Lors de la cérémonie de présentation des vœux aux corps constitués et aux opérateurs économiques, le 19 janvier, le président de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), Albert Yuma Mulimbi, n’a pas usé de langue de bois. Après « cinq années de faux discours, de faux bilans macroéconomiques, de politiques fiscales aventureuses et de projets budgétivores, sans impact social », Yuma a appelé les autorités du pays à « un véritable sursaut afin de saisir l’opportunité de ce moment d’unité politique nationale pour s’unir autour d’un projet économique commun et de tracer les perspectives de son développement ». D’après lui, le développement économique de la République démocratique du Congo doit résolument être fondée sur « son développement local » et « cesser d’attendre son salut des cours mondiaux des matières premières ».
Ce développement économique passe en priorité par l’investissement agricole et industriel. La conjoncture mondiale n’offre, à court terme, aucune perspective réelle de reprise. En effet, selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, l’activité économique a enregistré un recul en 2016 comparé à 2015. La croissance mondiale se situerait à 3,1 % en 2016. Pour les pays avancés, la croissance ne serait que de 1,6 % l’année passée. En cause, la baisse des cours mondiaux des produits de base, la permanente dégradation des perspectives pour les pays avancés ainsi qu’un environnement politique mondial extrêmement volatile au Moyen-Orient, en Europe, voire entre les grandes puissances que sont les États-Unis, la Russie et la Chine.
Gestion macroéconomiques
Cependant, les prévisions pour 2017 en Afrique mettent en haut du tableau, avec des objectifs de croissance égaux ou supérieurs à 5 %, la Côte d’Ivoire, la Tanzanie, le Sénégal ou l’Ethiopie, qui ne sont pas des pays exportateurs de matières premières, mais plutôt les pays qui disposent d’un cadre de gestion macroéconomique plus solide et de réglementation plus favorable aux activités commerciales. Leurs exportations sont plus diversifiées et leurs institutions plus efficaces ».
Le président de la FEC a par ailleurs relevé d’autres contraintes récurrentes d’un environnement des affaires et des investissements peu attractifs auquel s’est ajouté de manière circonstancielle, l’inévitable attentisme lié à l’approche des échéances électorales. Dans cette situation difficile que faire pour qu’enfin on trouve la voie d’un développement économique équilibré ? La FEC a, à plusieurs reprises, mis l’accent sur l’impérieuse nécessité de consolider les acquis de cette stabilité à travers une politique de diversification économique afin de parvenir à terme à une croissance multipolaire à même de renforcer la résilience de l’économie nationales aux chocs exogènes ou externe, en réduisant particulièrement son exposition à la valorisation des cours des matières premières sur les marchés internationaux.
Le pays est importateur net de biens de consommation courante, alors qu’il dispose de grandes potentialités pour devenir une nation industrielle et peut-être un jour, une grande nation industrielle. À ce jour, les principales activités industrielles du pays sont limitées à un nombre réduit de filières de biens de consommation, notamment la production du sucre, des boissons, de la transformation des matières plastiques, des produits cosmétiques, de la panification… Les filières des biens d’équipements sont sous-exploiteés, elles tournent principalement autour de la production du ciment et de la construction métallique.
Mais cette industrie fait face à des contraintes qui l’empêchent d’amorcer son redécollage : la lourde fiscalité et la parafiscalité qu’elle supporte, atteignant 51 % du chiffre d’affaires, soit le double de ce qui est payé dans les pays voisins. Ainsi, l’augmentation du taux de droit d’accises sur plusieurs produits, justifiée par la seule maximisation des recettes. Conséquence : une activité génératrice de recettes fiscales, comme les industries brassicoles, a connue une baisse de plus de 20 %. La plupart d’entre elles se sont vues obligées de procéder à des changements structurels, d’autres ont procédé à la fermeture des usines de production avec notamment la fermeture des usines de Bralima à Mbandaka et à Boma en 2015 et 2016.
Climat favorable à l’investissement
La FEC en appelle à l’émergence d’un État fort doté d’une administration compétente, sur lequel le secteur privé devrait s’appuyer dans le cadre d’un partenariat durable, sincère et constructif.
Le climat des affaires ne peut s’améliorer que lorsqu’un débat fécond est entretenu durablement entre l’État et les acteurs privés, ce qui constitue la première condition et quand ce débat fécond est suivi d’effets concrets, ce qui en est la seconde. Les relations commerciales qui se font dans le cadre du commerce frontalier ou dans le cadre des zones de libre-échange pour l’instant ne sont pas accompagnées de mesures efficaces de sauvegarde de l’activité économique intérieure.
Les entrées massives et irrégulières des marchandises observées aux différents postes frontaliers sur tout le territoire national sont à la base de distorsions sur le marché de certains produits dont le ciment, le café, le cacao et les écorces de quinquina notamment. Il a dénoncé « le commerce par personnes interposée exercé par les autorités politiques, militaires et de l’administration publique qui contribue à alimenter des réseaux de contrebande. »
La FEC avait également constaté que des intervenants ambulants répertoriés dans aucune association patronale disposent des contrats-programme et sont autorisés à faire entrer du ciment au mépris des législations commerciales et de la réglementation de change en vigueur dans notre pays. Les exigences de mobilisation de financement pour les élections suscitent aussi quelques inquiétudes auprès des opérateurs économiques qui craignent une augmentation de la pression fiscale pour la réalisation des prévisions budgétaires de l’État.