GUILLAUME Mandjolo, le ministre de la Coopération internationale, de l’Intégration régionale et de la Francophonie, avait bien voulu présider lui-même la cérémonie d’ouverture de ce séminaire régional au Centre numérique francophone (CNF) de Kinshasa. Une manière pour lui de marquer l’importance des attentes du gouvernement en accueillant ces assises consacrées à la diversité linguistique. Mais à cause d’une occupation d’État de dernière minute, il y a été représenté par Jonas Kumakinga Ngwey, le délégué général à la Francophonie et correspondant national de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) en République démocratique du Congo.
Pendant trois jours donc, universitaires et professionnels de l’éducation, de la culture et de la sociolinguistique, avec des experts de l’espace francophone du Nord et du Sud, ont réfléchi à la meilleure façon de renforcer les politiques d’aménagement linguistique dans les pays d’Afrique centrale et des Grands lacs (Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo Brazzaville, Congo RD, Gabon, Guinée Équatoriale, Rwanda, Sao Tomé et Principe, et Tchad). En effet, les pays francophones comptent une diversité de langues sur leur territoire national, plus particulièrement les pays qui appartiennent à l’espace francophone du Sud.
Selon Francine Quéméner, spécialiste de programme à l’Observatoire de la langue française/politiques linguistiques de l’OIF, dépêchée à Kinshasa pour superviser ces assises, « cette situation de diversité linguistique nécessite une prise en compte spécifique qui passe par le renforcement ou l’élaboration de politiques d’aménagement linguistique conséquentes de la part des États ».
D’après cette experte de l’OIF, « c’est la raison pour laquelle la Francophonie encourage ses pays membres à mettre en œuvre des politiques linguistiques où le français et les langues nationales intègrent une vision globale du développement linguistique et social des pays ». Et de souligner, en rappel, que le Sommet de la Francophonie de Madagascar, en 2016, a doté l’OIF d’« une nouvelle résolution qui ancre la promotion du français dans le cadre d’une politique favorable à la diversité linguistique, pour que la valeur des différentes langues puisse être prise en compte dans le développement économique de tout pays ».
D’après Francine Quéméner, si la dimension culturelle et linguistique est de plus en plus valorisée dans les politiques publiques nationales, il n’en demeure pas moins que « la gouvernance et les partenariats linguistiques doivent encore être approfondis à travers la définition et la mise en œuvre de politiques performantes d’aménagement du multilinguisme et la promotion du plurilinguisme ». Pour ce faire, il faut une approche méthodologique partagée, a laissé entendre un participant au séminaire.
C’est dans ce cadre que la Direction langue française, culture et diversité (DLFCD) de l’OIF a organisé ce séminaire régional de sensibilisation et de partage d’expériences à destination des acteurs des structures étatiques, scientifiques et associatives (Éducation nationale, Enseignement supérieur et Recherche, directions générales ou nationales, instituts et observatoires des langues et des cultures, alphabétisation, etc.) en charge de l’aménagement linguistique au sein des pays membres.
Cette rencontre, a déclaré Francine Quéméner, avait pour but de sensibiliser les participants aux enjeux de la diversité culturelle et linguistique, aux mécanismes de la gouvernance linguistique nationale (environnements linguistiques et instruments de gouvernance, stratégies de sauvegarde et de valorisation des langues), ainsi qu’aux outils théoriques et pratiques indispensables pour une mise en œuvre réussie des politiques linguistiques dans le contexte des pays francophones du Sud.
En fait, l’objectif principal de ce séminaire était de faire un état des lieux de la situation des pays représentés, lesquels ont été par ailleurs invités à soumettre un projet dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) à diffuser en 2020 par l’OIF. Il s’agit d’accompagner les États et les gouvernements dans la définition et l’élaboration de plans d’action de gouvernance linguistique favorables à la diversité linguistique et culturelle, ainsi qu’au plurilinguisme. Et, par conséquent, cet état des lieux de la situation des pays devait aboutir à l’élaboration d’un cadre stratégique et d’un plan d’action ancrés dans les politiques publiques, en cohérence avec les actions déjà menées sur le terrain par les partenaires.
Les résultats attendus
Dans cette optique, quatre résultats étaient attendus. Un : une excellente compréhension de concepts fondamentaux du plurilinguisme et de la diversité culturelle en tant qu’ils constituent un enjeu stratégique pour l’OIF (Programme P3 relatif à la « Gouvernance culturelle et linguistique, le dialogue des cultures »). Deux : une appropriation par les structures en charge de la gouvernance linguistique – levier pour le développement – des termes de références essentiels de l’appel à manifestation d’intérêt, pour l’accompagnement de la mise en œuvre des politiques linguistiques en vue de favoriser le plurilinguisme. Trois : la capacité à faire un état des lieux clair et pertinent de la situation de chacun des pays représentés en prenant en compte tous les aspects liés à la gouvernance linguistique. Et quatre : la maîtrise de la méthodologie de la conception, de la planification et de l’exécution d’un projet de politique d’aménagement linguistique.
Ce séminaire régional de sensibilisation pour le renforcement des politiques d’aménagement linguistique dans l’espace francophone du Sud a été structuré autour de quatre thèmes avec des contenus spécifiques (objectifs stratégiques ; aspects fondamentaux des structures de gouvernance linguistique ; définition, élaboration ou renforcement d’un projet de politique d’aménagement linguistique vers sa mise en œuvre ; et Diagnostic de la situation de chaque pays).