Dans l’entendement du constituant de 2006, la décentralisation était sans nul doute la plus importante des réformes dont dépendent l’émergence économique du pays et le développement local. Un développement retardé par un système fortement centralisé durant des décennies, suivies des années de guerre. C’est pourquoi, des règles ont été fixées dans la constitution et des lois subséquentes ont consacré non seulement le transfert de compétences mais aussi la matière financière, dans le but d’une part, de consolider l’unité nationale mise à mal par des guerres successives et, d’autre part, de créer des centres d’impulsion et de développement à la base.
En sus de ces compétences, les provinces en exercent d’autres concurremment avec le pouvoir central et se partagent les recettes nationales avec ce dernier respectivement à raison de 40 et de 60 %. Selon l’article 199 de la constitution, deux ou plusieurs provinces peuvent, d’un commun accord, créer un cadre d’harmonisation et de coordination de leurs politiques respectives et gérer en commun certains services dont les attributions portent sur les matières relevant de leurs compétences. Les matières sont, soit de la compétence exclusive du pouvoir central, soit de la compétence concurrente du pouvoir central et des provinces, soit de la compétence exclusive des provinces (article 201).
Une vingtaine de matières relève de la compétence exclusive des provinces (article 204). Il s’agit entre autres du plan d’aménagement de la province, la coopération interprovinciale, la Fonction publique provinciale et locale, l’état-civil. Il s’agit également des finances publiques provinciales, de la dette publique provinciale, des emprunts intérieurs pour les besoins des provinces, de la délivrance et de la conservation des titres immobiliers dans le respect de la législation nationale.
Il s’agit aussi de l’organisation du petit commerce frontalier, de l’organisation et du fonctionnement des services publics, des établissements et entreprises publics provinciaux dans le respect de la législation nationale ; les travaux et marchés publics d’intérêt provincial et local ; de l’acquisition des biens pour les besoins de la province, de l’enseignement (maternel, primaire, secondaire, professionnel et spécial) ainsi que l’alphabétisation, conformément aux normes établies par le pouvoir central. Il s’agit par ailleurs de l’établissement des peines d’amende ou de prison pour assurer le respect des édits en conformité avec la législation nationale, des communications intérieures des provinces, des impôts, des taxes et des droits provinciaux et locaux, notamment l’impôt foncier, l’impôt sur les revenus locatifs et l’impôt sur les véhicules automoteurs ; de la fixation des salaires minima provinciaux, conformément à la législation nationale, de l’affectation du personnel médical, conformément au statut des agents de carrière des services publics de l’État, de l’élaboration des programmes d’assainissement et de campagne de lutte contre les maladies endémo-épidémiques conformément au plan national : l’organisation des services d’hygiène et de prophylaxie provinciale, l’application et le contrôle de la législation médicale et pharmaceutique nationale ainsi que l’organisation des services de la médecine curative, des services philanthropiques et missionnaires, des laboratoires médicaux et des services pharmaceutiques, l’organisation et la promotion des soins de santé primaires.
Il s’agit enfin de l’élaboration des programmes miniers, minéralogiques, industriels, énergétiques d’intérêt provincial et leur exécution conformément aux normes générales du planning national ; de l’élaboration des programmes agricoles et forestiers et leur exécution conformément aux normes du planning national, de l’affectation du personnel agricole, des cadres conformément aux dispositions du statut des agents de carrière des services publics de l’État, de l’application de la législation nationale concernant l’agriculture, la forêt, la chasse et la pêche ainsi que l’environnement, la conservation de la nature et la capture des animaux sauvages, l’organisation et le contrôle des campagnes agricoles, la fixation des prix des produits agricoles ; de l’affectation en province du personnel vétérinaire, conformément au statut des agents de carrière des services publics de l’État; de l’organisation de la promotion de santé de base, du tourisme, de l’habitat urbain et rural, de la voirie et des équipements collectifs provinciaux et locaux ; de l’exploitation des sources d’énergie non nucléaire et la production de l’eau pour les besoins de la province ; l’exécution des mesures du droit de résidence et d’établissement des étrangers, conformément à la loi ; l’exécution du droit coutumier ; la planification provinciale…
La loi de programmation
Selon l’article 11 de la loi sur la programmation des nouvelles provinces, dès l’installation des nouvelles provinces, le gouvernement devait initier, en concertation avec les autorités provinciales, un programme d’équipement, de réhabilitation et de construction des infrastructures nécessaires au fonctionnement de nouvelles provinces. En principe, il est prévu, sur une période de cinq ans, un budget pluriannuel d’investissement destiné au financement des travaux prioritaires des nouvelles provinces. Et, annuellement, l’on devra procéder à une évaluation des travaux réalisés dans le cadre de ce programme. Le rapport d’évaluation de ces travaux est à présenter, à chaque session budgétaire, à l’Assemblée nationale et au Sénat. Il va sans dire que le respect stricto sensu de cette disposition est un vœu pieux.
Par ailleurs, la non rétrocession des 40 % des recettes nationales aux provinces (à peine 6 à 9 %), les a privées des moyens conséquents pour réaliser les travaux de reconstruction. Les provinces déplorent la « mauvaise répartition » des ressources financières entre le pouvoir central et elles. C’est en fonction des recettes réalisées que l’on calcule la part allouée à la rétrocession de chacune des provinces existantes. Il faudra des programmes de développement économique et industriel efficaces pour permettre à chaque province et à chaque ETD d’émerger. Pour des experts, cela passe par des unités de transformation.
L’expérience même montre que les États, même ceux de petite taille, qui ont pu se développer et offrir une qualité de vie meilleure et un bien-être à leurs se développer et offrir un bien-être à leurs populations, sont les pays fortement décentralisés, non seulement par rapport au transfert de compétences et de pouvoirs mais aussi dans le domaine de la décentralisation fiscale. Évidemment, l’arsenal juridique à lui tout seul ne suffit pas, il faut une dose optimale de bonne gouvernance, qui suppose le fonctionnement régulier et optimal des institutions provinciales et locales, la légitimité et la légalité de celles-ci et de leurs animateurs, l’exercice d’un leadership exemplaire, l’expression dans la pratique de la vision et des valeurs, la lutte contre l’impunité, la corruption… L’amélioration de la gouvernance demeure un défi majeur pour le pays. C’est un ancien 1ER Ministre qui l’a dit. Faute de volonté politique clairement affirmée pour le changement, la révolution mentale que requiert la situation restera un leurre.