Utilisé dans la fabrication de pièces automobiles, d’électroménager, la construction, l’industrie alimentaire et pétrochimique, ou encore pour des applications médicales, l’inox, alliage du fer et du carbone, devrait se négocier autour de 2,265 euros le kg en mars, selon LME.

UNE EMBELLIE qui aurait dû susciter un réel intérêt pour la République démocratique du Congo, si ses mines de fer étaient effectivement exploitées et le minerai exporté. Il y a 11 ans, jour pour jour, l’homme d’affaires israélien, Dan Getler, avait entrepris une prometteuse aventure minière dans la région de Banalia à quelque 125 km au Nord de la ville de Kisangani, dans la province de la Tshopo. Depuis le projet Oriental Iron Company (ORICO) évolue en clair-obscur, en tout cas dans une sorte d’intox spéculative depuis le 15 juin 2018 lorsque le Trésor américain a infligé de nouvelles sanctions contre Dan Getler pour corruption outrée. 

De quatorze des entreprises ciblées par les Américains, cinq se trouvent en RDC dont Oriental Iron Company. Cependant, d’après certains analystes, l’administration Trump s’est fondée sur des informations peu fiables et difficiles à prouver la véracité. Oriental Iron Company a respecté toute la procédure en matière de mines en RDC.    

Un investissement de 7 M USD

D’ailleurs, d’après Martin Kabwelulu, le ministre sortant des Mines, Dan Getler avait investi quelque 7 milliards de dollars dans le projet Orico. Nous sommes au mois de mars 2008, le projet Orico consiste en l’exploitation de gisements de fer dans le territoire de Banalia et dans une partie de l’Ituri. « Les gisements de Banalia recèlent des minerais d’une grande valeur selon plusieurs experts. La société congolaise Bureau d’études et d’engineering (BEE) avait déjà effectué des études sur ce site il y a quelques temps », avait renchéri Martin Kabwelulu. Selon Dan Gertler, lui-même, ORICO avait déjà commencé la phase d’exploration. Elle a notamment procédé aux forages de reconnaissance qui ont prouvé l’existence de minerais de fer. 

65 millions de tonnes l’an

Et dans trois prochaines années, soit en 2011, ORICO aurait dû passer à la phase d’exploitation et acheminer de Banalia au port de Matadi, dans le Kongo-Central, quelque 65 millions de tonnes de fer par an pour l’exportation. Depuis, rien n’est venu sans doute du fait des États-Unis qui soupçonnent l’homme d’affaires israélien de graves actes de corruption. Depuis, voilà pratiquement dix mois, l’État n’a pas daigné trouver un repreneur du projet Oriental Iron Company. 

Par ailleurs, la grande production de fer du géant Rio Tinto – qui s’était également annoncé dans la région – s’est limitée à un simple fait d’annonce. Selon la chambre de Mines de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), Rio Tinto hésiterait encore à investir du lourd en RDC pour des raisons de stabilité sociopolitique. Le récent sondage – début mars 2019 – de l’Institut Frazer qui classe la RDC dans le bas du tableau des pays disposant d’un cadre juridique minier attractif pourrait refroidir les ardeurs des opérateurs miniers vis-à-vis de la RDC. Toutefois, il existe d’autres projets d’extraction du fer dans la région de Luebo, dans l’ex-province du Kasaï Occidental et au Katanga qui ont également été annoncés en grande pompe par le ministère des Mines. Rien à signaler, ni côté production ni côté recettes pour le Trésor public. Et pourtant, la guerre de l’acier qui profile depuis l’Outre-Atlantique aurait à coup sûr des effets même dans les carrières de Banalia.   

Les cours mondiaux du fer observent de coutume un yo-yo sur toute l’année. Le prix indiqué dans des bourses est un prix composite calculé par MEPS, le leader mondial de l’analyse marché de l’acier, à partir d’inox de type 304 sur trois régions (Europe, Asie, Amérique du Nord). En octobre 2018, le prix de l’inox s’établit à 2 574 dollars la tonne, en baisse de 4 % sur un mois et en hausse de 0,9 % sur un an, selon London Metal Exchange. Dont les experts rappellent toutefois que, comme, l’acier et la ferraille, l’inox ne fait pas l’objet de cotations en Bourse et sont échangés par contrats entre acheteurs et vendeurs, ou par l’intermédiaire des négociants.

Toutefois, des analystes notent une certaine abondance de l’offre et le ralentissement de la demande qui tirent les prix vers le bas. Alors que les prix avaient triplé entre 2006 et 2011, ils sont redescendus depuis pratiquement à leur niveau d’avant crise avant de remonter fin 2018. La Chine, l’Australie et le Brésil sont les principaux pays producteurs. En Afrique centrale, le Congo-Brazzaville a fait son entrée dans le cercle restreint des États producteurs de fer depuis fin 2018, avec la firme Sapro de Paul Obambi. 

Le fer demeure le métal le plus utilisé au monde loin devant l’aluminium et le cuivre. C’est aussi l’un des plus anciens à avoir été exploité par l’homme, les premiers objets en cuivre datant de plus de 7 000 ans. L’inox (nom courant de l’acier inoxydable) est un alliage d’acier (fer et carbone) auquel on a ajouté du chrome à hauteur de minimum 10,5 %. C’est la formation d’une couche d’oxyde de chrome à la surface de l’acier qui lui confère sa résistance à la corrosion. On peut parfois l’enrichir avec du nickel ou du molybdène pour augmenter son caractère anti-corrosif. La RDC manque de gagner gros.