Les dommages causés à l’environnement par l’or noir sont devenus un fléau en RDC. Les ministères de l’Environnement et du Développement durable, des Hydrocarbures et de l’Économie nationale, qui veulent prendre le taureau par les cornes, constatent que depuis quarante ans le pays, peine à formuler une véritable politique en la matière.
Les ministères de l’Environnement et du Développement durable, des Hydrocarbures, de l’Economie nationale, des Transports et voies de communication ont organisé, fin juillet à Kinshasa, « une matinée sur les techniques de lutte contre les pollutions pétrolières dans les milieux marins et côtiers en République démocratique du Congo ». Objectif : la réduction et l’élimination des pollutions pétrolières dans le cadre institutionnel et opérationnel, tel que tracé par le gouvernement à travers son Plan national d’intervention d’urgence contre la pollution pétrolière en RDC (POLMAR). Préserver l’environnement et la biodiversité À en croire les organisateurs, cette rencontre a offert aux opérateurs pétroliers, maritimes, portuaires et miniers, l’opportunité d’expérimenter les nouvelles techniques et les nouveaux produits utilisés dans la lutte contre les pollutions pétrolières, en vue de préserver l’environnement et la biodiversité. Plus d’une cinquantaine de personnes provenant, notamment, du gouvernement, du Parlement, de la société civile ainsi que des sociétés pétrolières, portuaires et minières étaient au rendez-vous. Le directeur chef de service des Ressources en eaux au ministère de l’environnement et coordonnateur national du Plan Polmar, Jean-Paul Nyemba, a fait l’état des lieux sur « la pollution pétrolière et ses impacts dans les milieux marins et côtiers de la RDC ». Pour sa part, Georges Nico Laides, un expert dans les opérations pétrolières, a planché sur les techniques de lutte contre la pollution pétrolière et l’évaluation du produit Clean Mag dans l’Union européenne ». Deux représentants des entreprises pétrolières Perenco et SOCIR ont partagé leurs expériences respectivement sur « la stratégie de gestion de la pollution pétrolière » et « la gestion de la pollution pétrolière ». Menace sur les côtes et le fond marin Selon les services compétents, l’espace congolais le plus menacé couvre une superficie de 840 600 km², allant de 40 km de fenêtre ouverte sur l’océan Atlantique par le fleuve Congo jusqu’aux confins des eaux internationales. Pour y faire face, les services congolais se veulent pragmatiques en réitérant l’urgence de dégager des solutions durables d’ordre administratif et réglementaire, légal et politique, technique et scientifique. Cependant, une inquiétude pointe à l’horizon. En effet, la pollution pétrolière ruine les perspectives des côtes et du fond marin congolais, qui sont habités par certaines espèces uniques au monde dont les oiseaux, les tortues et les reptiles, mais aussi les plantes. À ce jour, les technologies traditionnelles de lutte contre la pollution pétrolière ont montré leurs limites en raison, notamment, des conditions météorologiques et techniques. D’autres procédés auraient fait leurs preuves ailleurs. C’est le cas du Clean Mag qui consiste à assurer le nettoyage des nappes pétrolières par le magnétisme. Il s’agit d’une technique agréée conjointement par les ministères de l’Environnement, de l’Économie nationale et des Hydrocarbures. Irresponsabilité du gouvernement En 2013, une commission sénatoriale d’enquête sur la pollution causée par l’exploitation pétrolière dans le Bas-Congo avait présenté un rapport accablant. Elle mettait en cause l’entreprise pétrolière Perenco Rep et déplorait « l’irresponsabilité » du gouvernement face à la pollution de la cité de Muanda. Sur place à Muanda, les sénateurs avaient prélevé des échantillons du sol, de l’air et de l’eau. Le rapport confirmait que l’air, le sol et les eaux de cette cité de la province du Bas-Congo étaient pollués. Il proposait notamment de collecter tout le gaz rejeté en l’air pour le traiter, le liquéfier et le mettre à la disposition de la population sous forme de gaz liquide qui serait utilisé comme énergie domestique. Depuis plus de quarante ans, le gaz poduit à Moanda est brûlé à la torche. « Clean Mag » Des décennies plus tard et trois ans après les griefs portés contre Perenco, le gouvernement a donc voulu donner le change et répondre à la menace maintes fois éludée. C’est à cette occasion que le ministre de l’Environnement a soumis, pour évaluation et appréciation, les nouvelles techniques de lutte contre la pollution. Mais aussi pour tester la validité des nouveaux produits anti-pollution dont on a remarqué l’absence totale des effets secondaires sur la biodiversité. En guise de technologie, Bienvenu Liyota Ndjoli a dévoilé un nouveau procédé appelé « Clean Mag », une technique présentée comme innovante de lutte contre la pollution pétrolière. Pour lui, le forum devait être une réponse aux préoccupations de la Commission sénatoriale sur la pollution à Muanda. Il a ainsi invité les responsables des sociétés pétrolières, maritimes et portuaires, des industries manufacturières à s’approprier cette initiative qui rencontre leurs intérêts et ceux du gouvernement dans la préservation de l’équilibre écologique, sans pour autant compromettre le développement économique de la RDC. Manque d’une politique appropriée Il a circonscrit le cadre de la tenue de cette réflexion qui visait l’évaluation des nouvelles techniques de lutte contre la pollution, d’une part, et de l’autre, tester la validité des nouveaux produits anti-pollution n’ayant pas d’effets secondaires sur la biodiversité. Le but était d’explorer les pistes de solutions en vue de réduire les pollutions par les hydrocarbures dans les milieux marin, côtier, fluvial et lacustre de la RDC. En un mot comme en mille, une véritable politique fait défaut en la matière. Une puissance environnementale Pour rafraîchir la mémoire des participants, le ministre de l’Environnement a rappelé que la RDC est un pays producteur de pétrole au cœur de l’Afrique. À ce sujet, il a expliqué que la providence a fait que le pays soit doté de ressources en eau, qu’il se trouve extrêmement exposé aux risques des pollutions anthropiques et de la navigation, de même qu’aux pollutions transfrontalières, à cause de la confluence, sur ses eaux côtières, des deux courants marins (Benguela et le Golfe de Guinée). Par souci de maintenir l’équilibre entre l’exploitation des hydrocarbures, les activités industrielles, portuaires et de transport maritime avec la biodiversité, sans oublier la santé publique, le ministère de l’Environnement veut s’investir dans la recherche des solutions durables. À ce titre, la RDC garde sa vocation de puissance environnementale dont la responsabilité est à la fois nationale et internationale. Problématique Parlant de la problématique de la pollution pétrolière, Bienvenu Liyota Ndjoli a évoqué la mobilisation faite par le Parlement, le gouvernement et la société civile autour de la pollution. Il a salué l’existence des techniques de lutte contre la pollution pétrolière dans les milieux marins et côtiers, des recommandations de la commission sénatoriale issues de son rapport sur la pollution de Muanda, qu’il est en train d’appliquer à la lettre. Par ricochet, il a affirmé exécuter les instructions du Premier ministre, Matata Ponyo sur la ratification des conventions internationales de protection de l’environnement marin. En outre, il a cité les Conventions Marpol, et plus particulièrement la Convention internationale de 1992 portant création d’un fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. C’est ainsi qu’il a évoqué l’élaboration d’un protocole d’accord avec les sociétés pétrolières, des transports maritimes et portuaires, pour mettre en place un cadre de concertation permanente visant la mise en œuvre du Plan Polmar. Certaines sociétés ont déjà signé ce protocole, pendant que d’autres hésitent. Pour sortir du statu quo, un appel a été lancé aux partenaires privés dans cette mission de prévention et de lutte contre les pollutions de toute nature qui altèrent l’environnement et retardent l’entrée de la RDC dans l’économie verte. L’exemple français Le Plan Polmar (pollution maritime) est un plan d’intervention français qui est déclenché en cas de pollution marine accidentelle. Il a été institué en 1978, à la suite de la catastrophe de l’Amoco Cadiz sur les côtes de Bretagne en France. Il sert à coordonner les hommes et à mobiliser les moyens de lutte. Ce plan comprend un volet marin et un volet terrestre. En réponse à un sinistre, des experts désignés aident les préfets concernés à prendre une décision, la plus consensuelle possible, entre ce qui est économiquement, politiquement, écologiquement acceptable et techniquement possible en tenant compte du contexte (saison/météo, polluant, usage..). Par leurs mises à jour, les plans Polmar changent selon la législation, l’évolution des connaissances, et les retours d’expérience d’accidents, dont ceux de l’Erika et du Prestige. qui ont montré le besoin d’une meilleure prise en compte de la vulnérabilité de l’environnement, de l’expertise écologique, de l’évaluation des impacts, ainsi qu’une amélioration continue des protocoles, produits et matériels de nettoyage/restauration. Le Plan Polmar constitue un plan d’intervention spécialisé, applicable en cas de pollution maritime majeure par hydrocarbures ou par produits chimiques, et résultant d’un accident ou d’une avarie maritime, terrestre ou aérienne. Il permet la mobilisation et la coordination des moyens de lutte de l’État, des collectivités territoriales, et des moyens privés, préalablement identifiés. Pétrole et pollution : laxisme ou complicité ? L’Assemblée nationale et le Sénat ont séparément diligenté, une commission d’enquête au large de Muanda, pour faire la lumière sur les allégations des ONG selon lesquelles l’exploitation pétrolière aurait causé d’énormes dégâts à l’environnement. Le rapport de la Chambre haute fait état d’une pétro-pollution aux conséquences incalculables pour l’écosystème. Conclusion : des recommandations sans réelle coercition. Ceci explique –t-il cela ? Les producteurs pétroliers de Muanda pèsent pour plus tiers d’un de contribution au budget national. Au dernier trimestre 2014, ils ont versé, malgré la dégringolade des cours du baril à l’international, quelque 21,9 millions de dollars au Trésor public. Pour le premier trimestre 2015, alors que le baril est à moins de 50 dollars, ils ont payé près de 30 millions de dollars à l’État, selon une note du 5 juin émanant du ministre des Finances, Henri Yav Muland. Les entreprises pétrolières en phase de production à Muanda sont, d’après l’Initiative pour la transparence dans l’industrie extractive (ITIE RDC) ; Perenco, Chevron ODS, Muanda International Oil Company, Lirex, Surestream et Teikoku Oil. Celle en phase d’exploration sont Soco, Surestream et Energulf. Et les taxes ou différentiels d’où l’État tirent ses recettes se déclinent en neuf actes, à savoir les royalties, les droits superficiaires annuels, l’impôt sur les bénéfices et profits, l’impôt spécial forfaitaire, le précompte BIC, les dividendes, le bonus de signature, la taxe de statistique et la marge distribuable (profit oil État associé). Quasiment rien, ni taxe ni redevance inhérente à l’environnement. La législation congolaise, en matière d’environnement, repose, essentiellement, sur le principe «Qui pollue, paie». Toutefois, une nouvelle loi a été élaborée à l’Assemblée nationale. Elle prévoit un régime répressif on ne peut plus sévère. Des dispositions contraignantes Par exemple, tout exploitant d’une unité au large, d’une installation de manutention d’hydrocarbures ou d’un navire qui ne dispose pas d’un plan d’urgence pour la lutte contre la pollution par les hydrocarbures est puni d’une amende de 8 à 40 milliards de francs constants soit autant qu’en dollars. L’amende sera plus lourde pour quiconque se livre, notamment, à l’enfouissement ou au déversement dans la mer territoriale ou encore dans tout autre espace maritime national de produits chimiques interdits ainsi que des déchets dangereux provenant de l’étranger : 16 à 40 milliards de francs constants plus 5 à 10 ans de servitude pénale. Selon des environnementalistes, au regard des dégâts que causent les marées noires, ces amendes ne sont que du menu fretin. La loi prévoit notamment que tout exploitant d’une unité au large, d’un port maritime, d’une installation de manutention d’hydrocarbures ou d’un navire dispose d’un délai ne dépassant pas une année à compter de l’entrée en vigueur de la future loi générale sur l’environnement pour élaborer et mettre en œuvre un plan d’urgence contre la pollution par les hydrocarbures. Tout cela n’est pas encore en entré en vigueur. Autres inquiétudes des défenseurs de la nature, la loi générale sur l’environnement offre des parades aux opérateurs économiques pour se soustraire aux contraintes environnementales. Une demande d’informations sur l’environnement peut, en effet, être rejetée lorsqu’elle se rapporte à des émissions de substances dans l’environnement dont la consultation ou la divulgation peut avoir des incidences défavorables sur la conduite de la politique extérieure du pays, de la défense nationale ou de la sécurité publique. Autres raisons de refus, lorsque la demande se rapporte à une procédure juridictionnelle en cours ou à une enquête d’ordre pénal ou disciplinaire. La loi étend cette exception de non-divulgation d’informations inhérentes aux émissions de substances dans l’environnement à des motivations économiques. Il est pourtant fait obligation à tout État côtier de tenir à jour ses cartes de sensibilité et de disposer d’un cadre de concertation permanente avec les sociétés pétrolières et les ports maritimes en vue de faire face à l’urgence en cas de déversement accidentel d’hydrocarbures dans le milieu marin. La RDC, qui n’a que 37 km de côte, s’est engagée, à travers le ministère de l’Environnement, à se doter d’un Plan Polmar crédible. Ce plan consiste, en pratique, en l’établissement de cartes de sensibilité décrivant des endroits sensibles et stratégiques pour la lutte contre les pollutions pétrolières dans le milieu marin. Le ministère de l’Environnement et les compagnies pétrolières, avaient, en effet, produit des cartes de sensibilité en 2010 mais elles ont été aussitôt rejetées par les environnementalistes pour leur caractère aléatoire, semble-t-il. Ces cartes ont été, selon toute vraisemblance, réalisées à la va-vite. Nombre d’éléments biologiques pourtant nettement identifiés n’ont pas été pris en compte. Ces cartes ont notamment fait l’impasse sur des dauphins qui sont pourtant présents depuis des lustres en amont de la plateforme Tshala. Puis, à l’époque où Bavon N’sa Mputu était ministre de l’environnement, les experts de l’Organisation maritime internationale (OMI) et de l’Association internationale des industries de pétrole pour la protection de l’environnement sont venus à la rescousse de la RDC. Mais, pas de nouvelles cartes jusque-là. Au contraire, le pays serait mis à l’index en vue d’être inscrit repris sur une liste noire par toutes les instances environnementales internationales. La SOCIR refuse de mourir La Société congolaise des industries de raffinage n’est pas dans le coma. Elle est tout simplement morte, de l’avis du Comité de pilotage pour la réforme des entreprises publiques. Et pour cause : son activité principale, à savoir le façonnage des produits pétroliers, n’est plus qu’un lointain souvenir. La raffinerie a cessé de fonctionner depuis 1994. Depuis plus de vingt ans, elle fait semblant de vivre, sans réelle volonté d’exister. Le ministre des Hydrocarbures, Crispin Atama a, en quelque sorte, prononcé l’oraison funèbre de la SOCIR lorsque, au cours d’une visite à Muanda courant 2014, il insistait sur la volonté du gouvernement de relancer totalement ses activités. Il s’était refusé d’accepter que la SOCIR, en soit réduite à un dépôt de transit. L’entreprise a reçu comme mission de raffiner le brut pour réduire le coût du pétrole à la consommation. Pourtant, au lieu de relancer prioritairement cette activité, Atama avait préféré botter en touche en soulignant que « la production du bitume permettra au pays d’asphalter nos routes au moindre coût. Au lieu dépenser un million de dollars par kilomètre construit, cela ne nous coûtera plus que 300 000 dollars ». Gestion calamiteuse C’est ainsi qu’après cette longue léthargie due à une gestion calamiteuse, le gouvernement s’est réveillé pour se mettre au chevet du moribond. Mais, la thérapeutique proposée ne trompe personne. Grâce à un financement dont le montant n’a pas été révélé, deux usines d’émulsion de bitumes et de fabrication de fûts métalliques ont été construites, une usine de 160 tonnes métriques pour les bitumes bruts, et une autre de 270 tonnes métriques d’émulsion de bitumes. Les deux usines d’émulsion de bitumes aux polymères disposent de réservoirs de produits chimiques, ainsi que d’un control-room pour la commande à distance. La capacité de production est de 20 tonnes métriques par heure, estimée à plus ou moins 200 fûts de 200 litres. Parallèlement, on signale l’acquisition d’équipements de laboratoire de recherche pour la formulation des émulsions de bitumes à adapter aux agrégats de la RDC, la construction de bureaux administratifs et techniques, et d’une salle de réunions équipée, assortie d’un réfectoire complètement réhabilité. De la poudre aux yeux ? Mais, selon le constat d’un expert, tout cela n’est que de la poudre aux yeux. Tout reste encore une vue de l’esprit lorsqu’on affirme que l’engagement pris par le gouvernement va dans le sens de la diversification des activités de la SOCIR, telles que prévues dans son cahier de charge. Ce dernier prévoit pourtant la relance de la raffinerie, mise en service en 1968 avec une capacité de 750 000 tonnes métriques, soit 16 700 barils de pétrole par jour. Portée à bout de bras La SOCIR n’a pourtant pas manqué de ressources financières pour relancer ses activités. Jamais une entreprise, pourtant d’économie mixte, n’a été autant portée à bout de bras par le Trésor public. Depuis plusieurs années, elle bénéficie, à travers la structure des prix des produits pétroliers, d’une ligne de plus de deux millions de dollars par mois. Ce montant lui est versé pour de « menus » services rendus à la filière, à savoir le transport de produits pétroliers de Banana à Ango-Ango (Bas-Congo), l’alésage des tankers et le stockage dans les installations. En l’espace de vingt ans (depuis 1993), le montant payé à la SOCIR est passée du simple au double. Cet avantage a été refusé à l’entreprise pétrolière nationale, la Congolaise des hydrocarbures, qui se débat depuis des années pour boucler ses fins de mois. Dans l’attente de financements Plusieurs projets de réhabilitation et de modernisation des installations de la SOCIR ont été pourtant initiés et attendent un financement pour leur matérialisation. Il s’agit notamment de la réhabilitation de la raffinerie (16 millions de dollars), de l’implantation d’une unité de production de bitume (14 millions de dollars) et d’une unité de conversion secondaire (65 millions de dollars), soit un montant global de 95 millions de dollars. À en croire un expert pétrolier, en l’espace de vingt ans et avec un peu plus d’organisation, la SOCIR pouvait faire face à un investissement de cette ampleur pour que l’entreprise retrouve sa place dans le cycle d’approvisionnement du pays en produits pétroliers et dans le développement de l’industrie pétrochimique nationale. Une raffinerie à la valeur revenue à la baisse Au ministère des Hydrocarbures, on indique que plusieurs partenaires dont des Sud-Africains et des Canadiens sont disposés à mettre la main à la poche. Pour quoi faire ? Nul ne le sait. Personne ne s’interroge cependant sur les partenariats antérieurs conclus entre la SOCIR et X-Oil ou encore en cours avec Glencore. On rappelle qu’après le retrait des Italiens, l’actionnariat de la société a connu de fortunes diverses. Plusieurs prétendants se sont succédé, parmi lesquels Extrade Oil, filiale de X-Oil et Glencore. La valeur de la raffinerie a souvent été minorée et les actions rachetées à vil prix. Ses actifs avait d’abord été repris par X-Oil, qui aurait racheté les 50 % des parts de l’italien ENI pour un montant de 2,5 millions de dollars, alors que la valeur assurée de la raffinerie était chiffrée à …91 millions de dollars ! À l’époque, cette opération s’était déroulée dans la plus grande opacité. Glencore, le géant suisse du secteur des minerais, s’est aussi payé sur la bête. Pour des prunes. Quant à l’apport financier de Glencore, il demeure à ce jour un mystère. Le droit de préemption reconnu à l’État s’est dilué dans des réseaux croisés d’intérêts et de profits. Des ambitions malgré tout Mais l’actuelle direction de la société ne manque pas d’ambitions. Le président du conseil d’administration, Théodore Nana Mungiele, le répète à l’envi. Au début de son mandat, il avait décliné son plan d’actions en quatre points, à savoir le social des agents, l’approche managériale, l’exploitation et le secteur financier. Sur le plan social, il est question de l’amélioration des conditions de prise en charge des agents pour les soins médicaux, la mise en place de la nouvelle classification des emplois, le relèvement du colis de fin d’année ( les quantités de vivres offerts aux agents doublées et unifiées sans discrimination), la réouverture de la restauration avec repas consistant pendant la journée pour tous les travailleurs, l’amélioration des avantages sociaux accordés (gratuité de logement dans les camps SOCIR). La SOCIR se voulait également une entreprise moderne. La nouvelle équipe affirmait vouloir disposer d’une stratégie de communication pour sensibiliser les autorités, les utilisateurs des services de la société et les autres partenaires. Elle se proposait aussi de remplir correctement sa mission dans la chaîne d’approvisionnement du pays en produits pétroliers. En dépit de la baisse générale des activités observée durant les premiers mois de l’année 2012, cette société a dit avoir manipulé un volume de produits pétroliers à transporter, se situant autour de 437 950 tonnes métriques, un niveau supérieur à l’objectif fixé dans la structure des prix, se réjouissait-on alors au siège de l’entreprise, en indiquant au passage que le pays n’a pas connu de rupture d’approvisionnement en produits pétroliers. Les unités de production font l’objet de maintenance et d’un entretien régulier, ce qui justifie le niveau d’activités évoqué. Les finances constituent le point névralgique. Les dirigeants de l’entreprise en revendiquent la maîtrise. D’après les chiffres fournis par l’auditeur Price Water House, la SOCIR a réalisé, fin 2013, un bénéfice avant impôt autour d’un million de dollars, grâce à un effort d’assainissement dans la gestion permettant d’absorber les pertes antérieures. Nouvelle usine de bitume La SOCIR a réceptionné, fin 2014, un second lot de conteneurs de matériels pour la construction de sa nouvelle usine de bitume. André Nkote Mavungu, directeur d’exploitation de l’entreprise expliquait, alors, fin 2014 qu’en plus de cette usine, la Socir devrait réaliser deux autres projets : une usine de production de gaz industriels et la réhabilitation de sa raffinerie. Les deux derniers projets tardent à se concrétiser. À la SOCIR même, on ne se faisait guère d’illusions. Selon Nkote Mavungu, « la SOCIR était pratiquement à l’arrêt pendant plus de 15 ans. Pour satisfaire certains intérêts, elle en était réduite à stocker et à transporter des produits pétroliers ». En fait de réalisations, on ajoute le forage d’un point d’eau et la construction d’une borne fontaine pour offrir gratuitement de l’eau potable à la population, l’installation à la jetée d’un mécanisme de lutte contre les incendies, la nouvelle salle de formation, le laboratoire moderne. Autant dire bien peu de choses. Une fois réhabilitée, la SOCIR sera en mesure de raffiner le pétrole brut, de produire du gaz liquéfié et du bitume destinés à satisfaire en priorité les besoins intérieurs du marché congolais. Une diversification des activités Dans sa nouvelle politique, le gouvernement considère que les grandes unités économiques en arrêt d’activité devraient bénéficier d’une attention particulière au regard de leur importance stratégique et de leur capacité de contribution, à l’accélération de la croissance économique et aussi dans la création de l’emploi. Appliquée à la SOCIR, cette proposition devrait aller dans le sens d’une diversification des activités qui n’entraînerait pas une modification de l’objet social de la société qui est actuellement le raffinage du pétrole brut et l’exploitation de produits dérivés. Dans ce dernier domaine, elle est appelée à produire des bitumes, des produits gazeux (azote liquide et gazeuse, oxygène, acétylène, oxyde nitreux), fabriquer des fûts pour les carburants et d’autres produits liquides. L’activité de raffinage du pétrole brut est actuellement exercée par cette société, née des cendres de la société congolo-italienne de raffinage de Muanda. Cette dernière avait été créée par la convention du 19 janvier 1963, signée entre l’État congolais et l’ente nazionale idrocarburi (ENI). Société par actions à responsabilité limitée de droit congolais, la SOCIR était dotée d’une participation paritaire de 50 % entre l’État et l’ANIC Spa, une filiale d’ENI. La durée de la convention était de trente ans.