Votée à l’unanimité le 23 juillet au Conseil de Paris, la mise en place de la gratuité des transports en commun pour les Parisiennes et Parisiens de moins de 18 ans est une excellente nouvelle. En plus d’être une avancée pour la gratuité, dont les expériences se multiplient et sont systématiquement une réussite, cette mesure est un outil indispensable de lutte contre les fractures sociales et territoriales. Mais justement. Nous aussi, nous voulons la gratuité pour nos jeunes Francilien·nes. Nos départements et communes sont nombreuses à aider et subventionner le transport des adolescent·es, indispensable pour se rendre sur son lieu d’étude, de travail ou effectuer des entretiens – sans parler de l’importance de l’accès aux lieux de loisirs, de culture et d’équipements sportifs. Mais à la différence de Paris, nous n’avons pas les moyens de leur proposer, seuls, la gratuité.
Nous n’en avons pas les moyens, car faire supporter les subventions aux échelons les plus petits revient à faire payer nos habitant·es, dont les moyens sont largement inférieurs aux revenus médians des Parisien·nes. Les politiques de transports sont une compétence régionale, c’est donc à la région de payer pour la gratuité de tou·tes les Francilien·nes.
En réalité, sans élargissement sur toute l’Ile-de-France, cette mesure sociale accentuera les inégalités financières entre Parisien·nes et banlieusard·es. Paris ne peut plus penser sans regarder au-delà du Périphérique. Nombre de parents qui font vivre Paris, en y travaillant et y dépensant, n’ont même plus les moyens de s’y loger et financent indirectement des politiques avantageuses auxquelles ils ne peuvent accéder.
Nos jeunes écolier·es, collégien·nes, lycéen·nes, apprenti·es sont d’ailleurs celles et ceux qui ont le plus à se déplacer pour accéder à leur lieu d’étude ou de travail, mais sont aussi les moins bien desservi·es, les plus éloigné·es et donc les plus susceptibles de choisir la voiture dès qu’ils le pourront. Pour décarboner l’Ile-de-France, offrir la gratuité à cette génération de Francilien·nes est indispensable. Au lieu de cela, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France et d’Ile-de-France Mobilités, n’a eu de cesse depuis son élection d’augmenter à tout-va les tarifs des abonnements et des tickets de transport.
Selon les derniers chiffres de l’Insee, il y avait 1 061 313 jeunes de 11 à 17 ans résidant en Ile-de-France en 2017. Leur offrir la gratuité – sur la base du forfait imagine R à 350 euros par an – aurait un coût maximal de 371 millions d’euros. Le budget annuel de plus de 10 milliards d’euros d’Ile-de-France Mobilités le permet.
Non seulement nous en avons les moyens, mais nous sommes également prêt·es à participer à un effort collectif de financement solidaire, à condition de répartir justement selon le nombre d’usagers croisé au revenu moyen par habitant de nos collectivités respectives.
L’Etat doit également y prendre toute sa part. Alors qu’Emmanuel Macron est en train de dérouler les mesures de la Convention citoyenne pour le climat qui appelle notamment à «généraliser les mesures tarifaires attractives déjà pratiquées par certaines régions», qu’attendons-nous pour effectuer un double coup social et écologique ?