SELON la Commission économique pour l’Afrique (CEA), son horloge africaine de la pauvreté dénombre environ 5,552 (use clock) personnes qui ont échappé à la pauvreté, mais 5,435 (use clock) autres qui y sont tombées. Ce qui dénote de l’insuffisance des efforts consentis pour espérer atteindre les objectifs retenus dans les agendas de développement africains. Par horloge africaine de la pauvreté, il faut entendre la version personnalisée de l’horloge mondiale sur la pauvreté mise au point par le World Data Lab.
Elle surveille les progrès accomplis dans la lutte contre la pauvreté extrême, qui est le premier Objectif de développement durable (ODD) des Nations unies. La CEA avait lancé cette campagne de surveillance des progrès en début d’année 2018, et elle vient de livrer les premiers résultats de son monitoring, le 25 mars. Vera Songwé, la secrétaire général de la Commission économique africaine, a fait savoir que cet outil a été récemment mis en place pour aider les décideurs politiques africains à « évaluer les progrès accomplis en matière de réduction de la pauvreté dans la vie réelle et en temps réel ».
« Aujourd’hui, l’horloge indique que plus de 400 millions de personnes en Afrique, soit environ 33 % de la population, vivent dans l’extrême pauvreté », fait-elle remarquer. Et d’ajouter : « L’horloge fournit des estimations de la pauvreté en temps réel jusqu’en 2030 pour la majorité des pays du monde ». Le constat est que la tendance est au statu quo qui met à nu l’insuffisance des efforts consentis dans la lutte contre la pauvreté, laisse-t-elle entendre.
ODD : des chiffres chocs
Devant ce constat, Vera Songwé rappelle que même si la proportion d’Africains extrêmement pauvres est passée de 57 % en 1990 à 43 % en 2012 pendant la période couverte par les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), le nombre de personnes vivant dans la pauvreté sur le continent est passé de 287,6 millions à 388,8 millions sur cette même période. À son avis, pour placer l’Afrique sur la voie de la transformation économique et sociale, il est impératif de « mettre en avant des réformes, des investissements et des innovations durables ».La communauté internationale a tiré la semaine dernière un premier bilan de ses réalisations dans la poursuite des Objectifs de développement durable (ODD) pour 2030. Cette année, les États membres de l’ONU se sont concentrés sur les six premiers objectifs consacrés au développement. À l’heure du point d’étape, l’Afrique est particulièrement à la traîne et aura du mal à atteindre ses objectifs. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne l’accès à l’eau et à l’assainissement.
Pour frapper les esprits, l’organisation Water Aid qui œuvre pour un meilleur accès à l’eau avait décidé de partager des chiffres-chocs. En se basant sur les données de l’ONU, elle est arrivée à la conclusion que certains pays d’Afrique ne pourraient avoir accès à l’eau potable et à des toilettes décentes que dans plusieurs siècles : uniquement en 2507 pour l’Erythrée, 2468 pour le Ghana ou 2180 pour la Namibie. Pour ChiChi Okoye, la directrice de l’organisation pour le Nigeria, les conséquences sont dramatiques : « Si vous prenez en compte le fait que la plupart des centres de soin n’ont pas d’eau potable et de système d’assainissement et pourtant on y pratique des opérations chirurgicales, des enfants naissent dans ces centres. Comment est-ce possible ? De nombreuses écoles ne sont pas équipées non plus…Quand les filles ont leurs règles, elles sont nombreuses à quitter l’école. »
Le problème réside essentiellement dans le manque de financement et l’inertie politique. « L’Afrique a besoin de plus de huit milliards de dollars pour offrir un accès à l’eau à tous. Donc on a besoin de gouvernements qui mettent vraiment la priorité sur cela et malheureusement la plupart ne le font pas. » Car tout est question de volonté. Le Rwanda et l’Ethiopie qui ne comptent pas parmi les pays les plus riches sont en bonne voie d’atteindre leur objectif dans ce domaine en 2030.