Il est devenu une coutume qu’à la fin de chaque année, la Fonction publique et les entreprises publiques et privées passent des commandes des vivres aux importateurs en faveur de leurs employés. Cette pratique rapporte gros aux importateurs. Par exemple, pour cette fin d’année, le vice-Premier ministre sortant chargé du Budget, Michel Bongongo, a attribué le marché de l’acquisition des 25 311 sacs de riz de 50 kg à la société Socimex détenue par des Libanais. Auprès du même importateur, la Société commerciale des transports et des ports (SCTP) attendait une livraison de 10 000 sacs de riz. D’autres entreprises de la place ont déjà été servies. Mais les deux commandes précipitées auront engrangé environ 3 milliards de FC dans les caisses de l’importateur.
La RDC importe en moyenne 270 000 tonnes de riz l’an. À la mi-novembre, le ministre sortant de l’Économie, Modeste Bahati Lukwebo, annonçait au sortir de la réunion dite de la Troïka stratégique sous la direction du Premier ministre Matata Ponyo que le gouvernement avait instruit la Banque centrale de mettre à la disposition des importateurs de vivres, dont le riz, quelque 45 millions de dollars. Il s’agit, entre autres, de Socimex et Congo Futur. Les importateurs sont également bénéficiaires des allégements fiscaux et douaniers pendant trois mois (novembre 2016 à janvier 2017).
Booster la production locale
Mais comment revaloriser la production locale dans cette situation de déséquilibre ? Grâce à un prêt du Fonds OPEP de 17 millions de dollars au profit des riziculteurs de Masina dans l’Est de Kinshasa, cela est possible. À Kinshasa, deux sites de production du riz contigus (Ngwele et Masina) font de la culture bio dans l’espoir de se frayer une place sur le marché ultra-dominé par des importateurs de riz thaïlandais et brésilien. C’est du David contre Goliath. Une concurrence rendue déloyale par la volonté des décideurs. Les producteurs locaux ne sont point subventionnés. Mais les rapports de force devraient pouvoir changer au bénéfice des producteurs locaux à moyen terme. En effet, la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), qui gère notamment le Fonds OPEP (OFID) pour le développement international, a, en effet, accordé à la RDC un prêt à un taux concessionnel de 17 millions de dollars en vue de financer le coût du programme d’aménagement de la riziculture dans le site de Masina. Début 2017 verrait déjà l’érection des magasins de stockage de riz ainsi que l’aménagement des aires de séchage. Des travaux d’aménagement hydro-agricole sont aussi prévus en vue de porter la production du riz à quelque 650 tonnes par mois, soit 13 000 sacs de riz de 50 kg.
Faible production
Selon les statistiques agricoles de production du riz publiées par le service national des statistiques agricoles (ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Élevage), la production locale du riz n’excède guère 400 tonnes par an. Alors que la production globale sur le continent est d’environ 30 millions de tonnes. Depuis trois ans, à la suite du dernier congrès africain du riz qui s’est tenu à Yaoundé, la capitale camerounaise, sous le thème : « La science rizicole pour la sécurité alimentaire à travers le renforcement de l’agriculture familiale et l’agro-industrie en Afrique », les importations de riz sur le continent sont en nette régression, plus de 10 millions de tonnes par an. Suite à ces résultats encourageants, les grands acteurs du secteur ont appelé la FAO à « stimuler les partenariats à l’échelon national, régional et mondial afin de contribuer au développement du secteur rizicole africain ». En RDC, l’Institut national pour l’étude et la recherche agronomique (INERA) déplore notamment le manque de subventions dans le secteur agricole. La relance de la Banque de crédit agricole (BCA) fait pourtant partie des 28 mesures urgentes du gouvernement décidées en janvier. Selon l’INERA, nombre d’opérateurs économiques se plaignent aussi du fait que des dizaines de tonnes du riz produites dans l’ex-Province Orientale ou encore dans le Grand Équateur pourrissent dans les greniers faute d’acheteurs et de voies de desserte pour leur évacuation vers les centres de consommation.