Public et administration face à la lourdeur des procédures 

Dédouaner n’importe quel produit importé ressemble à un parcours du combattant pour le commun des Congolais. À la base de nombreuses tracasseries. Mauvaises pratiques ou ignorance des citoyens ?

Le port de Matadi dans le Bas-Congo.
Le port de Matadi dans le Bas-Congo.

Ils sont nombreux  les consommateurs et les entrepreneurs qui ne comprennent pas pourquoi ils doivent passer beaucoup de temps et dépenser de l’énergie devant les guichets pour dédouaner leurs biens. Et ils n’hésitent pas à parler de tracasseries de la part d’agents véreux, dont la seule préoccupation est de leur soutirer de l’argent en avançant des réglementations qui n’existent pas. Et cela coûte de plus en plus cher.

Simplifier les régimes et les formalités

Mais à la Direction générale des douanes et accises (DGDA), on pense plutôt que c’est la méconnaissance du circuit qui pousse certains à croire que la douane coûte cher. Pour un cadre de cette régie financière, plusieurs personnes font de l’amalgame lorsqu’elles parlent de la douane. « Par exemple, qui ne sait pas que pour dédouaner les petites voitures en provenance d’Asie, destinées au transport à Kinshasa, il faut payer seulement 400 dollars ? », questionne-t-il. Selon lui, les importateurs mettent toutes les taxes sur le dos de la DGDA, alors que la douane elle-même n’est pas onéreuse. Peut-être que, reconnaît un autre agent, l’État devrait simplifier davantage les formalités et régimes applicables aux produits importés. Évidemment, cela ne se fera pas sans conséquence parce que  la DGDA est le premier contributeur au budget de l’État à hauteur de 40%. Pour l’heure, dans un contexte  de croissance non-inclusive, l’objectif de maximisation des recettes peut connaître quelques difficultés.

Méconnaissance

La taxation douanière n’est pas une matière simple pour le citoyen lambda.  Elle est fonction de la nature  de la marchandise. « Il y a des conteneurs pour lesquels on paye 15, 16 voire 17 000 dollars. Tout dépend de ce qui est importé », explique un brigadier de la DGDA. Dans le but d’éviter les tracasseries et de réduire  les formalités douanières, l’administration a ouvert des guichets uniques où travaillent les agents de la DGDA et ceux de l’Office congolais de contrôle (OCC). Le dédouanement peut se faire en quatre jours. Sur place, tout commence par le service qui s’occupe de la saisie des documents et où l’on attribue un numéro au dossier de l’importateur. « Une fois l’étape de la DGDA passée, le dossier monte à l’OCC qui vérifie si ses 2 % de la valeur CIF, les 2 % de pénalité et les 16 % de la TVA sont bien respectés », d’après un agent de l’OCC qui précise que l’étape qui suit le paiement de tous les frais à la banque est la vérification au niveau du dépôt de la conformité par les agents chargés de l’échantillonnage.

Une multitude de taxes

C’est à la DGDA qu’il y a plusieurs types de perception et l’application de différents taux. Il s’agit, entre autres, des droits et taxes à l’importation ; des droits et taxes sur le chiffre d’affaires à l’importation ; des droits  et taxes à l’exportation ; des droits d’accises à la production locale et des droits de consommation à l’importation. Le tarif pour ce qui des droits et taxes  à l’importation comporte une structure à trois taux : 5 %, 10 % et 20 %. Les produits alimentaires de grande consommation,  les intrants industriels et les pièces de rechange sont assujettis au taux de 10 %. Les matières premières brutes, le matériel informatique, le lait et ses dérivés ainsi que les intrants pharmaceutiques sont taxés au taux de 5 %.  D’autres taux sont également  pratiqués pour des droits d’accises et de consommation.

Les auxiliaires et les ignorants 

C’est depuis le 20 août 2010 que le nouveau code des douanes a été publié mais son contenu n’est pas connu du public. Pourtant, ce document facilite et simplifie les procédures douanières et apporte beaucoup d’innovations. Parmi les nouveautés introduites mais ignorées du grand public, il y a pour toute personne la consécration du droit d’accomplir par elle-même les actes et formalités prévus par la législation douanière.  Les mesures de lutte contre la corruption sont aussi une innovation qu’apporte le nouveau code douanier, les commissionnaires et déclarants en douane  n’hésitant pas de profiter de l’ignorance de certains opérateurs économiques. Bien souvent, les déclarants disent à leurs clients qu’il ne leur est pas permis de connaître le circuit douanier. D’autres encore soutiennent que l’on ne peut pas expliquer comment on déclare les marchandises vu qu’il s’agit d’un cours qui ne peut être dispensé séance tenante. Un employé d’une agence en douane  affirme que les déclarants sont considérés comme les avocats des importateurs. « Il n’y a que les déclarants pour connaître  le circuit de dédouanement et travailler à la place de l’importateur qui ne doit payer que les honoraires », souligne-t-il.

Des déclarants qui « dribblent » les agences

Tout opérateur économique qui veut être commissionnaire en douane ou ouvrir une agence est tenu, selon la loi, de payer une caution de 100 000 dollars. Toutes les agences en douane doivent être reconnues à la DGDA où on leur attribue des numéros d’identification. C’est le ministre des Finances qui agrée les agences en douane  après que la commission d’agrément ait donné son avis. En vue de bien faire  valoir leurs droits, les commissionnaires en douane se sont regroupés au sein d’une  association. Quelquefois,  il y a la guerre entre eux et les déclarants debout.  Les commissionnaires en douane accusent souvent les déclarants debout  de  détourner leurs clients par des moyens frauduleux, y compris en utilisant des cachets des agences agréées. Dans le souci de bien revendiquer leurs droits, les déclarants debout se sont aussi organisés en une plate-forme, le Collectif des douaniers de Kinshasa (Codekin).