LA SOCIÉTÉ nationale d’électricité (SNEL SA) accuse un déficit de 860 MW pour assouvir la demande en énergie des miniers du Grand Katanga. À ce jour, elle ne leur offre que 751 MW pour une demande de 1411MW. Et voilà que les pylônes de la ligne très haute tension courant continu (THTCC) Inga-Katanga font de nouveau les frais de vols des cornières de soutènement. Mi-avril 2019 déjà, miniers de l’ex-province du Katanga affiliés à la FEC (patronat), banquiers et délégués de la SNEL se sont retrouvés à Kolwezi, capitale de la province du Lualaba, pour étudier les pistes de sortie de la crise énergétique.
Ces assises ont accouché d’une recommandation principale : le recours à des investissements privés. Mais il se trouve que l’État lambine dans la libéralisation du secteur énergétique. Dans le Grand Katanga, la SNEL détient quasiment le monopole dans la production, le transport et la distribution de l’énergie électrique. D’après Eric Monga, le numéro un de la FEC/Haut-Katanga, le déficit énergétique pourrait occasionner un manque à gagner de près de 20 milliards de dollars pour les minings d’ici 2025.
Il sied de rappeler qu’en 2018, les industries minières dans leur ensemble ont réalisé 15 milliards de dollars de recettes. En 2017, le manque du courant avait entraîné le ralentissement, au pire l’arrêt, des activités minières même dans la région de Kasaï, selon un rapport du ministère du Portefeuille. La Minière de Bakwanga (MIBA), la Société Anhuit Congo d’investissements miniers (SACIM), SODIMICO, etc. ont fait les frais des défaillances de la SNEL.
Depuis, la SNEL et les opérateurs miniers du Haut-Katanga ont entrepris des démarches pour l’approvisionnement de la région du copperbelt congolais depuis l’Afrique du Sud. Mais le dossier n’évolue guère. À défaut d’énergie électrique, la réalisation du « Plan stratégique de développement minier 2016-2021 » se retrouve compromis. Ce plan vise à développer un secteur minier compétitif et durable, socle d’un pays émergent et du bien-être de la population congolaise et d’assurer la bonne gouvernance du secteur et le développement des infrastructures d’appui au secteur minier et environnemental.
Mais le déficit énergétique peut servir d’un cas de force majeure pour les entreprises minières et justifier le non-versement de certains droits, taxes et redevances. La redevance minière couvre la grosse part des prévisions des recettes non fiscales, soit plus 85 %. Par ailleurs, certains actes ne portent pas des prévisions, mais sont perçus et ce, depuis 2015, tels que la taxe sur l’autorisation d’achat de cassitérite, la taxe d’extraction des matériaux de construction, la taxe sur les produits ex-SAESSCAM (petite mine) ou encore la taxe sur l’autorisation de transformation des produits d’exploitation artisanale.
À ce jour, les miniers du Katanga ont besoin de quelque 1 411 MW alors que l’offre locale, selon des sources SNEL, se situe à 751 MW dont 350 provenant des centrales hydroélectriques de Nzilo, Nseke et Mwadingusha et les 500 autres mégawatts proviennent de la ligne THCC Inga-Kolwezi. Les opérateurs miniers du Grand Katanga ont énormément investi ces derniers mois sur la ligne THCC Inga-Kolwezi. Anvil Mining a notamment installé une centrale à Lubumbashi pour la fourniture d’énergie à Kinsevere. Ivanhoé a financé la réhabilitation des turbines de la centrale de Mwadingusha. Les barrages hydroélectriques de Nzilo et Nseke ont également été remis à l’état par les miniers, même si la SNEL SA en reste propriétaire.
Toutefois, l’entreprise d’État doit rembourser tous les frais engagés par des minings. Voilà qui justifierait l’augmentation des tarifs haute tension appliqués aux opérateurs miniers. En Zambie, indique-t-on à la SNEL, le prix du kilowattheure revient au double de celui appliqué en RDC. Or, la SNEL SA importe du courant de ce pays via l’entreprise ZESCO pour assouvir les besoins énergétiques des miniers du Katanga.
Par ailleurs, la société civile qui s’est invitée au débat sur la problématique du déficit énergétique que l’État, encore actionnaire unique de la SNEL, n’envisage pas de réhabiliter certaines centrales dans la région. Juste 116 000 dollars sont nécessaires pour réhabiliter le barrage hydroélectrique de Kilubi, en vue de résoudre le problème de desserte en électricité de la ville de Kamina et ses environs, dans la province du Haut-Lomami. Situé à 90 km de la ville de Kamina, le barrage hydroélectrique de Kilubi nécessite une réhabilitation de fond en comble de son équipement. Selon les techniciens de la SNEL/Katanga, un devis est déjà établi pour les travaux de réhabilitation de la dernière turbine encore en état de fonctionner mais tombée en panne, mi-mars 2019.