Quinze ans de présence diplomatique, politique, policière et militaire ne semblent pas avoir été suffisants à la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation de la République démocratique du Congo (Monusco) pour imaginer son désengagement. Pour beaucoup d’observateurs l’ampleur des ressources humaines(22.016 personnes) et financières mobilisées contraste avec les résultats obtenus jusqu-aujourd’hui sur terrain. Ce personnel disposait d’un budget évalué à 1,490 milliard de dollars. En 2011, la force onusienne était estimée à 18.914 unités dont 16.819 militaires, 741 observateurs militaires et 1.354 policiers. Toujours en 2011, la Monusco avait déployé sur terrain 981 civils internationaux, 2.827 civils locaux et 616 volontaires. Ainsi, s’est développée une véritable communauté singulière dans un Etat et dont les membres proviennent de près de 60 nations ! La Monusco est l’opération de maintien de la paix la plus coûteuse au monde. Chaque année, elle consomme au moins un milliard de dollars américains.
En cette année 2014, selon les sources proches de la mission onusienne, la tendance du budget est à la hausse avec le déploiement, en 2013, de la Brigade spéciale d’intervention forte de 3.600 hommes. C’est cette dernière « machine de guerre » (comptant chars T-55 et véhicules de combat d’infanterie BMP-2, artillerie de Mi-35 de l’armée ukrainienne, 3 Denel AH-2 Rooivalk de la force aérienne sud-africaine, des drones) qui a eu raison de la rébellion du M-23 en novembre 2013.
Préparer les activités de stabilisation
Pour le conseil de sécurité cette brigade est chargée de « neutraliser tous les groupes armés, de ‘Est du pays. Cela en vue de minimiser leur menace sur l’autorité de l’Etat et la sécurité des civils dans la partie orientale du pays et de préparer le terrain pour les activités de stabilisation ». Tout cela peut aussi expliquer les différents succès que l’armée nationale congolaise est en train d’obtenir face aux groupes armés récalcitrants et récidivistes constitués des Ougandais et des Rwandais, notamment la LRA et les FDLR. De son coté, la Monusco n’a cessé de rappeler la responsabilité de la République démocratique du Congo, sur la sécurité des personnes se retrouvant sur son territoire .
Par ailleurs, eu égard aux pesanteurs que font peser ces groupes armés irréguliers dans l’Est de la république, la Monusco a décidé, , de renforcer sa présence dans cette partie du pays. Dans certains milieux congolais, cela n’a pas été facilement compris, surtout dans un environnement très propice aux discours proches de la balkanisation. Mais, pour la mission onusienne, « le renforcement de sa présence à l’Est ne signifie pas diminution d’effectifs, mais, en tout état de cause, le d»sangagement est unévitable . Il s’agit d’aider l’Etat congolais à retrouver sa souveraineté dans la partie Est du pays, de faire en sorte que toutes les institutions nationales, dans cette partie, fonctionnent correctement. Dès que nous aurons cette certitude, la MONUSCO terminera son mandat de maintien de la paix, et, suivront, alors, des questions de développement dont se chargeront les agences, les fonds et programmes des Nations Unies, comme c’est le cas dans d’autres pays du monde. »
La question du désengagement reste d’actualité. En juin 2010, Kinshasa avait même obtenu le départ de 2.000 Casques bleus. Mais cela n’a pas arrêté le renforcement des contingents de la mission onusienne, eu égard aux points chauds qui n’ont cessé de se multiplier dans le pays, en mettant en danger la vie des centaines de milliers de civils. En fait, ce sont deux résolutions fortes du conseil de sécurité (1756 et 1856) qui ont clairement consacré la protection des civils comme « la priorité absolue ». Dès lors, comme l’instabilité est encore vivace dans certains territoires des provinces de l’Est du pays et que cela contraint les civils à des incessants déplacements, s’ils n’y perdent pas leur vie, le maintien de la MONUSCO s’avère opportun et crucial, surtout que le processus de réformes conduites au sein de l’armée et de la police nationales n’est pas encore en mesure de répondre à ces multiples besoins. A la mission onusienne, il est clair qu’en tout état de cause, le départ de leurs forces de la RD-Congo sera « progressif ».
MONUSCO : un laboratoire de la paix
Pour rappel, c‘est en décembre 2002 que la résolution 57/129 du conseil de sécurité des Nations unies a exhorté tous les pays du monde à rendre ainsi « hommage à tous les hommes et toutes les femmes qui ont servi dans les opérations de maintien de la paix, en raison de leur niveau exceptionnel de professionnalisme, de dénouement et de courage, et pour honorer la mémoire de ceux qui ont perdu la vie au service de la paix ».
En somme, la Monuc/Monusco est une exception de par le monde. Selon plusieurs spécialistes , cette mission « a été, tout au long de son histoire, un laboratoire de la paix :une grande pourvoyeuse d’enseignements et d’expériences au secrétariat des Nations unies. Depuis 1999, son histoire se confond avec celle du conflit congolais. Du fait de la situation extrêmement complexe du Congo, elle est devenue une mission polyvalente, de consolidation de la paix en organisant les élections, en participant à la réforme du secteur de sécurité, aux programmes de démobilisation,…mais aussi de la reconstruction de l’Etat en se préoccupant d’appuyer le retour à l’Etat de droit ». Parmi les expériences enrichissantes de cette mission figure notamment la « Radio-Okapi » devenue la radio la plus écoutée dans le pays ou encore la participation à la consolidation des systèmes de traçabilité des minerais dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu où « cinq comptoirs » doivent être opérationnels (résolution 1906 du conseil de sécurité de l’ONU). Cependant, et cela entre dans une autre dimension, tout cela n’a pas empêché à certains des agents de la mission de verser dans des « abus d’exploitation sexuelle » ; au total, ce sont 140 cas alors allégués. De facon générale, pour beaucoup d’analystes et observateur, la monusco va ceratiement changer l’histoire des missions des nations unies à travers le monde.