Bruno Tshibala a pris l’engagement, dans son discours d’investiture, de stabiliser la situation économique. D’après lui, c’est la chute libre du taux de croissance qui est à la base de la dégradation de la situation économique dans le pays. Pour ça, le gouvernement qu’il dirige va entreprendre des réformes et mener des actions pour « le maintien de la discipline budgétaire actuelle » qui a permis jusque-là d’éviter le déficit de trésorerie. Ce déficit est, selon lui, source de financement monétaire, et surtout facteur accélérant la dépréciation monétaire et l’inflation. Il a aussi promis de poursuivre la politique d’ajustement budgétaire mené depuis janvier, de consacrer la grande part des dépenses publiques aux élections, rémunérations, au paiement du service de la dette extérieure, sans oublier les dépenses qui concourent à l’amélioration des conditions de vie générales de la population.
Les analystes économiques ne sont pas impressionnés par ces déclarations. « C’est du déjà entendu ». Comme un chat échaudé craint même l’eau la plus froide, le citoyen lambda doute de la concrétisation de cette intention politique exprimée. C’est dire que le premier budget de Tshibala va ressembler à un casse-tête chinois. Ce budget aura-t-il de chance d’être exécuté en l’état compte tenu des contingences ?
Le projet de budget laissé par Augustin Matata prévoyait une baisse des ressources. Au vu de la situation, le budget 2017 ne devra être qu’une copie drastique. En d’autres termes, font remarquer des analystes économiques, il sera à l’épreuve des règles budgétaires et de la viabilité financière. Ces spécialistes définissent une règle budgétaire comme « une contrainte légale (permanente ou temporaire) imposée à la politique budgétaire pour empêcher un déséquilibre permanent entre les recettes et les dépenses du gouvernement. » Alors, les règles budgétaires visent à éviter un déséquilibre structurel des finances de l’État, ce qui limite la nature pro-cyclique des politiques publiques et empêche une croissance insoutenable de la dette publique.
Les principes de base
Les analystes économiques sont à peu près d’accord sur la nature des règles qu’ils classifient en quatre catégories. Premièrement, les règles sur les dépenses. Elles imposent une limite stricte et permanente sur les dépenses publiques totales, les dépenses primaires, ou les dépenses de fonctionnement, soit en termes absolus, soit en termes de taux de croissance, soit en termes de pourcentage du Produit intérieur brut (PIB). Selon des experts de la Banque mondiale, ces règles ne sont pas directement liées à un objectif de stabilité des finances publiques du gouvernement, car elles ne tiennent pas compte de l’évolution des revenus de l’État.
Toutefois, elles peuvent contribuer à cet objectif dans la mesure où elles sont complétées par des objectifs de soutenabilité des déficits budgétaires et de la dette publique quand un déséquilibre budgétaire risque de résulter d’une augmentation incontrôlée des dépenses plutôt que d’une baisse des recettes.
D’autre part, dans un pays en développement exposé à de grandes variations des prix des produits de base, elles aident les autorités à éviter la pro-cyclicité des dépenses publiques. Cependant, cet avantage peut aussi devenir une contrainte pendant la récession économique, étant donné que dans cette circonstance, les règles de dépenses limitent la capacité du gouvernement à mettre en œuvre une politique contra-cyclique. Certaines dépenses qui sont très sensibles au cycle économique, telle que l’assurance chômage, peuvent être exclues de la règle.
Deuxièmement, les règles sur les recettes. Elles imposent des plafonds ou des planchers sur les recettes publiques et visent à augmenter les recettes fiscales et/ou éviter une pression fiscale excessive. Ces règles ne tiennent pas compte de l’évolution des dépenses publiques et, par conséquent, n’ont pas nécessairement un impact direct sur la stabilité des finances publiques. Dans certains cas, expliquent des experts, les règles de recettes publiques ont été introduites pour protéger certaines dépenses prioritaires en affectant certaines taxes à des secteurs spécifiques.
Difficiles à mettre en œuvre
Exprimées en termes absolus, ces règles peuvent être difficiles à mettre en œuvre car les revenus fluctuent de manière significative avec le cycle économique. Cependant, dans un pays en développement, elles peuvent être particulièrement utiles pour gérer les recettes exceptionnelles associées à l’évolution des prix des matières premières, notamment lorsqu’elles imposent qu’une partie des recettes du gouvernement soit épargnée ou affectée à un fonds de stabilisation.
Troisièmement, les règles sur l’équilibre budgétaire. En général, soulignent les mêmes experts, ces règles précisent un équilibre du solde budgétaire global, du solde primaire et du solde structurel ajusté au cycle économique, afin de veiller à ce que le ratio de la dette publique au PIB converge vers une valeur stationnaire. Ces règles comprennent également la « règle d’or » qui se réfère au solde budgétaire net des dépenses d’investissement. Toutefois, la règle de l’équilibre budgétaire n’est pas directement liée à la question de la viabilité de la dette ni à l’augmentation de l’assiette fiscale et des revenus futurs.
Quatrièmement, les règles sur la dette. En général, elles prennent la forme d’une limite explicite sur le ratio de la dette publique au PIB. Par définition, ce sont les règles les plus efficaces pour garantir que ce ratio ne dépasse pas une valeur