La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, et le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, ont donné, jeudi 8 octobre, le coup d’envoi officiel des assemblées annuelles de leurs institutions, en Amérique latine pour la première fois depuis quarante-neuf ans et dans un contexte de croissance affaiblie et de lutte contre le dérèglement climatique.
Entre le ralentissement économique général et les difficultés grandissantes des pays émergents, l’ambiance est plutôt sombre, à l’image du ciel plombé de la capitale péruvienne, Lima. Mais, comme à son habitude, Mme Lagarde a refusé de céder au pessimisme, tandis que M. Kim a redit que 2015 serait à marquer d’une pierre blanche : la proportion de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (avec moins de 1,25 dollar par jour, soit 1,10 euro) doit tomber cette année sous la barre des 10 %, probablement autour de 9,6 %. Une première.
« Si nous restons confiants dans notre capacité à mettre un terme à l’extrême pauvreté d’ici à 2030, la dernière partie de ce programme sera très difficile à mettre en œuvre parce que nous sommes entrés dans une période de croissance faible, de fin du super-cycle des matières premières, de hausse attendue des taux d’intérêt américains et de sorties continues des capitaux des pays émergents », a toutefois ajouté l’Américain, médecin de formation. Cette réalité économique risque de compliquer la tâche de la Banque mondiale. L’institution devrait être davantage sollicitée pour aider les pays les plus en difficulté et/ou ceux qui accueillent massivement des réfugiés (Liban, Jordanie, Turquie, etc.) et pour lutter davantage contre le dérèglement climatique : toute la question est de savoir si elle disposera de capitaux suffisants pour mener à bien l’ensemble de ses missions.
Accroître les financements climat
À peine arrivé à Lima, le ministre français des Finances, Michel Sapin, a formulé le vœu, jeudi, que les organismes multilatéraux et le secteur privé accroissent leurs financements climat. « L’Organisation de coopération et de développement économiques [OCDE] a établi que près de 62 milliards de dollars ont été mobilisés en 2014 pour aider les pays du Sud, sur un objectif de 100 milliards par an d’ici à 2020. Ce chiffre n’est pas décevant. Il montre qu’un effort est fait et qu’il en reste un, accessible, à faire », a estimé M. Sapin. Le ministre a fait observer que la Banque mondiale, tout en soutenant la dynamique de la COP21, n’avait pas révisé à la hausse la part de ses financements climat (20 %). Pour faire bonne mesure, il a également jugé que la Banque européenne d’investissement (BEI) pouvait faire plus. La France, qui accueille la COP21 à Paris à partir du 30 novembre, espère bien engranger de nouveaux financements à Lima.
La directrice générale du FMI a assuré qu’il existait « un scénario de sortie possible vers un renforcement de nos économies et vers un redressement de la croissance potentielle ». Elle a regretté que les prescriptions du Fonds ne soient « pas toujours appliquées ni entendues », et défendu la nécessité de soutenir la demande, de prendre des mesures en faveur de la stabilité financière et d’engager des réformes structurelles. Par ailleurs, alors que les prévisions de croissance du FMI pour le Pérou, basses, ont beaucoup fait jaser à Lima, Mme Lagarde a cherché à mettre du baume au cœur des Péruviens, qui se sont décarcassés pour accueillir les assemblées annuelles, en précisant qu’elle « espérait se tromper ». Interrogée, enfin, sur l’éventualité d’un deuxième mandat à la tête du FMI – le premier prend fin en juillet 2016 –, la Française a reconnu qu’elle y réfléchissait mais a rappelé que la décision ne lui appartenait pas. « J’ai fait du mieux que j’ai pu », a confié Mme Lagarde, qui semble avoir vraiment pris ses distances avec la politique française. Rien ni personne ne semble devoir s’opposer à ce deuxième mandat, ni dans les économies avancées ni dans les pays émergents, qui ne semblent pas encore prêts à s’accorder sur le nom d’une personnalité issue de leurs rangs.