La prévention contre les risques de maladies liées à la nourriture fait encore débat. Un plaidoyer se met en place pour l’amélioration de l’hygiène et des conditions de conservation de la viande dans les abattoirs
En matière de consommation de viande rouge, les règles d’hygiène et les normes de police sanitaire sont de mise. Dans certains pays organisés, la filière qui va du fermier éleveur à la chaîne de distribution fait l’objet d’un marquage strict. Question de traçabilité en cas de problème. Dans une étude récente sur les abattoirs dans quatre pays d’Afrique centrale (Congo, Tchad, Cameroun et Centrafrique), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) attire l’attention sur la conservation des aliments, notamment de la viande. Qu’en est-il de la situation en République démocratique du Congo ? Médecin vétérinaire, Prosper Kabambi est chef de division à la Direction de la santé animale du ministère de l’Agriculture et de l’Élevage. Il explique que, mal conservée, la viande d’animaux abattus est exposée aux microbes de toutes sortes dans les abattoirs, les aires d’abattage et dans les autres lieux d’abattage hors normes éparpillés à travers le pays.
Il cite en passant quelques abattoirs publics : un abattoir à Bunia, dans l’Ituri ; deux à Kinshasa (Masina et Nsele DAIPN) ; un à Matadi dans le Kongo-Central ; un à Goma dans le Nord-Kivu ; et un à Lubumbashi, dans le Haut-Katanga.
Des mesures à prendre
Dans toutes ces structures publiques et bien d’autres, le vétérinaire déplore la non-observance des règles élémentaires d’hygiène, notamment le port obligatoire du tablier lors de l’abattage. Par conséquent, la viande est exposée à la contamination des microbes. « Les aires d’abattage et les abattoirs fonctionnent sans normes et sont dépourvues d’eau et d’électricité dans les marchés municipaux dans les villes congolaises », souligne le docteur Kabambi. Il préconise l’observance des règles d’hygiène à tous les niveaux : de l’abattage de l’animal à la vente de la viande, en passant par le transport. Il met l’accent sur l’alimentation en eau et en électricité des abattoirs, des aires d’abattage et de toutes les structures concernées.
Le respect de la procédure de conservation de la viande et l’équipement des abattoirs en matériel appropriés sont essentiels. D’où la nécessité pour les abattoirs d’être dotés de lieux de réception et de stockage des bêtes avant leur abattage. « C’est anormal que, dans un abattoir, il n’y ait pas de couloirs conduisant au lieu d’abattage, de salles d’étourdissement d’animaux, de lieux de saignement, de coupes, encore moins de conservation d’animaux abattus », regrette Prosper Kabambi.
Guide de bonnes pratiques
Dans son étude, la FAO recommande l’interdiction de la vente anarchique de viandes débitées à même les étals, sans protection et à proximité directe de légumes et de fruits. D’après l’organisme onusien, les professionnels de l’abattage, en collaboration avec les autorités compétentes, doivent élaborer et diffuser les guides de bonnes pratiques d’hygiène aux stades d’abattage, de transport et de vente de la viande. Pour les experts de la FAO, un vaste programme de lutte contre l’abattage non contrôlé d’animaux doit être lancé par les pouvoirs publics, car l’accès à une viande saine est un droit pour le consommateur. La FAO insiste sur la systématisation du contrôle sanitaire à tous les stades. Se basant sur la situation dans les quatre pays africains observés, elle plaide aussi pour l’actualisation des textes réglementaires et légaux régissant le secteur des abattoirs et les circuits de distribution de viandes rouges. Cette évolution concerne essentiellement les règles d’hygiène relatives à l’abattage des animaux et au commerce des viandes, les procédures d’inspection sanitaire vétérinaire des viandes, le transport des viandes, les normes techniques et sanitaires relatives aux abattoirs d’animaux de boucherie.
État des lieux en RDC
La loi sur le secteur des abattoirs date de la période coloniale. Son actualisation est une nécessité d’évidence, souligne le docteur Kabambi. L’étude de la FAO, pense-t-il, donne des pistes adaptables au contexte national.
Néanmoins, il préconise quelques actions sous forme de campagnes de sensibilisation des professionnels par les autorités sanitaires en vue de l’application effective des dispositions réglementaires et légales. D’autres actions portent sur l’élaboration des cahiers de charges relatifs au transport d’animaux vivants et de viandes, la préparation des normes techniques et sanitaires relatives aux abattoirs d’animaux de boucherie et aux règles d’hygiène relatives à l’abattage d’animaux et aux procédures d’inspection sanitaire vétérinaire des viandes. À ce propos, la FAO exhorte les ministres de l’Agriculture, de l’Intérieur, du Commerce et de la Santé à publier des arrêtés correspondant à ces actions préconisées.