S’agissant de COBIL, un expert du secteur pétrolier, le professeur José Bafala, ancien de la Société congolaise des industries de raffinage (SOCIR), de la Congolaise des hydrocarbures (COHYDRO) et également directeur de cabinet de l’ancien ministre des Hydrocarbures, Célestin Mbuyu, indique « qu’elle est placée sous une gestion non encore bien définie… ». À sa connaissance, la République démocratique du Congo reste le seul pays au monde avec « deux entreprises nationales et concurrentes en plus ». Dans son dernier livre sur l’industrie pétrolière en RDC, José Bafala parle, en effet, des intérêts « occultes croisés » qui s’enchevêtrent ou se neutralisent, s’il le faut.
Un projet de Yolo Yeli
Il y a deux ans, l’État, en fait le ministère du Portefeuille, sous Louise Munga, a ficelé de bric et de broc un partenariat entre la SCTP, ex-ONATRA et COBIL pour la construction d’un appontement d’une capacité de stockage de 25 000 m3 et un quai pétrolier à Ango-Ango, à quelques encablures de Matadi-ville, dans le Kongo-Central. Un projet similaire avait déjà été mûri à la COHYDRO du temps de l’ADG Yolo Yeli qui a fini par s’exiler en Grande-Bretagne dans des conditions troubles. Lors de la signature du contrat SCTP-COBIL en février 2015, la ministre du Portefeuille de l’époque a eu ces mots : « La construction de ce quai devra contribuer à améliorer le système d’approvisionnement existant et sera complémentaire pour appuyer le travail réalisé par SEP Congo ».
En réalité, font comprendre les experts, l’État a laissé s’installer une concurrence frontale, sans aucune réglementation au préalable,.Si la composition de l’actionnariat de SEP-Congo relève de l’info publique (l’ex-COHYDRO y détient 36,6 %, ARISTEA 36,6 %, ENGEN 13,0 %, COBIL 7,6 %, SCP 6 %), à ce jour, l’on sait seulement que COBIL a pour actionnaire l’État congolais et un groupe des privés. Lesquels ? Toutes les assurances obtenues par Business & Finances du n° +243817150088 (standard de COBIL) pour le contact direct avec le service commercial de la société ne se sont guère transformées en acte, près de trois semaines après. COBIL occupe, selon une source au ministère des Hydrocarbures, plus de 10 % du marché de la distribution des produits pétroliers terrestres et d’aviation, surclassant de loin la compagnie nationale, l’ex-COHYDRO à peine 1 %. Le gros lot revenant naturellement aux majors dont Total et Engen. COHYDRO est également dans la distribution des lubrifiants et d’autres produits spéciaux.
La fourniture du carburant et des lubrifiants à la société de transport public routier TRANSCO constitue l’un de ses plus gros marchés. Ses factures prises en charge directement par le gouvernement sont pratiquement passées du simple au double entre 2014 et 2015, de près de 7 millions à environ 13 millions de dollars. Dans le dernier rapport de TRANSCO portant sur l’exercice clos de 2015, force est de constater que COBIL ne donne pas le volume d’huile fournie à TRANSCO mais uniquement les montants à payer. Par exemple 27 828 656 Fc repris sur la facture n°15-003733 ou encore 36 635 800 Fc sur la facture 15-003480.
COBIL est, en effet, né des cendres de MOBIL, une compagnie privée américaine venue s’installer en 1955 en RDC alors Congo Belge. Conséquence de la zaïrianisation décidée par le Conseil exécutif – l’équivalent du gouvernement central – en 1973, les actifs de la société ont été, en effet, repris par l’entreprise publique dénommée PETRO ZAÏRE, future COHYDRO, actuellement SONAHYDROC. Mais le régime de Mobutu rétropédale, près de 4 ans après. L’État décide de la rétrocession des actifs de MOBIL en 1977. Une nouvelle entreprise en verra le jour avec un tout autre statut : Zaïre Mobil Oil, l’État y participe comme actionnaire minoritaire. Le 1er septembre 2003, la société pétrolière change de dénomination pour s’appeler Cobil Sarl.