(RDCongo), 02 mars 2013 (AFP) – L’armée congolaise a repris l’initiative dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) profitant des dissensions au sein du mouvement rebelle M23, une semaine après la signature par les pays de la région d’un accord pour permettre le retour de la paix.
La ville de Rutshuru, chef-lieu du territoire du même nom situé au nord de Goma (est) où le Mouvement du 23 mars (M23) régnait en maître depuis juillet dernier, a été occupée sans combat vendredi soir par l’armée comme le bourg voisin de Kiwandja.
Selon des habitants interrogés par l’AFP, les militaires ont été bien accueillis dans des villes abandonnées la veille par les rebelles engagés dans des combats avec une autre faction du mouvement.
Dans le but de resserrer son dispositif militaire, Jean-Marie Runiga, l’ancien président politique du mouvement, a dû abandonner les deux villes afin d’aller affronter au nord de la zone les hommes du général Sultani Makenga, chef de la branche armée du M23.
Selon une source occidentale, les combats, qui ont duré jusqu’à l’aube de vendredi, auraient fait une trentaine de morts.
Ces affrontements faisaient suite à la révolution de palais qui a agité le M23 au début de la semaine. Jean-Marie Runiga aurait tenté d’entraîner le mouvement vers une reprise des hostilités et une nouvelle occupation de Goma, la capitale régionale du Nord-Kivu. Mercredi, Sultani Makenga, favorable à une stabilisation, a annoncé sa destitution, l’accusant de “malversation financière, de division, de haine ethnique, d’escroquerie, de manque de professionnalisme et d’éthique politique”.
Surtout, il l’accuse de soutenir le général mutin Bosco Ntaganda, recherché par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Dès sa création en mai, le M23 a réfuté tout lien avec le général Ntaganda, mais selon l’ONU et des ONG, il joue un rôle clé dans la rébellion.
Runiga a lancé ses troupes dans une contre-offensive avec l’aide d’un ancien adjoint de Makenga, Baudouin Ngaruye. Cette action ne semble pas avoir tourné en sa faveur. Selon le M23, il s’est maintenant réfugié dans le parc des Virunga avec Ntaganda.
Dans un communiqué transmis vendredi soir, le mouvement a appelé tous les soldats “désabusés par l’aventure du tristement célèbre trio” Ntaganda-Runiga-Ngaruye à regagner leurs unités.
Makenga, interrogé samedi par l’AFP, s’est dit “surpris” d’avoir vu les FARDC rentrer dans Rutshuru et Kiwandja. “Nous n’allons pas tolérer cela”, a-t-il dit. “C’est en violation du règlement intérieur de la réunion qui se déroule à Kampala qui stipule que les deux parties doivent garder leurs positions”.
Le M23 et le gouvernement congolais sont réunis depuis trois mois à Kampala sous l’arbitrage du gouvernement ougandais en vue de mettre un terme à leur antagonisme. Le M23 avait exigé cette réunion en échange de son retrait de Goma qu’il avait occupée pendant une dizaine de jours fin novembre.
Ces discussions avancent difficilement et se sont arrêtées jusqu’à présent au constat des carences dans l’application de l’accord du 23 mars 2009 sur l’intégration dans l’armée des groupes armés dont le Congrès national pour la défense du peuple, une rébellion dont sont issus de nombreux membres du M23, y compris les généraux Makenga et Ntaganda.
L’application de cet accord est à l’origine de la création du M23 en mai. Depuis, le mouvement – soutenu par l’Ouganda et le Rwanda, selon la RDC et l’ONU, ce que les deux pays nient farouchement – a infligé défaite sur défaite à l’armée gouvernementale.
Le fait que cette situation perdure a amené le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon à présider le 24 février à Addis Abeba la signature d’un accord-cadre sur l’instauration de la paix dans l’est de la RDC. Onze pays, les voisins de la RDC et l’Afrique du Sud l’ont signé. Il prévoit notamment l’interdiction de toute aide aux mouvements rebelles mais aussi une poursuite des reformes des institutions congolaises.
Les Nations unies devraient adopter prochainement une résolution plus contraignante et mettre sur place une force d’intervention de 2.500 hommes susceptible d’imposer la paix.
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