Le ministère de la Santé a voulu, avec des sorties médiatiques, montrer à l’opinion qu’il veillait à la régulation de ce circuit. Les faits sur le terrain démontrent le contraire. Pullulent, dans le pays, officines et pharmacies qui offrent des médicaments au mépris des normes établies.
Le pharmacien, principal acteur dans ce domaine, a perdu sa place dans le système. Pourtant, le décret-loi de 1991, est clair : « ne peut exercer, dans le secteur de la pharmacie, que celui qui figure sur le tableau de l’ordre». En 2014, seuls, 1.433 pharmaciens sont inscrits sur le registre, c’est-à-dire un professionnel pour plus de 50.000 habitants. La norme situe le maximum d’individus, concernés par une couverture, à 20.000.
Cette insuffisance d’effectifs, au niveau national, se double d’une inégalité de répartition dans le pays. 60% des pharmaciens sont basés à Kinshasa qui n’héberge que 10% de la population. Des provinces accusent une insuffisance du personnel spécialisé. Le Bas-Congo, entre autres, n’a que dix pharmaciens, pour près de 59 structures sanitaires publiques et 17 hôpitaux privés.
Des précautions
La gestion du médicament requiert des précautions bien définies, entre autres, au niveau des infrastructures : 45 m2 au moins pour une officine, avec bureau du pharmacien, rayon des médicaments et équipements sanitaires ; 150m2, pour un dépôt devant disposer de cinq locaux différents servant de lieu d’entreposage, de rayons des produits, de service de comptabilité, de bureau du pharmacien. Au-delà de ces exigences logistiques, un accent particulier doit être mis au circuit d’approvisionnement. A ce niveau, le non-engagement financier significatif de l’Etat congolais fragilise l’intégration des acteurs nationaux dans le processus, le circuit d’approvisionnement en médicaments dépendant largement de l’extérieur. La traçabilité en prend un sérieux coup. Le dernier rapport du ministère de la Santé signale que, seuls, 63% de partenaires sont en mesure de fournir des données financières fiables, concernant leurs opérations d’achats. Or, ces éléments d’information sont déterminants, pour un pays qui compte 515 zones de santé, plus ou moins 7. 868 centres de santé, 434 hôpitaux généraux de référence, 57 hôpitaux nationaux, 4 hôpitaux universitaires, 32 hôpitaux spécialisés et des structures assimilées.
En 2014, seuls, 1.433 pharmaciens sont inscrits sur le registre, c’est-à-dire un professionnel pour plus de 50.000 habitants
Disposant d’un Système national d’approvisionnement en médicaments essentiels (SNAME), pour mettre en œuvre la Politique pharmaceutique nationale (PPN), le pays organise ses achats en médicaments, par le biais de deux grandes agences basées à Kinshasa et à Goma. Ces dernières assurent la distribution au niveau de différentes provinces. La cartographie de dispatching est à ce sujet complexe et sous-tendue par une toile de 19 agences et 99 circuits de distribution. Mais, l’on note que 85% des partenaires n’utilisent pas ces points focaux dans l’exercice de leur métier. La Direction de la pharmacie et du médicament (DPM) n›a ainsi aucune garantie que les produits achetés et importés ont une autorisation de mise sur le marché, conformément à la réglementation pharmaceutique, et aux normes de certification de la directive OMS sur les dons en médicaments.
Au niveau du secteur privé, le système est également incontrôlable. L’approvisionnement et la distribution des médicaments sont assurés, en gros, par des opérateurs grossistes, et, en détail, par des pharmacies privées, des cliniques et hôpitaux ainsi que des ONG et des structures confessionnelles. Tout ce marché n’est pas totalement régulé, depuis des décennies, par la puissance publique. Cette dernière ne peut fournir des données soutenables concernant l’identité des grossistes et détaillants en pharmacie, ou leur financement.