La mutation industrielle vient de mettre sur la paille plus de 10 000 creuseurs artisanaux qui travaillaient sur ces sites miniers depuis plusieurs années dans ce territoire situé à plus de 200 km à l’ouest de Goma. Amazati Nema, l’un des responsables d’une coopérative qui regroupe 18 000 creuseurs artisanaux, s’inquiète de la situation actuelle de tous ces jeunes et responsables de familles qui n’ont plus d’occupations, ayant laissé place depuis octobre 2014 à la société sud-africaine Alpha Mine, agréée par l’État congolais pour explorer plus de dix sites miniers à Walikale .
« Nous étions presque 10 000 creuseurs sur le site et on gagnait 30 dollars par jour, il n’y a aucune solution aujourd’hui, alors ce qui nous inquiète, c’est que ces jeunes peuvent aller rejoindre les groupes armés. Nous demandons le dialogue, parce que quand la société engage, c’est pour des engagements journaliers de 30 voire 60 personnes seulement », explique-t-il.
À la société Alpha Mine, indexée par ces creuseurs de Walikale, le directeur général Richard Robinson balaie d’un revers de main toutes ces accusations, ajoutant d’ailleurs que plus 60 millions de dollars ont été dépensés pour les salaires d’anciens creuseurs qui travaillent dans sa société. L’entreprise est d’ailleurs dans la phase d’exploration d’un cahier des charges avec une centaine de projets d’accompagnement de développement communautaire du territoire de Walikale. « La société n’a jamais proposé ou demandé le déguerpissement des creuseurs, même depuis 2010, les coopératives de creuseurs se sont engagées à quitter la concession au moment de l’émission de notre permis d’exploitation, mais il y a un effort de trouver des solutions », a-t-il déclaré.
« La loi ne permet pas la coexistence entre exploitations minières industrielle et artisanale, explique le ministre provincial des Mines, Anselme Kitakia. Le gouvernement a donné un permis d’exploitation à la société Alphamine Bisie, les creuseurs ne devront pas coexister sur ces sites, il faudrait qu’on se le dise parce que la loi le prévoit. » Sur place, à Walikale, les creuseurs artisanaux et les exploitants industriels se regardent en chiens de faïence depuis octobre 2014, chose qui inquiète la société civile dans la région. Prince Kihangi est membre du groupe thématique mine au sein de la société civile du Nord-Kivu. « Ce sont des milliers de gens à qui ont demandé d’un coup de tout quitter et d’aller je ne sais où ! Il faudrait aussi se baser sur le principe des droits acquis, car ce sont les creuseurs artisanaux qui avaient découvert en premier la plupart de ces sites. Ces zones produisent énormément des quantités de minerais, mais la situation des communautés est restée la même », confie-t-il.
Les défis à relever
Le secteur rencontre beaucoup de défis à relever : la fraude, le manque de moyens technologiques et d’outils d’exploitation, ce qui freinerait d’une manière ou d’une autre l’accomplissement des promesses. Le ministre se félicite de la réussite et le résultat en matière de recette de traçabilité dans l’exportation et promet aux communautés locales les meilleurs: « nous avons connu des évolutions importantes ces cinq dernières années. S’agissant des dernières statistiques pour ce qui est du coltan, au bout de l’année nous avoisinons à peu près un million de tonnes que nous exportons »
Situés à des centaines de kilomètres à l’Ouest de Goma, Masisi et Walikale sont deux territoires de l’Est de la RDC réputés parmi les grandes réserves mondiales du coltan et de la cassitérite, des minerais qui sont utilisés dans la fabrication de matériel électronique comme le téléphone. Dans les zones d’exploitation de tous ces minerais, beaucoup restent encore à faire, des territoires entiers restent sous-développés et très enclavés par manque des infrastructures routières.