C’est un grand pas dans la gestion des finances du pays et sa gouvernance. Les députés congolais examinent, depuis quelques jours, le projet de loi portant reddition des comptes de l’exercice 2012, avant de passer à l’examen du projet de la loi budgétaire présenté par le gouvernement. Ce fait à lui tout seul mérite d’être salué car, aucune loi de reddition des comptes n’avait été déposée par le gouvernement ces 10 dernières années avant l’examen et l’adoption du budget de l’Etat. Il s’agit pourtant d’une obligation constitutionnelle qui enjoint l’Assemblée nationale de statuer sur la reddition des comptes de l’Etat d’un exercice clôturé avant de fixer la nouvelle loi des finances publiques. L’économie du texte a été présentée par le ministre délégué auprès du Premier ministre en charge des finances, Patrice Kitebi Kibol Mvul qui a rendu compte, au nom du gouvernement, de l’exécution du budget du dernier exercice clos, en présentant les réalisations des recettes et des dépenses telles qu’elles ont été appréhendées à partir du compte général du Trésor, des livres de caisses des comptables et des receveurs des douanes ainsi que des états financiers des divers services et organismes de gestion des ressources de l’Etat.
L’exécution au 31 décembre 2012 de ce budget arrêté en équilibre, en recettes, et en dépenses à 6.609.171.209.773,00 CDF, a dégagé en recettes 4.333.730.669.670, 48 CDF, soit un taux de réalisation de 65,57 % et en dépenses 3.902.441.432.827, 81 CDF, soit un taux d’exécution de 59,05% par rapport aux prévisions, a fait savoir le ministre Kitebi.
Dans l’ensemble, il s’est ainsi dégagé une marge de trésorerie de 431.289.236.842, 67 CDF. En recettes, la moins-value au total est de 34, 43%, soit 2.275.440.540.102, 52 CDF dont 173.141.208.467,99 CDF pour la Direction générale des douanes et accises, DGDA qui a atteint un taux de réalisation de 88%, 182.263.094.566, 52 CDF pour la Direction générale des impôts, (taux de réalisation de 87,24%); 373.931.568.753, 13 CDF pour la Direction générale des recettes administratives, domaniales et de participations, DGRAD (50 % de taux de réalisation), 78.671.550.275, 98 CDF pour les pétroliers producteurs (soit un taux de réalisation de 83,18%) et 1.654.585.768.274, 94 CDF pour les recettes extérieures, soit un taux de réalisation de 29,56%.
D’une manière générale, les faiblesses de réalisation des recettes de trois régies financières sont imputables pour l’essentiel à certains pesanteurs dont l’exonération des marchés publics à financement extérieur, les exonérations à titre dérogatoire octroyées dans le cadre des contrats programmes à certaines entreprises commerciales, etc., a révélé M. Kitebi.
Dans leurs interventions au cours du débat engagé à cet effet, les députés ont relevé la pertinence des observations de la Cour des comptes faisant état de la mauvaise exécution du budget 2012, notamment la non utilisation des ressources prévues et le dépassement budgétaire pour certains ministères. Dans cette dernière catégorie, on cite la Primature, le ministère du Budget et celui des Finances, dont la diligence à se faire payer frise avec des actes répréhensibles. Il n’est pas rare qu’un bon signé le matin soit payé avant le coucher du soleil pour les ministères concernés. La désarticulation de la chaîne de la dépense avec comme conséquence la prépondérance de l’exécution des dépenses non prévues par rapport à celles prévues au budget n’est pas la seule entorse constatée.
Sur 695 comptables publics, seulement 126 en ordre
Parmi ces observations, on note aussi que « la procédure devant la Cour des comptes est biaisée du fait que les opérations préalables, qui devraient consister au rapprochement entre les comptes individuels des comptables et le compte général de l’Etat ne sont pas fournis ».
On apprend ainsi que sur 695 comptables publics de l’Etat, il n’y a que 162 qui ont déposé leurs comptabilités. Dans les couloirs du Palais du peuple, on se dit étonné d’apprendre que certaines provinces, à l’instar de l’Equateur, ont fonctionné sans comptabilité pendant des années.
Les vieux démons ont refait surface dans l’exécution des budgets de l’Etat. Pourtant, l’un des meilleurs fils du pays en cette matière n’a cessé de tirer la sonnette d’alarme. Selon le professeur Mabi Mulumba, la bonne gouvernance n’a pas trouvé sa place dans la gestion de différents budgets de l’Etat de la République démocratique du Congo. Alors président de la Cour des comptes, Mabi démontrait que la bonne gouvernance n’a pas caractérisé la gestion des différents budgets de l’Etat de la République Démocratique du Congo en 2001, 2002, 2003 et 2004, soulignant à quel point le Congo a été très mal géré pendant tout ce temps sous l’œil complice de la communauté internationale.
Rien n’a changé en 2012. Sous d’autres cieux, les portes de prison auraient été grandement ouvertes pour tous ceux qui bafouent la loi, qui saignent les finances publiques et fragilisent l’économie nationale.