LA SÉANCE de travail avait l’allure d’une réunion de cellule de crise. Le projet de construction du port en eaux profondes de Banana dans le Kongo-Central paraît être en panne, et il faudra lui donner un coup de fouet. Siméon Munganga, l’ingénieur en charge de la commission de suivi du projet de port en eaux profondes de Banana (CSPPEPB), a fait le point de la situation. À l’issue de la réunion, il a été décidé de mettre sur pied une équipe technique, qui travaillera sous le contrôle de Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, aux fins d’étudier quelques aspects spécifiques de ce grand projet à soumettre prochainement à l’examen du conseil des ministres.
Pour rappel, la construction du port de Banana devrait se faire en quatre phases, selon l’accord qui a été signé en février 2017. Il s’agit notamment de construire cinq quais d’une longueur de 1 600 m, d’avoir un tirant d’eau de 15,5 m. Le port devra avoir une capacité de 20 MVA et une zone logistique et industrielle. Selon la feuille de route du gouvernement de 2012, la construction du port en eau profonde devrait se faire avec celle du chemin de fer Banana-Matadi.
Une autre convention de collaboration entre l’État congolais et DP World devrait créer un service public dénommé « Port en eaux profondes ». En pratique, il s’agira d’une société concessionnaire commune dans laquelle, contrairement aux concessions classiques, l’État aura 30 % de participation non dilluables au capital social et DP World 70 %. Par conséquent, la société concessionnaire aura, pour la partie congolaise, des mandataires nommés par le président de la République, conformément à la loi n°08/010 du 7 juillet 2008 fixant les règles relatives à l’organisation et à la gestion du Portefeuille de l’État.
Selon cette convention, le ministre du Portefeuille couvrira, par sa procuration spéciale, la participation de l’État à l’Assemblée générale, instance où toutes les grandes décisions de la société seront prises à 71% de vote, sachant que les 30 % de l’État sont non-dilluables. En ce qui concerne la gestion du port, l’État aura au moins deux postes, celui du président du conseil d’administration et du directeur général adjoint. Naturellement, les postes stratégiques du directeur général et du chargé des finances reviendront au groupe émirati DP World.
Mise en concession
Selon des sources au ministère des Transports et des Voies de communication, le projet du port en profonde au large de Banana ainsi que des travaux connexes porte sur une mise en concession de 30 ans, avec possibilité de renouvellement de 20 ans. Comme on pourrait le constater, avec cette séance de travail à la primature, le gouvernement semble réitérer son engagement de construire le port de Banana. Le projet remonte à la fin des années 1980.
Pour les ressortissants du Kongo-Central, le projet constituerait un hinterland pouvant rapporter gros pour la province. Mais le projet panafricain de construction du pont route-rail sur le fleuve Congo entre Brazzaville et Kinshasa est redouté par l’élite et les hommes d’affaires du Kongo-Central. Ils craignent l’asphyxie des ports maritimes (Boma et Matadi) de la province. Dans le Kongo-Central, on a fait de la construction du port de Banana un préalable à la réalisation du projet panafricain.
Pour le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), deux grands projets (le pont route-rail et Inga III) en République démocratique du Congo figurent parmi les 16 prévus pour transformer l’Afrique. Ces projets ciblent les secteurs de l’énergie, des transports, de l’eau et des technologies de l’information et de la communication. Le pont Brazzaville-Kinshasa a pour objectif la création d’une liaison ferroviaire entre l’Afrique centrale et l’Afrique du Sud à partir de la RDC. Le budget de son exécution se chiffre à 1,65 milliard de dollars.