José Makila Sumanda parle des exigences de modernité et de la mise aux normes conséquentes des infrastructures aéroportuaires de Kinshasa à N’Djili. À ses yeux, cela revêt aujourd’hui un « caractère prioritaire et urgent » pour le gouvernement. L’aéroport de N’Djili pourra notamment répondre aux problèmes de flux annuel de 3 millions de passagers et constituer un hub international en Afrique ; fournir la garantie de sécurité et de service de haute qualité afin de répondre aux normes de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), en atteignant la norme de service de classe C, et fournir un espace approprié aux nouvelles exigences de modernité.
Le vice-1ER Ministre, ministre des Transports et des Voies de communication rappelle qu’un contrat a été signé, en date du 16 septembre 2013, entre la Régie des voies aériennes (RVA) et Weihai International Economic and Technical Cooperative (WIETC), pour la construction et l’équipement d’une nouvelle aérogare de l’aéroport international de N’Djili. Le projet comprend, outre la construction d’une nouvelle aérogare de 40 617m2, la construction des tarmacs de 74 517 m2, le prolongement du taxiway parallèle et des bretelles de 68 891m2, la construction d’un parking véhicule de 1 200 places, ainsi qu’une fontaine et les travaux de déviation du boulevard Lumumba sur 5 km.
Selon José Makila, le projet est cofinancé par Exim Bank of China et l’État congolais, signalant que le marché a été régulièrement attribué à WIETC pour un montant de 364,9 millions de dollars pour un délai contractuel de 36 mois à dater du premier paiement. Le gouvernement est prêt avec les 40 % de sa part, a-t-il fait savoir. Information que nos sources au ministère du Budget n’ont guère confirmée. Selon des agents de la RVA, l’aérogare actuelle, inaugurée par le chef de l’État, Joseph Kabila Kabange, le 25 juin 2015, devra être opérationnelle pour une période de 10 ans, avant d’être démontée pour, probablement, l’aéroport de Luano, à Lubumbashi. Et d’après le Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques (COPIREP), la construction de l’aérogare dite définitive, avec une capacité de 4 millions de passagers, devra coûter 600 millions de dollars.
Le contrat portant sur l’étude de faisabilité de l’aérogare « définitive » a déjà été confié, en février 2013, au groupement français ADPI-SYSTRA, alors même que l’aérogare provisoire ou encore modulaire était encore en cours de construction. L’idée d’un projet de type BOT, [Build (construire), Operate (gérer), Transfer (rétrocéder à l’État)] avait d’ailleurs été mûrie. Il nous revient que la même procédure aurait été appliquée pour la construction de l’aérogare actuelle. Pourtant au ministère des Transports, tout comme à la RVA, l’on parle d’un recours à des capitaux privés pour la construction de l’aérogare, exception faite pour la Banque africaine de développement (BAD).
Toutefois, la RVA affirme avoir apporté quelque chose sur deux dizaines de millions de dollars qui ont permis la construction de l’aérogare. Laquelle, par ailleurs, n’est pas gérée directement par la RVA mais par un comité des superviseurs mis en place depuis le 7 juillet 2015 par le ministère des Transports et des Voies de communication.
Il s’agit notamment de Kabeya Tshikuku, alors conseiller principal en charge du collège Nouvelles technologies de l’information et de la communication à la primature (sous Matata Ponyo), nommé comme superviseur et secondé par un superviseur adjoint, Kitenge Kasongo, et un superviseur technique, Vincent Futa.
Certains observateurs ont noté, lors de la cérémonie inaugurale, le 25 juin 2015, des contradictions dans les discours de l’alors ministre des Transports et des Voies de communication, Justin Kalumba ; et du directeur général de la RVA, Abdallah Bilenge. Cela présageait d’une certaine nébulosité sur la gestion de l’aérogare modulaire : « Infrastructure provisoire… à titre transitoire » pour Abdallah Bilenge, « deuxième aérogare » pour Justin Kalumba, alors que le montage financier de la troisième a déjà été bouclé, avait-il indiqué. Rappelons que le gouvernement avait, en fait, repris, en 2012, la gestion du projet de construction de l’aérogare modulaire à la RVA.
Pour l’État, il fallait à court terme offrir autant aux compagnies aériennes qu’aux passagers des meilleures conditions de sécurité imposées par l’OACI et redorer, par ricochet, l’image de marque du pays. C’est pourquoi le gouvernement avait repris ce projet qui aurait dû être matérialisé avant le XIVè sommet de la Francophonie, organisé en octobre 2012 à Kinshasa. Montant initial des travaux : 14,274 millions d’euros. Il sera revu à la hausse, à 16.8 millions d’euros à la suite de nouvelles orientations apportées au projet. L’entreprise française Alpha Airport sera, pour ce faire, sélectionnée, en mai 2012, à la suite d’un appel d’offre international restreint. Pourtant, cinq entreprises spécialisées avaient déjà été approchées par une commission instituée au sein de la RVA… grâce au COPIREP.
À la demande du gouvernement, le COPIREP a dû, en effet, lancer, en 2011, le dossier du projet relatif à l’aérogare passagers de l’aéroport de N’Djili. Cinq firmes présélectionnées s’étaient intéressées au dossier, à savoir SNC Lavalin, le groupement BMCE Capital-Orascom-Elmsewedy-Target-Pygma, Bouygues Bâtiments International, Goldharvest Investments-Mohammed Abdulmohsin Al Kharafi & Sons Company Mask Group-Alzuhair, ainsi qu’Arts & Associés-China Communication Construction Company (CCCC). Sur cette liste reprise par le COPIREP dans son rapport annuel 2011, il n’y a donc pas Alpha Airport. Et le COPIREP dit même avoir initié des missions de consultation auprès de chaque firme pré-qualifiée à Yaoundé, Johannesburg, Paris et à Kinshasa… non pas dans les installations de la RVA.