Les ONG internationales et le panel des Nations Unies l’ont écrit et récrit, non sans preuves irréfragables. La quarantaine de groupuscules armés connus sous le label Maï-Maï qui sèment l’insécurité dans l’Est de la République démocratique du Congo survivent du troc des minerais contre armes et munitions. Ils les obtiennent des pays voisins, mais pas que… En Afrique, s’affirme une production locale qui pourrait avoir avec le temps des développements inquiétants. Parmi les pays africains producteurs d’armes, on trouve l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Nigéria, la Namibie, l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie, auxquels s’ajoute l’Egypte.
çYoweri Museveni
Dans la région instable des Grands lacs, l’Ouganda dispose lui aussi d’une petite industrie de guerre. Le pays de Museveni dispose d’au moins trois usines de fabrication des armes. La plus grande, Nakasongola Arms Factory, est une joint-venture constituée par le gouvernement de Pékin et des techniciens et entrepreneurs d’origine chinoise, nord-coréenne et sud-africaine. Cette usine se trouve dans la région de Gulu, naguère fief des rebelles de la Lord’s Resistance Liberation Army (LRA). Défaits, ces derniers se sont retranchés dans l’Est de la RDC, en Centrafrique et au Soudan du Sud. L’usine de Nakasongola produit des armes légères et des mines.
Selon des experts, l’Est de la RDC est un des débouchés des armes et munitions made in Ouganda. Ce pays ravitaillerait également le régime autoritaire de Burundi. Autre usine, le Saracen, qui équipe particulièrement l’armée ougandaise, et dont le propriétaire est la Strategic Resources Corporation, nom derrière lequel se cache la célèbre Executive Outcomes (EO), la Compagnie militaire privée sud-africaine (PMC), qui a cessé officiellement ses activités à la fin de 1999, mais que l’on suspecte de devoir agir derrière des noms plus discrets. Il y a enfin Ottoman engineering LTD, spécialisée dans les armes légères.
Le Kenya est également monté en puissance dans la région grâce aux États-Unis, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme djihadiste. Le Kenya Ordnance Factories Corporation produit des munitions pour revolvers et fusils d’assaut (20 000 à 60 000 par jour). L’usine a été construite avec le concours de la FN belge et a été inaugurée en 2000. Le gouvernement du Kenya déclare que sa production est destinée seulement aux forces armées locales, et qu’elle n’a pas l’intention de concéder des licences d’exportation. La Tanzanie, elle, développe son industrie plutôt en coulisse, un peu comme Israël. Les récentes opérations de l’armée tanzanienne notamment dans l’Est de la RDC contre les M23 ou encore aux Comores ont été l’occasion pour ce pays d’étaler son savoir-faire dans l’armement.
Zimbabwe Defence Industries
Le Zimbabwe a hérité de son précédent régime, lui aussi, une industrie de guerre embryonnaire (quand le pays s’appelait encore Rhodésie). Partant de cette base en 1984, on a fondé la Zimbabwe Defence Industries (ZDI). Cette usine produit des armes légères, des munitions et des mines. Le Know how pour la production des explosifs et des mortiers a été fourni par la France, et la Chine a construit une fabrique de munitions pour des armes d’infanterie. Parmi les clients de la ZDI, il y a l’Angola le Soudan du Sud et la RDC.
La ZDI produit des armes légères (en particulier des copies de la mitraillette israélienne UZI et de la mitraillette tchèque CZ25), et surtout des munitions (9 mm à 20 mm), des projectiles de mortiers (60, 81 et 120 mm), des grenades anti-personnel et anti-chars. Parmi les clients officiels du Zimbabwe, il y a l’Afrique du Sud, le Malawi, le Botswana, la Tanzanie et la Zambie.
Plus de 700 usines en RSA
Le plus grand producteur est l’Afrique du Sud, qui a hérité, du régime de l’apartheid, une industrie perfectionnée et diversifiée. Actuellement, en Afrique du Sud, il y a au moins 700 usines qui travaillent dans le secteur militaire et emploient 22 500 personnes. La plus grande partie est constituée des petites et moyennes industries, et le colosse national est Denel, qui contrôle les usines les plus significatives. Pour ce qui concerne les armes légères, les plus grands producteurs sont Vektor (revolvers, fusils d’assaut, mitrailleuses, mortiers, canons automatiques de 20 mm)…
D’après les données officielles, le pays exporte des armes dans 61 pays, même si les régions privilégiées sont le Moyen-Orient et l’Afrique. Les clients les plus importants sont l’Algérie, l’Inde, la République populaire de Chine, les Émirats arabes unis, Taïwan, Singapour, Thaïlande, Cameroun, Chili, Colombie, Koweït, Oman, Pérou, Swaziland, Congo-Brazzaville, Botswana, Ouganda, Rwanda, Tunisie, Côte-d’Ivoire, Kenya, Zambie, Mozambique et Mexique. Le seul producteur d’armes de l’Afrique occidentale est le Nigéria. La Defence Industries Corporation (DICON) a été créée en 1964 par une loi spéciale, le Defence Industries Corporation of Nigeria Act. Cette industrie a eu un rôle important durant la guerre de sécession du Biafra (1968-1970). Confiée à des entrepreneurs étrangers, l’usine fut déclarée en faillite en 1972, et son directeur général, un allemand, fut expulsé du pays. La société a continué à fonctionner avec des hauts et des bas pendant trente ans environ, sous le régime des militaires. À la fin des années 1990, le nouveau gouvernement civil décida de relancer la production militaire. L’usine nigériane emploie actuellement 700 personnes environ dans l’établissement de Kaduna où sont produites des armes légères et des munitions; l’usine de Bauchi produit des véhicules blindés légers. Officiellement, les armes produites sont destinées seulement aux besoins des forces armées et de la police du Nigéria.
En Afrique du Nord, le principal producteur d’armements est l’Egypte. Ce pays exporte aussi en Afrique sub-saharienne. En 1992, deux ans avant le génocide rwandais de 1994, on signa un contrat d’achat d’armes égyptiennes en faveur de l’armée rwandaise. Le contrat, garanti financièrement par une banque française, comprenait des mortiers de 60 et 82 mm, 16 000 projectiles de mortiers, des obus de 122 mm, avec 3 000 coups, des lance-roquettes, des explosifs au plastic, des mines anti-personnel et 3 millions de projectiles de petit calibre.
Parmi les producteurs égyptiens d’armes légères, il y a Abu Kir Engineering Industries / Factory 10 (munitions de petit calibre), Al-Ma’asara Company for Engineering Industries (MF 45) (munitions de petit et de gros calibre), Arab International Optronic (AIO) S.A.E (systèmes de pointage); Helwan Machine Tools Company/Factory 999 (mortiers); Kaha Company for Chemical Industries (grenades de fusils, grenades à mains), Maadi Company for Engineering Industries (revolvers, fusils, mitrailleuses légères et lourdes, lance-grenades), Sakr Factory for Developed Industries (roquettes anti-char), Shoubra Company for Engineering Industries (MF 27) (munitions).