SA CONVICTION la plus profonde est que la modicité de nos ressources publiques est le fait, entre autres, de l’inefficacité de notre dispositif de lutte contre la fraude et la corruption résultant d’un système désuet et non informatisé, ainsi que de l’absence d’une culture fiscale. « Le gouvernement entend mettre sur pied une politique innovante en la matière afin de mettre un terme à cette faiblesse », avait-il déclaré en septembre dernier.
Concernant particulièrement les insuffisances du dispositif de lutte contre la corruption, le gouvernement se devait « urgemment » de surmonter deux obstacles majeurs. « D’une part, la difficulté de preuve quant à la matérialité de l’acte même de corruption ou des infractions voisines, et, d’autre part, l’improbité de certains fonctionnaires et autres magistrats qui se nourrissent eux-mêmes du système de corruption dans ce domaine. »
Réformes urgentes
Dans leur forme actuelle, avait reconnu Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le code pénal congolais et les législations pénales particulières « sont privés de toute force » pour venir à bout du phénomène de la corruption. Ainsi, le gouvernement a prévu d’innover, notamment en renforçant en amont « les mécanismes de vérification, de contrôle et de surveillance dans les secteurs enclins à la corruption avec le concours accru de l’Inspection générale des finances (qui a désormais des nouveaux animateurs et déjà en action) et de la Cour des comptes (dont les responsables ont exposé les difficultés de fonctionnement au 1ER Ministre) ; en interceptant en aval « les manifestations de la corruption dans les secteurs facilement identifiables et déjà identifiés » ; en créer une juridiction spécialisée dans la lutte contre la corruption, la fraude fiscale, le blanchissement des capitaux ainsi que le détournement des deniers publics.
En ce qui concerne particulièrement l’évasion et la fraude fiscale, l’ambition du gouvernement est de « permettre à notre système fiscal de faire un pas vers la modernité », notamment en dématérialisant les différentes transactions fiscales (Huawei a été choisi par le ministère des Finances pour la réalisation de ce projet). L’objectif visé étant d’améliorer la mobilisation des recettes de l’État, notamment celles provenant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
En matière de gouvernance des ressources naturelles, des entreprises publiques et des finances de l’État, le 1ER Ministre trouve « inconcevable » que notre pays dont le capital naturel représente 64 % de sa richesse totale, puisse figurer parmi les pays les plus pauvres du monde en termes de PIB et de richesse par habitant.
D’après lui, le secteur extractif, en particulier, n’a pas encore donné la mesure de tout son potentiel : « En attendant que l’inventaire de nos ressources minières et pétrolières soit mis à jour, notre pays doit éviter de succomber à la malédiction des ressources naturelles, qui consisterait à dilapider les revenus générés par lesdites ressources, au détriment de véritables dépenses de développement. »
Et de poursuivre : « Autant, dit-il, nous avons besoin de nos ressources naturelles, renouvelables et non renouvelables, autant nous devons les exploiter de manière plus responsable, c’est-à-dire en veillant aux intérêts des générations futures et à la protection de l’environnement. Mon gouvernement entend conférer au secteur extractif un rôle hautement stratégique, celui de servir de levier le plus important du processus de diversification de l’économie nationale. »
Le code minier révisé prévoit de répartir la redevance minière à concurrence de 50 % au pouvoir central, 25 % à la province où se fait l’exploitation minière, 15 % à l’entité territoriale décentralisée dans laquelle s’opère l’exploitation ; et 10 % au Fonds minier pour les générations futures. Par ailleurs, le code minier prescrit aux exploitants miniers de constituer une dotation de 0,3 % du chiffre d’affaires pour la contribution aux projets de développement communautaire.
« Mon gouvernement s’attèlera dans les meilleurs délais à mettre en place les différentes mesures d’application de toutes ces dispositions, afin de permettre à notre pays et à nos populations de tirer davantage profit de l’exploitation de nos ressources minières. » Willy Kitobo Samsoni, le ministre des Mines, a lancé récemment la campagne de vulgarisation du code minier révisé. Dans ce même ordre d’idées, le gouvernement réfléchit à la mise en place des modalités concrètes destinées à renforcer la capacité de résilience de notre économie face au retournement de la conjoncture internationale.
Entreprises publiques
S’agissant des entreprises publiques opérant dans le secteur minier, le gouvernement a prévu de « trouver rapidement des solutions aux problèmes majeurs qui gênent leur relance. Il s’agit principalement de la Générale des carrières et des mines (GECAMINES), la Minière de Bakwanga (MIBA), la SAKIMA, la SOKIMO et la société minière Kisenge Manganèse. « En ce qui concerne particulièrement la GECAMINES, principale entreprise minière de l’État, malgré la dynamique de redressement engagée depuis quelques années, elle n’est structurellement plus en mesure de jouer le rôle qui fut le sien par le passé, du fait du vieillissement généralisé de son outil de production, du caractère résiduel de ses réserves minières suite à la cession de ses meilleurs gisements, et du caractère déséquilibré de son rôle dans les joint-ventures, en dépit de ses apports en nature constitués par ses gisements ». Le constat est du 1ER Ministre lui-même.
Et de dire : « Pour redonner de la vigueur à cette entreprise publique, mon gouvernement envisage de l’accompagner dans sa dynamique de transformation, de la doter d’une ou de deux usines nouvelles modernes, de façon à accroître sa capacité à 100 000 tonnes de cuivre par an, et de soutenir ses efforts dans le cadre de la reconstitution d’un patrimoine minier certifié. En ce qui concerne les joint-ventures, l’État continuera de suivre comme par le passé avec attention les discussions menées entre la GECAMINES et ses partenaires afin de bénéficier de la part lui revenant normalement. »
En sus de ses problèmes, la GECAMINES, comme les autres entreprises du secteur minier, est confrontée à trois contraintes. Un : les débordements incessants et inquiétants de ses concessions par l’exploitation minière artisanale. Deux : l’éviction du chemin de fer par le réseau routier comme mode économique de transport d’intrants et de produits minier. Et trois : l’insuffisance de l’énergie électrique pour soutenir l’expansion minière et améliorer le traitement de ses produits en RDC.
Quant au développement de l’exploitation minière artisanale, le Sylvestre Ilunga Ilunkamba a promis que son gouvernement « veillera, conformément au code minier, à l’effectivité de la mise en œuvre des Zones réservées à l’exploitation artisanale (ZEA) ». De même, il accordera une attention particulière à « l’accompagnement des artisanaux par le Service d’assistance et d’encadrement de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (SAEMAPE), qui pourra ainsi mettre à contribution les sociétés minières notamment dans la découverture des ZEA ainsi attribuées ».