Téléphone mobile : la banque de demain

Le téléphone mobile n’arrête pas de nous émerveiller. Du simple moyen de communication, il est aujourd’hui un véritable porte-monnaie. Le mobile banking est en train de révolutionner les mœurs à travers le pays.

Les paysans recourent de plus en plus au mobile banking pour le transfert d’argent.

Le magnat américain Bill Gates a prédit que d’ici 2030, environ deux milliards de personnes dans le monde n’ayant pas actuellement de compte bancaire, épargneront et réaliseront des paiements avec leur téléphone. L’Afrique est dans la ligne de mire des fournisseurs de services de transfert d’argent par mobile. Ceux-ci offriront un large éventail de services financiers, des comptes d’épargne au crédit d’assurance. C’est tout dire sur l’avenir du mobile banking qui remet en question la problématique de la bancarisation. Selon les estimations de la Banque centrale du Congo (BCC), seulement moins de 6 % des Congolais utilisent actuellement une des 18 banques commerciales agréées ou d’autres services financiers formels. Les taux d’inclusion financière et de bancarisation – moins de  10 % pour une population de plus ou moins 70 millions d’habitants – sont parmi les plus bas de l’Afrique. On estime, par ailleurs, la masse monétaire circulant hors banques à environ 4 milliards de dollars. Un pactole que lorgnent les banques, les coopératives d’épargne et de crédit, et les institutions de microfinance.

Objectif majeur

L’introduction du mobile banking dans le système national de paiement est un objectif majeur pour la BCC en vue de l’accroissement du taux de bancarisation et d’inclusion financière. Depuis quelques années, la Banque centrale a entrepris avec le concours du Fonds monétaire international (FMI) la réforme de l’intermédiation financière à travers les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Ces embellies du système bancaire peuvent donner à penser que désormais l’activité économique jouit en République démocratique du Congo d’apports accrus du capital à travers l’intermédiation financière.

Pourtant, la situation générale est contrastée en raison de la persistance de l’économie informelle qui est soutenue par une désintermédiation financière  dont témoigne la vigueur du marché de change parallèle et la circulation monétaire hors banque de 4 milliards de dollars contre des dépôts bancaires de quelque 3 milliards de dollars, logés dans environ 1 million de comptes bancaires. Ces effectifs de comptes sont insignifiants au regard d’une population autour de 70 millions d’âmes. Il s’agit sans doute de l’un des taux de bancarisation les plus faibles au monde. La poussée de la bancarisation face à la  faiblesse de dépôts donne matière à réflexion à nombre d’observateurs avisés, qui s’interrogent sur ce que cachent les clairs-obscurs du secteur bancaire.

Plusieurs raisons sont avancées pour justifier ces contrastes. Le recours au circuit bancaire aujourd’hui est simplement un effet d’époque, c’est-à-dire détenir un gadget électronique. En effet, les jeunes, loin de voir les bienfaits d’entretenir un compte bancaire, tiennent à exhiber une carte bancaire auprès des amis et des filles à impressionner. Ce qui limite l’augmentation de dépôts. S’agissant de l’afflux des investisseurs, un analyste brosse deux voies. Soit qu’ils viennent pour blanchir de l’argent noir dans ce qui pourrait passer à leurs yeux pour une nouvelle frontière du capitalisme casino, où peuvent se réfugier encore les fonds toxiques contre lesquels le G-20 a, au nom de la moralisation du capitalisme, engagé une lutte impitoyable. Soit qu’ils sont véhiculés par des trusts financiers internationaux, qui tiennent à garder une position forte, en attendant que se calme la tempête pour profiter de la relance d’une économie aux potentialités pétillantes.

L’autre paradoxe, c’est la quasi-absence de ces institutions financières dans l’arrière-pays et leur concentration dans leur tour d’ivoire kino-lushoise. L’autorité monétaire devrait demeurer vigilante. Le gouvernement devrait fournir des efforts de réforme pour répondre au souci d’assainissement de l’environnement économique et du climat des affaires, car il ne peut y avoir prospérité des institutions financières sans celle des entreprises.