Les compagnies de téléphonie mobile enregistrent des plaintes récurrentes de la part de leurs clients, qui s’indignent d’avoir perdu des unités sans avoir téléphoné. Un réseau parallèle serait à la base de ce désagrément.
Depuis un certain temps, les réclamations des clients de certaines sociétés de téléphonie cellulaire s’accumulent. De manière systématique, ils se plaignent de perdre leurs unités alors qu’ils n’ont composé aucun numéro. Une cliente affirme avoir reçu un appel international. Au bout du fil, quelqu’un lui demande de le rappeler d’urgence. Ce qu’elle fait. Mais, personne ne décroche. En raccrochant, elle constate avec surprise qu’elle n’a plus d’unités. Une autre personne dit avoir lu ce message sur son téléphone : « Rappelez-moi pour une urgence vous concernant, s’il vous plaît. » Quand elle rappelle, le même scénario se produit : personne au bout du fil pour décrocher, mais 2 000 unités perdues. Les opérateurs reconnaissent avoir enregistré des réclamations de perte injustifiée d’unités ces dernières semaines. Mais ils se disent impuissants car leurs techniciens ne parviennent pas encore à démanteler ces réseaux ni à mettre la main sur les présumés auteurs de ces méfaits, à en croire un agent du service client chez Vodacom. Le contrôle des appels est du ressort de l’Agence de régulation des postes et télécommunications (ARPTC) où un technicien pointe du doigt le phénomène Sim Box, ce boîtier électronique qui compte plusieurs cartes sim. Il peut gérer jusqu’à un million de minutes par mois et fonctionne avec un équipement complet de télécommunications qui comprend, notamment, un routeur et une antenne relais communément appelée BTS, explique un expert de l’ARPTC. En RDC, certains réseaux maffieux s’en servent pour trafiquer les appels des opérateurs de téléphonie mobile. En 2011, cette arnaque a attiré beaucoup de délinquants dans le secteur. Ils piratent le réseau téléphonique et récupèrent les crédits sur les appels internationaux. Selon le ministère des Postes, téléphones et Nouvelles technologies de l’information et de la communication, ces fraudeurs faisaient apparaître les appels internationaux sous l’indicatif du pays, et vice versa. Le boîtier électronique permet donc de se soustraire à la tarification normale et aux taxes en vigueur au pays. Le ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba affirmait, en 2013, avoir démantelé et mis hors d’état de nuire des malfaiteurs à Kinshasa. Ils contribuent à la baisse de la qualité des communications et font perdre, chaque mois, plusieurs millions de dollars au Trésor public, selon lui. Pour résoudre le problème, un consortium franco-américain, Agilis International et Entreprise Telecom avait été chargé de mettre en place un dispositif de lutte contre la fraude qui a permis au Trésor public de réaliser un bénéfice mensuel d’au moins 12 millions de dollars, avait annoncé Kin-kiey Mulumba en février. Il est difficile, selon les experts, de travailler avec la Sim Box sans certaines complicités au niveau politique et administratif. D’après eux, les autorités ne s’inquiètent jamais face à l’importation des équipements Sim Box. D’ailleurs, les sites qui abritent les antennes V-Sat et d’autres matériels utilisés par les pirates sont connus. Il s’agit notamment des Immeubles Sozacom, Botour et de la Presse à Kinshasa. Le système fonctionne grâce à la connexion Internet et aux cartes sim qui sont achetées auprès des opérateurs de téléphonie mobile classiques. Cela signifie que ce crime permanent est commis avec des complicités internes et externes, nationales et internationales. C’est du moins l’avis de Kin-kiey Mulumba.