Depuis quelques années, de nouvelles banques voient de plus en plus le jour sur le continent, occupant ainsi un terrain que délaissent beaucoup de leurs consœurs étrangères. Leur progression est constante, mais il leur reste encore des secteurs à conquérir.
Le développement rapide des banques locales pousse le secteur bancaire africain à se recomposer. Si le potentiel de ce secteur est encore largement inexploité, c’est parce que les nouveaux établissements n’ont pas assez de ressources et que les banques internationales rechignent à s’impliquer davantage. Le secteur bancaire du continent a été, au cours de la dernière décennie, l’un des plus dynamiques au monde. Tout en affichant des taux de croissance record. Il s’est largement restructuré et assaini contrastant avec la situation ayant conduit aux crises systématiques à répétition du début des années 1990.
Un renforcement des acteurs locaux
Phénomène moins visible mais tout aussi réel, les acteurs du secteur ont également changé. Alors que le paysage bancaire était autrefois dominé par les établissements étrangers, les acteurs locaux apparus dans les années 1980 se sont renforcés rapidement jusqu’à occuper aujourd’hui le devant de la scène. Ces banques locales, qui ont alimenté leur croissance en développant certains segments de clientèle ignorés par les banques étrangères, notamment les Petites et moyennes entreprises (PME) et la clientèle individuelle, ont aujourd’hui atteint une taille leur permettant de concurrencer les banques internationales sur leurs marchés, en particulier celui des grandes entreprises. Leurs parts de marché ont ainsi rapidement progressé.
Réduire la concentration dans les pays d’origine
Cette évolution est naturelle dans la mesure où les banques locales n’ont d’autre choix que de croître pour continuer d’exister, et que les marchés locaux sont leurs seuls relais de croissance. En effet, à cause de la nécessité de développer des rendements d’échelle afin d’être compétitives, elles doivent atteindre une certaine taille pour être en mesure de diversifier leurs risques, à la fois sectoriels, en réduisant la concentration dans leurs pays et en ouvrant des filiales ailleurs. La situation est différente pour les banques internationales pour qui la croissance sur les marchés locaux demeure une option et non une nécessité. Bien que ces marchés soient très rentables, les banques étrangères sont davantage sensibles aux risques et à la qualité de l’environnement et des affaires qui est de plus en plus en inadéquation avec leurs normes de fonctionnement et les contraintes imposées par les régulateurs de leurs pays d’origine. De plus, il devient difficile pour elles de se développer, car elles doivent pour cela pénétrer des marchés plus risqués comme les PME et la clientèle individuelle, alors que le principal relais de croissance des banques locales réside dans les segments plus faciles d’accès des grandes entreprises. Cette recomposition des forces en présence a un impact sur l’activité bancaire en Afrique.
Une meilleure compréhension des besoins
L’essor des banques locales permet tout d’abord d’accroître les taux de bancarisation comme on l’observe nettement depuis dix ans. Ces établissements ont en effet une meilleure compréhension des besoins des opérateurs économiques locaux et sont davantage en mesure d’innover pour adapter leur offre et pénétrer de nouveaux segments de marchés. D’autre part, la retenue dont font preuve les banques internationales fait peser un risque d’isolement sur le secteur bancaire africain. Au-delà de l’expertise et des ressources qu’elles apportent, les banques internationales demeurent indispensables pour financer les grands investissements, les opérations de commerce international et, de manière générale, pour faire le pont entre l’Afrique et les autres continents.
Des segments de marchés à explorer
Le secteur bancaire africain devrait continuer à offrir un potentiel important. Les taux de pénétration restent très bas, les niveaux de rentabilité sont parmi les plus élevés du monde et la compétition demeure dans l’absolu peu développée. Les perspectives de développement sont multiples : des segments de marchés entiers restent à explorer, comme le crédit immobilier, le financement de l’agriculture, la monétique… La plupart des financements importants échappent encore au secteur bancaire local comme les infrastructures, les mines, les hydrocarbures, le commerce international. Les synergies avec les autres acteurs du marché sont insuffisamment exploitées : les marchés boursiers, les fonds d’investissement, les fonds de garantie, les assurances, la micro-finance. Les réservoirs de croissance sont donc loin d’être épuisés. Néanmoins, pour exploiter ce potentiel, les banques africaines auront besoin davantage de ressources, et les banques étrangères davantage de confiance en l’Afrique.