Selon un récent rapport des Nations Unies, chaque année, plus de 8 millions de tonnes de plastique terminent leur périple dans les océans, générant près de 8 milliards de dollars en dommages aux écosystèmes marins. Un lobbying pro-environnement monte en puissance à travers le monde. Dans l’Union européenne, depuis le 1er janvier 2017, l’usage des sacs en plastique à usage unique fait l’objet de strictes restrictions même lorsqu’il s’agit d’emballer les fruits, les légumes ou les fromages. Mais en France, ce n’est qu’en juillet dernier, en application de la loi sur la transition énergétique, les sacs en plastique à usage unique ont été interdits aux caisses des magasins. Depuis lors, en France, les sacs en plastique d’épaisseur inférieure à 50 micromètres, sans considération de volume, sont également interdits. En échange, les consommateurs doivent se voir proposer des sacs en plastique réutilisables (plus de 50 micromètres) ou des sacs en papier.
Plastique fait tendance à Kin
Appliquer de telles restrictions en République démocratique du Congo correspondrait à un suicide collectif. À Kinshasa, particulièrement, tout ou presque est en plastique : chaise, table, verre, armoire, évier, etc. Et le plastique s’est introduit dans tous les domaines, de l’agro-alimentaire au secteur de bâtiment et travaux publics (BTP) qui connaît par ailleurs un boom continu ces quinze dernières années. Des tuyaux PVC de toute dimension, des gouttières, des plexi-glass, se vendent aussi bien que le ciment ou la caillasse. Beaucoup de magasins, de commerces unipersonnels de vente des articles et d’ouvrage en plastique ont champignonné dans toute la capitale. Et l’État trouve aussi son compte. Les articles et les ouvrages en plastique ont rapporté plus de 560 millions de francs au Trésor public à titre de droits d’accises relevant du régime intérieur en 2015, et plus de 530 millions de FC contre des prévisions d’un peu plus de 640 millions de francs, soit un taux de réalisation de 82 %.
Au premier trimestre de 2017, le taux de réalisation était de 85 %, soit plus de 135 millions de francs sur 160 millions attendus. Les assignations de la Direction générale des douanes et accises (DGDA) pour les articles et les ouvrages en matières plastiques en régime intérieur dans le budget général 2017 sont de 643 millions de francs. Les prévisions sont de près de 920 millions de francs pour les droits d’accises des articles et ouvrages importés. On le sait, importateurs chinois, libanais et indopakistanais se disputent le marché des plastiques non seulement à Kinshasa mais aussi dans de grandes agglomérations de l’arrière-pays. Lufu, ce port sec à la frontière angolaise n’est pas du reste.
Même l’État y trouve son compte
Les droits d’accises perçues à l’importation sur les articles et ouvrages en matières plastiques sont en constante augmentation. Ils étaient à plus de 800 millions de francs en 2015 et, rien que pour le premier trimestre de 2017, la DGDA a déjà perçu pour le compte du Trésor plus de 404 millions de francs, soit un taux de perception de plus de 300 % par rapport aux assignations de moins de 125 millions de FC. Mais il demeure que l’usage le plus courant et, par ricochet le plus abusif du plastique en RDC, se trouve dans les industries des produits cosmétiques ainsi que celles des eaux, limonades et jus. Bien qu’une unité de recyclage ait vu le jour au quartier industriel de Limete, à Kinshasa, des bouteilles en plastiques jonchent les rues de la capitale et débordent dans des cours d’eau au point de former des passerelles.
Les organisations non gouvernementales du secteur de l’environnement déplorent l’absence d’une réelle politique de l’État face au phénomène « bouteilles en plastique dans les rivières ». Il est aussi vrai que la question des déchets plastiques s’avère un enjeu environnemental mondial. Une campagne de l’ONU rappelle récemment qu’ils constituent près de 80 % des déchets présents au fond des océans. Naturellement, toute ONG qui s’intéresse à la question a beaucoup de chance de recevoir un financement consistant des partenaires extérieurs. L’État congolais a prévu quelque 128 milliards de francs, moins de 100 millions de dollars, pour la protection de l’environnement en 2017. Cette somme n’est qu’une goutte d’eau dans un océan des bouteilles en plastique destructrices de l’environnement. Pour les environnementalistes, l’État doit appliquer un régime fiscal on ne peut plus rigoureux contre les industries de fabrication des eaux de table, des limonades, des jus ainsi que des lotions et des laits de beauté. Ces secteurs sont ; on le sait, dominés par des Indopakistanais.