Rouler dans la capitale congolaise n’est pas une mince affaire. Et c’est un miracle si, chaque jour, on ne déplore pas un nombre impressionnant d’accidents sur les routes kinoises où le code de la circulation est méconnu.
Malgré les vacances et les fêtes de fin d’année, les artères de Kinshasa n’ont pas échappé à la routine : des véhicules qui vont dans tous les sens, des embouteillages chroniques causés, dans certains cas, par des véhicules en panne et que personne ne vient enlever pendant deux ou trois jours, des nids de poule et des trous béants, des vendeurs à la criée de journaux, de mouchoirs en papier ou d’eau en sachet qui slaloment, mettant leurs vies en danger, des noms d’oiseaux à l’envi… En un mot : le chaos. À une heure de pointe, les chauffeurs de deux taxi-bus, deux véhicules déglingués, qui devraient être à la casse, les fameux « Esprits de mort », des Mercedes 207, se disputent le passage pour pouvoir embarquer des passagers sur une voie à sens unique. De loin, cinq policiers ont suivi la scène. Ils traversent rapidement la chaussée et arrêtent l’un des deux conducteurs. L’autre, ayant senti le danger venir, a filé à toute vitesse, en abandonnant quelques clients sur la chaussée. « Arrêtez le moteur et exhibez vos documents ! », tonne l’un des agents à l’adresse du chauffeur, qui ne s’exécute pas. Le policier réitère son injonction en menaçant d’arrêter lui-même le moteur. Les passagers impatients et agacés, descendent un à un. Le taxi-bus se vide en un clin d’œil, ce qui permet aux agents de l’ordre de s’installer sur les sièges avant. Le chauffeur ne bronche toujours pas. Le vrombissement du moteur perdure. Derrière, des conducteurs impatients klaxonnent à tue-tête. La circulation est bloquée.
Entre-temps, les motocyclistes, enhardis, jouent aux héros, dépassent à gauche, à droite sans s’embarrasser, au nez et à la barbe des policiers concentrés sur le cas du chauffeur « obstiné » qui, soudain, met fin au suspense, libère la voie, trouve un arrêt et éteint le moteur sous bonne garde. Après une longue discussion, l’homme lance au plus gradé des agents de l’ordre : « Mokonzi, solola basolola yo », ce qui veut dire, littéralement : « Chef, aidez- moi à vous aider.» Après le message codé, deux des policiers descendent de l’ « Esprit de mort » et se concertent. Cinq minutes plus tard, le chauffeur murmure à l’oreille de son receveur. Celui-ci prépare quelques billets de banque en les pliant dans sa main droite, qu’il tend à l’un des policiers. Cela s’appelle, pour les initiés, « mbote ya likasu ». L’agent les glisse dans sa poche. Le chauffeur repart sous les regards amusés des badauds, son taxi-bus à moitié vide.
Un peu plus loin du rond-point Moulaert précisément au marché Bambole, à 100 mètres du Centre de rééducation et pénitencier de Kinshasa, ex-Prison de Makala, un quartier populeux, avec une chaussée très étroite, un autre chauffeur est arrêté pour mauvais stationnement. Il est vite conduit au poste de police, c’est-à-dire dans un conteneur, où il paye une amende transactionnelle de 25 dollars. Pour le commandant du poste, « vu le manque des succursales de la Direction générale des recettes administratives, judiciaires et domaniales (DGRAD) à Kinshasa en général et à Bandalungwa en particulier, les autorités nous ont chargés d’encaisser ces amendes moyennant reçu.»
Un chauffeur kinois expérimenté parle, sens se gêner de son ignorance du code de la route : « Je connais les quatre coins de la ville mais, jusqu’à présent je ne connais pas encore le code de la route. Je n’ai plus le temps d’aller dans une auto-école. Mais je fais tout pour éviter les accidents. C’est le plus important pour moi ». Il n’est pas le seul à avouer son ignorance.
À en croire un officier de police, « la méconnaissance du code de la route est à la base des malentendus entre les policiers chargés de la circulation de la route. » Il propose aux auto-écoles « d’organiser des séances de recyclage à l’intention des conducteurs afin de réduire sensiblement le taux des accidents de la circulation à Kinshasa ».
À cette problématique du code de la route s’ajoute celle de la délivrance du permis de conduire. Pour l’Association des chauffeurs du Congo (ACCO), cela est du ressort des auto-écoles qualifiées et agréées par l’État après une formation adéquate et non par des mains de tiers. Conclusion: « Toute personne physique ou morale qui délivre ce document en dehors d’une structurée spécialisée est un faussaire et doit être arrêtée pour subir la rigueur de la loi. »
Amendes transactionnelles applicables pour les infractions au code de la route payables à la DGRAD.
- Abandon de véhicule sur la voie publique : 20 dollars
- Changement brusque de bande : 20 dollars
- Clignotant continu : 20 dollars
- Défaut d´avertisseur : 20 dollars
- Défaut de casque de protection : 20 dollars
- Défaut de feu clignotant : 20 dollars
- Défaut d´essuie – glace : 20 dollars
- Défaut de rétroviseur : 20 dollars
- Exposition de personnes au danger : 20 dollars
- Embarquement et débarquement de personnes sur la voie publique : 20 dollars
- Incommodité de fumée nocive : 20 dollars
- Non- intention de virer à gauche ou à droite : 20 dollars
- Non- respect du signal de stop : 20 dollars
- Ralentissement non motivé : 20 dollars
- Mauvais arrêt ou mauvais stationnement : 25 dollars
- Mauvais dépassement : 25 dollars
- Refus d´exhiber les documents de bord : 25 dollars
- Défaut de pare-brise : 25 dollars
- Défaut de freins : 30 dollars
- Freinage brusque ou de circulation : 30 dollars
- Non- respect de la place sur la chaussée : 30 dollars
- Non – respect de la distance entre deux véhicules : 30 dollars
- Passagers de moins de 12ans au siège avant du véhicule : 30 dollars
- Refus de priorité : 30 dollars
- Mauvaises manœuvres de croisement ou de dépassement : 35 dollars
- Non – respect de sens, de marques au sol et de lignes continues : 35 dollars
- Non – respect de sens de la circulation ou de sens obligatoire : 35 dollars
- Permis de conduire expiré : 35 dollars
- Portière ouverte pendant que l´engin roule : 40 dollars
- Défaut de permis de conduire : 40 dollars
- Non- respect de signaux routiers : 40 dollars
- Refus de céder le passage : 40 dollars
- Refus d´obtempérer aux injonctions de l´agent qualifié : 40 dollars
- Défaut d´assurance : 50 dollars
- vresse au volant : 50 dollars
- Absence de plaques d´immatriculation : 50 dollars
- Excès de vitesse+ délit de fuite + enlèvement : 60 dollars
- Absence de carte rose ou faux et usage d´une fausse carte rose : 70 dollars
Source : Document officiel de la Police de circulation routière, 2012.