REGIDESO SA : palabre à l’africaine entre mandataires et agents

Il est de coutume dans les sociétés d’État qu’en début d’année, les mandataires et les agents tiennent des rencontres annuelles, du genre états-généraux. À la régie des eaux, l’exercice a eu plutôt l’air d’un palabre.

Jacques Mukalay, administrateur délégué général de la Regideso le 4/4/2012 à Kinshasa, lors de l’inauguration de l’usine de Ngaliema réhabilité par la coopération Japonaise. Radio Okapi/ Ph. John Bompengo

 

La tradition a été respectée. Début février, les mandataires de l’État à la REGIDESO SA et les délégués des syndicats se sont retrouvés pour la tenue des travaux des 1ère et 2ème rencontres annuelles mixtes à Kinshasa. Ces travaux ont porté sur l’évaluation des activités de l’entreprise au cours de l’exercice 2016. Concrètement, les participants se sont penchés sur le processus de la réforme en cours, l’exploitation, les ressources humaines, le commercial ainsi que sur la trésorerie. Le constat tiré de la situation de la REGIDESO SA est peu reluisant. La REGIDESO SA aurait dû atteindre un certain équilibre financier, début second semestre 2016, selon un vade-mecum du Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques (COPIREP) mis en marche en juillet 2011. Hélas, les experts ouest-africains (que les agents désignent comme « mercenaires ») d’ERANOVE/SDE commis aux commandes de l’entreprise n’ont guère apporté les recettes escomptées, alors que les perspectives de paiement des créances de la  REGIDESO SA sur l’État qui dépassent les 100 milliards de francs semblent bien s’éloigner.

Toutefois, le gouvernement et le groupement ERANOVE/SDE ont signé un second contrat de service pour une période allant du 11 octobre 2016 au 31 décembre 2018. Mais, cette fois, le bureau syndical tient à ce que des directeurs et autres cadres nationaux de l’entreprise soient considérés dans la gestion de la REGIDESO SA. Aux mêmes fonctions et postes, salaires et avantages égaux, exigent le banc syndical. Le directeur-général, Jacques Mukalayi Mwema a fait état de la nomination d’une équipe de huit cadres permanents désignés par le contractant, conformément aux dispositions du second contrat en vue de sa mise en œuvre. Par ailleurs, dans l’arrière-pays, il a été procédé à un remue-ménage. Par exemple, le directeur provincial de l’ex-Province orientale, Florent Sadala, a été envoyé au Kongo-Central, remplacé à ce poste par Ignace Ebaka muté du Kasaï oriental. Autre exigence, le bureau syndical veut en finir avec la sous-traitance. L’employeur doit revoir sa copie de janvier 2016 portant mise en place des agents et cadres de la REGIDESO SA. Mais rien n’est encore acquis.

Le sort est déjà scellé

Dans le secteur des finances, Mukalayi espère vivement le financement additionnel annoncé par la Banque mondiale, en vue de renforcer les capacités d’investissement de la REGIDESO SA. Cette société d’État a présentement besoin de 130 millions de dollars par an pour son investissement afin que ses activités soient proportionnelles à la croissance démographique de la RDC. Une mer à boire pour l’État… au risque d’assécher les finances publiques. On rappelle qu’à une certaine période, la Banque africaine de développement (BAD) avait pris soin de payer notamment les factures de consommation d’eau des institutions publiques. Depuis, les bailleurs de fonds n’y vont plus par le dos de la cuillère : il faut privatiser.

En tout état de cause, le sort de la REGIDESO SA était déjà scellé… depuis 2010, quand la stratégie de sa restructuration conçue par le COPIREP a été approuvée par  le gouvernement. Cette restructuration comprend deux phases essentielles, à savoir la stabilisation et le redressement sur une durée des 5 ans, ainsi que la restructuration en profondeur. La stratégie de la restructuration devrait se faire en trois étapes. D’abord, la  transformation de la REGIDESO SA en société de patrimoine, techniquement et financièrement viable, propriétaire et/ou concessionnaire des infrastructures de production et de distribution d’eau. Ensuite, la redéfinition des périmètres des centres d’exploitation de la société en fonction des critères de viabilité technique, économique et financière sans forcément suivre la logique de la décentralisation administration et politique du pays. Le gouvernement, précise un rapport du COPIREP, a approuvé cette option. Enfin, la cession de l’exploitation des activités de production et de distribution d’eau à des sociétés d’exploitation privées et/ou publiques à travers, selon le cas, des contrats d’affermage, des contrats de gestion ou toute autre forme de partenariat jugée utile, à conclure sur les périmètres des centres préalablement définis. Les sociétés d’exploitation pourraient aussi être des sociétés d’économie mixte.  La phase de restructuration, indique le COPIREP, se fera à long terme.