La balle n’est pas dans le camp des démocraties raisonnables et il y a davantage de raisons de s’en inquiéter chaque jour qui passe. Quand on regarde la sphère politique et les grands sujets économiques du moment, on ne voit que raideurs et coups de menton, et bien peu d’indications que le calme va revenir.
A priori, rien de nouveau : 30 ans de guerre froide puis de « détente » entre l’URSS et les USA, 20 ans de chocs pétroliers puis de dérégulation à tout-va, 10 ans de crise financière après 2008, nous ont montré que les périodes de tensions et les accès de fièvre sont presque la normalité de la vie internationale. Ce qui est nouveau est que la planète semble entrer dans une phase compulsive partout, et plus générale.
Myopie européenne
Le paysage politique est le plus simple à lire. Trois grandes puissances fonctionnent désormais sur un mode de pouvoir ultra-personnel. Samedi dernier, en Chine, Xi Jinping obtient un mandat peut-être jusqu’en 2032. Mardi, Donald Trump licencie par un simple tweet son secrétaire d’Etat. Dimanche, Vladimir Poutine sera réélu patron de la Russie, son poste de facto depuis… 18 ans.
En face, nos démocraties européennes – si l’on excepte la France- sont concentrées sur des horizons plus proches et risquent la myopie sur l’essentiel : Londres s’agite sur le Brexit, Berlin s’est offert six mois d’absence et le feuilleton romain a un air d’éternel déjà-vu. Du côté économique, les choses sont plus compliquées à décrypter mais guère plus rassurantes. Il est difficile de savoir si le protectionnisme progresse surtout symboliquement ou effectivement et si la mondialisation reculera – peu probable, plus impossible. Mais les tensions Etats-Unis-Chine (lave-vaisselle, visas, propriété intellectuelle), Etats-Unis-Europe (acier, aluminium) et Chine-Europe (dumping, prises de contrôle), si elles ne dépriment aujourd’hui pas le monde entier, c’est pour une seule raison : la croissance est là ; quand la reprise rapetissera à un moment ou à un autre comme c’est logique, ce sera une autre histoire.
Où sont les risques
Les années à venir mettront donc à rude épreuve les nerfs des peuples et des dirigeants sur les questions économiques et géopolitiques (Iran, Syrie, Lybie…). Quelles sont les ambitions réelles de la Chine ? Si Donald Trump flatte la partie déclassée de l’opinion et obtient des résultats – ce qui est probable -, n’est-on pas à la merci d’un « accident » ?
La logique voudrait que les vraies démocraties se serrent les coudes. Ce ne sera pas le cas, chacune veillant surtout à ne pas grossir les rangs des extrêmes chez elle. Alors ? « Le nationalisme, c’est la guerre », répètent en boucle les Européens qui ne savent pas comment agir dans ce nouvel environnement chaotique. Exact.