LE RAPPORT annuel de l’Agence américaine d’observation de l’océan et de l’atmosphère confirme la surchauffe planétaire. Pour elle, les années se suivent et les records s’enchaînent, sans que rien ne semble pouvoir enrayer l’emballement climatique. À l’échelle planétaire, l’année 2017 a été l’une des trois années les plus chaudes de l’histoire moderne, se classant, selon les données utilisées, à la deuxième ou à la troisième place sur un podium où figuraient déjà, dans l’ordre, 2016 et 2015.
C’est ce qu’indique le rapport sur l’état du climat en 2017, publié mercredi le 1er août par la National Oceanic and Atmospheric Administration, l’agence fédérale américaine chargée de l’observation des océans et de l’atmosphère. Une synthèse annuelle établie en collaboration avec l’American Meteorological Society et à laquelle ont contribué plus de 450 scientifiques de soixante pays qui ont compilé plusieurs dizaines de milliers de mesures.
La surchauffe planétaire est d’autant plus notable que, cette fois, elle ne doit rien au phénomène El Niño, ce cycle naturel de réchauffement des eaux du Pacifique qui, tous les trois à sept ans, tire les températures vers le haut et dont l’influence s’était fait fortement ressentir en 2015 et 2016. Les douze mois de 2017 se hissent donc au rang d’année sans El Niño la plus torride depuis le début des relevés, à la fin du XIXe siècle. « Le rapport établit que les principaux indicateurs continuent de montrer des tendances confirmant un réchauffement planétaire », soulignent les chercheurs.
État des lieux
Revue de détail d’une planète en ébullition. Gaz à effet de serre : la concentration dans l’atmosphère de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote…) a atteint un nouveau pic en 2017. Elle s’est élevée à 405 parties par million (ppm) pour le CO2, soit 2,2 ppm de plus qu’en 2016. L’étude des gaz emprisonnés et conservés dans les carottes glaciaires montre que cette concentration est sans précédent depuis… 800 000 ans. Il faut s’attendre à une accentuation du réchauffement dans les années à venir, dans la mesure où, après trois années de stagnation, les émissions mondiales de CO2 sont reparties à la hausse en 2017, en progressant de 2 %.
Températures terrestres : globalement, les températures à la surface de la Terre ont excédé de 0,38 °C à 0,48 °C la moyenne de la période 1981-2010. Les quatre dernières années (2014-2017) sont ainsi les plus chaudes jamais mesurées. Plusieurs pays, comme l’Argentine, la Bulgarie, l’Espagne ou l’Uruguay ont enregistré des records absolus de températures annuelles moyennes. Des pointes de 43,4 °C ont été relevées en janvier, en Argentine, et de 53,5 °C en août, dans l’ouest du Pakistan.
Océans : les températures moyennes à la surface des océans, elles, sont restées légèrement en dessous de celles de 2016. Mais les trois dernières années ont été là aussi les plus chaudes jamais mesurées, avec, depuis 2000, une hausse moyenne de 0,17 °C par décennie. La partie supérieure des océans (jusqu’à 700 mètres de profondeur) a accumulé une quantité de chaleur inégalée. Il s’agit d’un indicateur crucial du réchauffement, car les océans absorbent plus de 90 % de la chaleur additionnelle due au gaz à effet de serre, dont 1 % seulement va dans l’atmosphère, le reste se partageant entre les glaces et les sols.
Il en est résulté une poursuite du phénomène de blanchissement massif des coraux, qui s’est étalé sur une période inusitée de trois ans (de juin 2014 à mai 2017), provoquant, dans les océans Atlantique, Indien et Pacifique, des mortalités sans précédent, allant jusqu’à 95 % pour certaines formations coralliennes. Quant au niveau moyen des mers, il a atteint lui aussi un nouveau record, en se situant 7,7 cm plus haut qu’en 1993, début des mesures altimétriques par satellites. L’élévation des océans est ainsi de 3,1 cm par décennie.
Arctique et Antarctique : année rouge, également, pour les régions polaires. Au Nord, la température terrestre a surpassé de 1,6 °C la moyenne de la période 1981-2010, sans atteindre toutefois le niveau de 2016. L’étendue maximale de la glace de mer arctique, au début du mois de mars, a été la plus faible depuis le début des observations satellitaires en 1980. Et son étendue minimale, en septembre, était inférieure de 25 % à la moyenne de la période de référence. En Antarctique aussi, la banquise a été mise à mal pendant une grande partie de l’année, avec, de janvier à avril, une surface réduite comme jamais au cours des trois dernières décennies. Précipitations et sécheresses : les pluies extrêmes ont été, elles aussi, plus abondantes que la moyenne, avec des épisodes torrentiels dévastateurs en Inde, durant la saison des moussons, au Venezuela, en août et septembre, ou au Nigeria, au cours des deux mêmes mois. À l’inverse, après avoir baissé d’intensité au début de l’année, les sécheresses sévères ou extrêmes n’ont épargné aucun continent, frappant particulièrement l’Amérique du Sud, l’Afrique et certaines parties de l’Inde, de la Russie, de la Chine et de l’Australie. Une situation qui a contribué à attiser des incendies très destructeurs en Colombie britannique, aux États-Unis, en Espagne ou au Portugal, même si, sur le front des feux, l’année écoulée a été la plus calme à l’échelle mondiale depuis 2003. Ouragans : avec 85 cyclones tropicaux, 2017 a légèrement dépassé la moyenne annuelle de 82 événements observée sur la période 1981-2010. Seul le bassin nord-atlantique a connu une activité cyclonique nettement plus prononcée que la moyenne, avec en particulier les ouragans Harvey, en août au Texas, suivis d’Irma et Maria, en septembre, dans les Caraïbes, d’une intensité exceptionnelle.