L’UNION Internationale des Télécommunications (UIT) a profité de la date du 14 octobre, consacrée à la Journée internationale des déchets électroniques pour mobiliser les États du monde à prendre conscience du danger que représentent les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE). En République démocratique du Congo, des agents du ministère des Postes, des Télécommunications et des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (PT&NTIC) bénéficieront dans les prochains jours d’une formation sur des notions de base sur les projets de recyclage des déchets d’équipements électriques et électroniques jugés dangereux pour l’homme et/ou l’environnement.
Pour ce faire, la Société congolaise des fibres optiques (SOCOF) a reçu un financement sous forme de don de la Banque mondiale pour recruter un cabinet d’étude expert en la matière. La SOCOF SA voudrait former d’abord les agents du ministère des PT&NTIC à maîtriser l’abc du recyclage des DEEE. D’après le WEEE Forum, une association à but non lucratif créée en avril 2002 et regroupant 36 organisations engagées dans une gestion responsable des DEEE (WEEE en anglais) en Europe et dans le monde, 50 millions de tonnes de déchets électroniques seront générés dans le monde en 2019.
La moitié de ces DEEE est constituée des appareils personnels tels que des ordinateurs, des écrans, des smartphones, des tablettes et des téléviseurs. Le reste étant constitué d’appareils ménagers plus grands et d’équipements de chauffage et de refroidissement. Mais seulement 10 millions de tonnes de l’ensemble de ces DEEE seront collectés et traités selon les règles de l’art. Conséquence, de graves problèmes de santé en perspective, notamment dans les pays en développement où ces déchets sont presque toujours illégalement déversés. C’est pour sensibiliser l’opinion mondiale sur les problèmes des déchets électroniques et encourager leur élimination appropriée par une gestion responsable que la seconde Journée internationale des déchets électroniques, le 14 octobre 2019. Le WEEE Forum, organisateur de cet événement, a annoncé la semaine dernière l’UIT, l’agence des Nations Unies chargée des questions relatives aux TIC, sera partenaire de cette Journée internationale des déchets électroniques.
Influence mondiale
Selon Houlin Zhao, son secrétaire général, l’UIT contribue depuis un certain nombre d’années au Global E-Waste Monitor, dont l’objectif principal est d’améliorer et de collecter des statistiques mondiales sur les déchets électroniques. Cette recherche a mis en évidence le volume croissant de déchets électroniques et les taux de recyclage relativement faibles de cet important flux de déchets. « La Journée internationale des déchets électroniques prend des mesures pour s’attaquer à ces problèmes et il a donc été facile pour l’UIT de s’associer à cette campagne », souligne-t-il.
Pour Pascal Leroy, le directeur général du Forum DEEE, « l’UIT exerce une influence mondiale sur le marché des TIC et nous sommes très heureux qu’ils participent à la Journée internationale des déchets électroniques cette année. Leur portée permettra à notre message d’atteindre un public beaucoup plus large, d’accroître son impact et, nous l’espérons, changer davantage les attitudes à l’égard des déchets électroniques ». Lors de la première Journée internationale des déchets électroniques en 2018, les membres du Forum DEEE et les parties prenantes externes se sont joints à l’initiative, entraînant la participation de plus de 50 organisations de plus de 40 pays dans le monde.
Parmi les initiatives entreprises en 2018, des conférences et événements, des campagnes d’information dans les magasins et les centres de recyclage, la publication des Guides en ligne pour l’élimination appropriée des déchets électroniques, des jeux d’économie circulaire pour les écoles ou encore des concours sur les médias sociaux concernant cette problématique. Pour l’édition 2019, 81 organisations de 41 pays ont déjà enregistré les activités similaires sur le site web du WEEE Forum et les organisateurs s’attendent à ce que ce nombre continue d’augmenter.
20 % des déchets recyclés
Selon l’ONU, seulement 20 % des déchets électroniques mondiaux sont recyclés chaque année. Ce qui signifie que 40 millions de tonnes d’e-déchets sont soit mis en décharge, soit brûlés ou illégalement échangés et traités d’une manière non conforme aux normes. 66 % de la population mondiale est couverte par une législation sur les déchets électroniques. Ce qui occasionne une perte énorme de matières premières essentielles et précieuses dans la chaîne d’approvisionnement et cause de graves problèmes de santé, environnementaux et sociaux par le biais de transferts illicites de déchets vers les pays en développement.
Le documentaire diffusé le 19 février 2019 par France 5 sur les déchets électroniques intitulé « Déchets électroniques, le grand détournement » l’illustre d’ailleurs de fort belle manière. Ce documentaire réalisé par Coraline Salvoch et Alain Pirot montre le circuit des déchets électroniques, une fois jetés à la poubelle ou abandonnés sur le trottoir en Europe. Pour les auteurs de cette enquête, « des organisations mafieuses » se font du beurre sur ces déchets électroniques qui, très souvent achèvent leurs courses dans des décharges illégales et non conformes en Afrique. À Accra, au Ghana, le documentaire montre des ouvriers qui démontent ces téléviseurs, ordinateurs et frigos venus d’Europe, malgré les fumées toxiques et les substances chimiques. Un trafic qui détruit la planète en toute impunité, soutient le documentaire.
Basel Action Network
Au-delà de ce documentaire de France 5, une autre enquête tout aussi intéressante sur le sujet avait été publiée par l’ONG Basel Action Network (BAN) le 07 février 2018. Dans cette enquête baptisée Holes in the Circular Economy: WEEE Leakage from Europe, des volontaires de l’ONG ont déposé 314 ordinateurs, écrans plats, et imprimantes équipés d’un tracker GPS dans des points de collectes agréés dans 10 pays européens.
Résultat : 19 équipements (6 %) sont sortis illégalement du pays où ils auraient dû être retraités. Illégalement au regard du droit européen, « car le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, l’Irlande, la Pologne et l’Espagne n’ont pas traduit en droit national l’interdiction d’exporter des déchets électroniques », indique l’enquête. BAN estime que l’Europe exporte illégalement 352 474 tonnes de déchets électroniques par an, soit l’équivalent de 2,5 milliards de smartphones ! Aussi, onze déchets exportés illégalement sur 19, soit 64 %, ont fini dans un pays en voie de développement.
Avec l’Afrique comme destination de choix. Les exutoires sont le Nigeria (5 équipements), le Ghana (1), la Tanzanie (1), mais aussi l’Ukraine, le Pakistan, la Thaïlande et Hong Kong. Chaque déchet a parcouru en moyenne 4 127 kilomètres pour un total de 78,408 kilomètres, soit presque deux tours du monde. Si l’Afrique manque encore de mécanismes de contrôle efficace de la qualité des appareils importés de l’Europe, des moyens, ressources et/ou outils pour recourir à des enquêteurs portuaires et à des techniques de suivi GPS comme le propose l’ONG BAN ou encore, de techniques de destruction de ces déchets électroniques en respectant les normes environnementales et de santé, certaines initiatives commencent à démontrer leur efficacité. C’est le cas du programme SGS Renovo.
Un programme déjà lancé au Ghana en août 2018 et en Côte d’Ivoire en novembre 2018. Récemment, le 27 Juin 2019, la République de Guinée a validé le choix du groupe suisse SGS SA pour lui apporter son expertise. D’après SGS, une fois en Afrique, brûler, détruire ou mener ces déchets électroniques à la décharge ne signifie ni plus ni moins que mettre de côté un problème dont devront s’occuper les générations futures.
Car, explique le groupe suisse, plus de 1 000 substances présentes dans les déchets électroniques sont libérées dans l’écosystème, notamment le plomb, le cadmium et le mercure et constituent une menace tant pour les pays africains que pour leurs habitants, compte tenu des graves problèmes que cela pourrait causer en matière de santé et d’environnement, aussi bien aujourd’hui que demain. SGS Renovo propose aux pays africains de concevoir, de planifier et de mettre en place un système autofinancé de gestion des déchets à grande échelle pour les pays. Cela passe par la collecte d’une écotaxe anticipée. Le service couvre toutes les étapes : de la production à la récupération, du recyclage à l’élimination durable des déchets.