LES QUELQUE 341 km qui séparent Lubumbashi de Kolwezi, chef-lieu de la désormais « province pilote » en République démocratique du Congo, constituent une véritable épreuve pour les automobiles et gros camions qui s’y engagent chaque jour. La route à l’asphalte entamé et crevassé par endroits se tord en lacets dans le paysage montagneux. Un paysage magnifique et saisissant, qui donne l’impression qu’ici, la nature s’est faite un jour de rugueuse poésie.
Pour le visiteur qui y débarque pour la première fois, Kolwezi évoque un gros bourg à l’allure de vieille cité coloniale. Ses édifices, vestiges de l’époque des Belges, ses immeubles aux devantures négligées, ses habitants qui savent prendre leur temps…, voilà autant de choses qui font que cette ville n’est ni simple ni ordinaire.
Sans être vraiment charmante comme sa voisine Likasi – jadis considérée comme « la ville la plus propre » du pays -, la ville de Kolwezi n’est pas moins attachante par certains côtés, sans qu’on puisse vraiment dire lesquels. Est-ce le pittoresque que traduit si bien le style de l’hôtel Moon Palace avec son patio et son architecture qui semblent sortir des films holywoodiens ? Est-ce tout simplement les mines de cuivre et cobalt et leur activité débordante, des mines qui sont le maillon essentiel du renouveau économique de la province du Lualaba, et partant de la RDC ?
Capitale administrative de la province pilote, le Lualaba, Kolwezi, désormais « la capitale mondiale du cobalt », est devenue, comme toute la province d’ailleurs, un point stratégique pour l’économie du pays.
Comme la Californie !
Pour beaucoup, Kolwezi, c’est déjà la (nouvelle) Californie de la RDC. Étymologiquement, de l’espagnol « California » (utopie), le mot a le sens de « eldorado », attesté en 1850 et date de la ruée vers l’or en Californie, par allusion au caractère démesuré de son développement et des fortunes immenses que celui-ci occasionna. ça, c’est pour l’anecdote. Mais pour de vrai, la Californie est l’un des États-Unis d’Amérique, bordé par l’Oregon au nord, le Nevada et l’Arizona à l’est, le Mexique au sud, et le Pacifique Nord à l’ouest. Son territoire très contrasté comprend des plages entourées de falaises, une forêt de séquoias géants, les montagnes de la Sierra Nevada, les terres agricoles de la vallée centrale et le désert des Mojaves.
L’économie de la Californie représente à elle seule 13 % du Produit intérieur brut (PIB) des États-Unis. C’est l’une des dix premières économies mondiales. Cette réussite économique repose sur des industries de pointe, bien sûr, mais aussi sur une agriculture performante, une population nombreuse.
Le tournant de l’histoire
C’est véritablement en 1848 que l’histoire économique de la Californie prend un grand tournant, grâce ou à cause de la ruée vers l’or. La découverte de l’or attira des milliers de mineurs et d’aventuriers américains ou européens. Parallèlement à l’activité minière, l’agriculture se développa à grande échelle, notamment la production du blé.
La ruée vers l’or va alors s’accompagner de la construction de nouvelles infrastructures : routes, chemins de fer, écoles, églises… L’amélioration des voies de communication a pour objectif de relier la Californie à la cote, via la Panama Railway. Toutes les autres industries, dont celle du tourisme vont profiter de l’arrivée des trains et du canal de Panama.
Plus tard, la Californie devient encore plus puissante grâce à la découverte du pétrole. On assiste à une nouvelle vague de nouveaux arrivants. Ainsi Los Angeles abrite Hollywood, la capitale de l’industrie du divertissement (cinéma), grâce à la présence des compagnies du cinéma, parmi lesquelles MGM, Universal et Warner Brothers, qui achetèrent, toutes, des terres à Hollywood, devenant progressivement par la force des choses le centre névralgique de l’industrie cinématographique américaine. La Californie devient aussi le centre des industries de défense.
Avec son climat méditerranéen, et sa grande variété de paysages, elle attire alors beaucoup de touristes américains. La Lincoln Highway, la première route transcontinentale d’Amérique est un facteur clé du développement de l’industrie et du tourisme dans cet État : elle relie NewYork à San Francisco…
La Silicon Valley
Après la Seconde Guerre mondiale (1940-1945), c’est le boom de l’immobilier. La Californie se modernise et son économie se développe davantage. Dans les années1970, la Silicon Valley fait parler d’elle avec la concentration des industries de haute technologie. Par ailleurs, la Californie devient une interface de premier plan et les ports à conteneurs grandissent à la faveur des échanges avec l’Asie, notamment avec la Chine et le Japon. Ce n’est pas pour rien, si cet État américain possède l’une des plus importantes concentrations des banques internationales et des consulats au monde.
Bref, la Californie doit sa puissance à ses ressources naturelles abondantes (minerais, bois, fleuves et hydrocarbures), aux innovations (cinéma, informatique), au trafics maritime et ferroviaire entre la côte ouest et les foyers urbains et industriels du nord-est, mais aussi aux infrastructures efficaces (ports, routes) facilitant les exportations et le commerce avec l’Amérique du Sud et l’Asie.
San Francisco et Los Angeles sont les destinations les plus prisées par les touristes, grâce à leurs aéroports internationaux, aux sites pittoresques (pont du Golden Gate, Hollywood), des musées et des parcs d’attraction (Disneyland)… L’image de la Californie est donc intimement liée à celle de la ruée vers l’or et de la possibilité de faire fortune rapidement. C’est donc par métaphore que Californie désigne toute contrée aux ressources naturelles innombrables. Et Kolwezi, on rêve d’un tel développement. Pour cet habitant de Kolwezi, sa ville présente beaucoup de similitudes avec l’État de la Californie.