LE VRAI problème estiment des analystes, concerne davantage les entreprises et notamment la chute de productivité que va provoquer cette nouvelle organisation de l’économie. Entre des horaires décalés qui risquent d’être compliqués à gérer pour les PME, une présence physique alternée dans les locaux, une hausse des coûts de production liée à la mise en place de mesures sanitaires drastiques et à l’achat de matériel de protection, la viabilité de nombreuses TPE-PME pourrait être altérée. Dans ces conditions, l’économie pourrait tourner au maximum à 90 % de ses capacités et engendrer des pertes. Les trois prochains mois pourraient donc bien incarner le trimestre de tous les dangers pour les entreprises. Si les entreprises fermées depuis la mi-mars n’ont qu’une hâte : celle de reprendre du service, la question du pouvoir d’achat et de la consommation des ménages se pose également. Partout, les gens seront-ils enclins à consommer à l’heure où seulement 1 salarié sur 10 travaille comme avant, où presque 5 salariés sur 10 sont au chômage partiel, 3 sont en télétravail, et 1 seul salarié se rend sur son lieu de travail comme avant?
Économie de crise
Sur 10 salariés, 3 ont des doutes aujourd’hui quant à la pérennité de leur emploi. Difficile donc dépenser sereinement. Dans la mesure où cette crise économico-sanitaire pourrait coûter des points de PIB à beaucoup de pays, les économistes estiment qu’il conviendrait de rajouter au minimum 100 milliards de dollars de plus sur la table que ce qui a déjà été mis aujourd’hui.
Par exemple, Puma vient d’obtenir un nouveau soutien financier. L’équipementier allemand, spécialisé dans la fabrication d’articles de sport, s’est assuré en mai d’une nouvelle ligne de crédit auprès d’un « consortium de douze banques », à hauteur de 900 millions d’euros dont 625 millions accordés par la banque publique allemande KFW. Le groupe profite ainsi du plan d’aide aux entreprises de plusieurs centaines de milliards d’euros, annoncé mi-mars par le gouvernement allemand, incluant des prêts « sans limites », garantis ou accordés en partie par la banque KFW. Ces liquidités devraient servir à atténuer l’impact de la pandémie de coronavirus, qui plombe les activités du groupe.
Puma fait état, pour le premier trimestre 2020, d’un résultat net en baisse de 61,6 % à 94,4 millions d’euros et d’un résultat opérationnel (EBIT) en chute de 50,1 % à 142,5 millions d’euros. Le chiffre d’affaires du groupe a également reculé, de -1,3 %, à 1,3 milliard d’euros. Le groupe s’attend à un deuxième trimestre « pire que le premier », alors que l’évolution de la situation « n’est pas prévisible dans les prochaines semaines et mois ». L’entreprise voit toutefois « une amélioration » dans la région Asie/Pacifique, particulièrement en « Chine et en Corée du Sud », tandis que « les premiers magasins rouvrent actuellement en Europe ».
« Tous les marchés devraient repartir d’ici la fin de l’année », et 2021 devait « être de nouveau une année de croissance », prévoit l’équipementier. Comme l’ensemble du secteur de l’habillement, Puma est particulièrement touché par les effets de la pandémie de coronavirus, 80 % de ses magasins étant fermés dans le monde fin mars. Son concurrent Adidas a lui aussi reçu en avril un prêt d’urgence de la banque publique allemande KFW, à hauteur de 2,4 milliards d’euros.
Recul de l’activité
Le tourisme mondial accuse le coup de la crise engendrée par l’épidémie de coronavirus. Pour cause, ce secteur pourrait reculer de 60 à 80 % a indiqué, la semaine dernière, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). Les arrivées ont déjà chuté de 22 % au premier trimestre sur un an, et même de 57 % au mois de mars après le début du confinement dans de nombreux pays. Le secteur a ainsi perdu 80 milliards de dollars sur les trois premiers mois de l’année. Au total, les pertes financières pourraient aller de 910 milliards de dollars à 1 200 milliards de dollars.
« L’impact se fera sentir à des degrés divers dans les différentes régions du monde et à des moments qui se chevauchent, l’Asie et le Pacifique devant être les premiers à rebondir », ajoute l’organisme. Ces nouvelles prévisions sont basées sur trois scénarios de sortie de crise: réouverture des frontières et levée des restrictions de voyage début juillet (baisse de 58 % des arrivées), début septembre (-70 %) et début décembre (-78 %).
Les perspectives sont mitigées pour l’Europe et l’Asie. L’OMT craint « la mise en danger de 100 à 120 millions d’emplois directs dans le tourisme ». Les experts de l’agence « s’attendent à voir des signes de reprise au dernier trimestre 2020, mais surtout en 2021 », avec un redressement de la demande intérieure plus rapide que celle de la demande internationale. « Les voyages de loisirs, et en particulier ceux effectués pour rendre visite à des amis et des parents, devraient reprendre plus rapidement que les voyages d’affaires », estime le rapport. Les perspectives les plus positives concernent l’Afrique et le Moyen-Orient, « la majorité des experts prévoyant une reprise en 2020 », tandis que celles sur les Amériques sont les plus pessimistes, avec une reprise perçue comme difficile pour 2020. Pour l’Europe et l’Asie, « les perspectives sont mitigées, la moitié des experts prévoyant une reprise au cours de cette année ».