Depuis que des réformes ont été engagées par le gouvernement pour attirer des investisseurs des progrès ont été enregistrés. Mais les différents rapports Doing Business, réalisés tous les ans par la Banque mondiale, mettent en évidence les carences du cadre réglementaire des entreprises en République démocratique du Congo.
L’environnement des affaires, c’est l’ensemble des conditions politiques, légales, institutionnelles et réglementaires qui régissent les activités des entreprises. Le réformer est, depuis quelques années, une priorité pour la République démocratique du Congo qui aspire à l’émergence car il influe significative sur le développement du secteur privé, sur la croissance économique et la création d’emplois et des richesses. C’est dans cette optique que le pays continue d’adopter des réformes favorables aux entreprises. L’accent est mis sur la facilitation de la création d’entreprises et la réduction des coûts d’importation et d’exportation. Mais il reste beaucoup à faire. Les entreprises se heurtent encore à des contraintes réglementaires et administratives plus lourdes que dans certains pays africains et les droits de propriété et ceux des investisseurs semblent être moins bien protégés qu’ailleurs.
Parmi les réformes à mener, la consolidation de l’État de droit est fondamentale. Les partenaires du gouvernement et les investisseurs, nationaux et étrangers, font de la bonne gouvernance judiciaire un axe central des réformes qu’ils souhaitent voir mises en oeuvre.
État de droit : le maillon faible
Pour eux, la justice a une fonction de régulation économique essentielle et constitue, de ce fait, un vecteur capital de développement économique et social. Or, la justice est le parent pauvre des trois pouvoirs constitutionnels sur lesquels reposent l’État et la démocratie en Afrique. Elle se caractérise par un manque de moyens criant et des dysfonctionnements importants. Le nombre réduit de tribunaux de commerce et une corruption omniprésente rendent l’accès à la justice problématique pour les investisseurs, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME) qui constituent de loin la majorité des entreprises nationales.
La question de l’indépendance de la justice demeure posée. Les entreprises font très peu confiance au système judiciaire contrairement à ce qui se passe en Chine ou en Afrique du Sud. Il y a quelques années, les sociétés, tout comme l’État lui-même, étaient systématiquement condamnées à des lourdes amendes (dédommagements) à chaque fois qu’elles étaient en procès contre les tiers devant les cours et tribunaux. À l’époque, des sociétés, comme Shell, avaient mis la clé sous le paillasson, dégoûtées par les décisions de justice. La Fédération des entreprises du Congo (FEC) avait, en son temps, dénoncé cette situation qui n’avait rien d’indépendance de la justice. Certains chefs d’entreprises étaient allés jusqu’à accuser des juges de complicité avec les avocats. Des initiatives ont été prises pour restaurer la confiance et la crédibilité de la justice, notamment à travers l’adhésion au traité de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA).
Corruption, la gangrène
La corruption, l’accaparement des richesses par les élites ainsi que les différents systèmes mis au point par des sociétés transnationales pour rapatrier des fonds sont une des caractéristiques des entreprises congolaises et l’un des freins majeurs au développement des PME.
Phénomène multiforme, la corruption est un problème majeur pour de nombreuses entreprises. Les unes la considèrent comme un facteur de blocage pour leur croissance, tandis que d’autres pensent le contraire. Pour la majorité des entreprises, les processus d’attribution des marchés restent encore trop peu transparents et demeurent un terrain propice pour le développement de la corruption et du trafic d’influence. Le montant des versements effectués par les entreprises pour obtenir un marché atteindraient 30 à 50 % de la valeur du contrat. La lutte contre la corruption est un combat difficile à mener étant donné les habitudes et les liens qui se sont progressivement tissés entre administrations publiques et entreprises privées.
L’exemple venant du sommet de l’État n’améliore pas la situation… L’un des problèmes majeurs est la mauvaise gestion généralisée par les élites politiques au pouvoir. Ces élites profitent de leur position de force par rapport au secteur privé pour élever leur train de vie. Lancée en 2008, puis relancée en 2010, par le président Joseph Kabila, la campagne de lutte contre la corruption baptisée « Tolérance zéro » avait suscité tant d’espoirs. Mais elle a laissé un arrière-goût d’amertume. Pourtant, dans sa première phase, on avait vu le président de la République prendre des sanctions de révocation et de suspension contre les dirigeants d’entreprises publiques et les fonctionnaires accusés de corruption. Dans une correspondance du cabinet du chef de l’État, Emmanuel Luzolo Bambi, le ministre de la Justice et des Droits humains d’alors, était « sommé » d’ouvrir des actions judiciaires contre les magistrats et les fonctionnaires révoqués ou suspendus pour corruption. Pour sa part, le procureur général avait demandé la levée de l’immunité parlementaire en vue de poursuites contre douze députés soupçonnés de « scandale financier » (corruption) à la Direction générale des impôts (DGI) lors d’une mission parlementaire. Des patrons des entreprises privées qui avaient bénéficié de marchés publics pour la réhabilitation des infrastructures, notamment les routes, étaient également sur la sellette. Une dizaine d’entre eux avaient été interpellés pour mauvaise exécution des contrats sur les travaux publics avant d’être remis en liberté. Dans cette affaire, le patronat avait accusé le parquet général de laisser en liberté les ministres et autres autorités impliqués dans ce dossier ayant défrayé la chronique à l’époque. La campagne Tolérance zéro visait surtout les hauts responsables politiques qui avaient géré le pays depuis 2001, soupçonnées de concussion et de prévarication. Le gouvernement envisageait par-dessus tout de nouvelles procédures pour lutter contre la corruption dans les milieux politiques et d’affaires. Cependant, l’objectif de « mettre fin à la recréation et de remplir les prisons » n’avait pas été en 2010.
La RDC fait partie des pays où l’exécution d’un contrat est la plus longue et où les coûts d’exécution sont les plus élevés. Heureusement, les contrats et leur exécution sont désormais régis par les dispositions des actes uniformes de l’OHADA. Ces dispositions prévoient des procédures simplifiées de recouvrement des créances commerciales et ne posent pas de difficulté particulière. C’est plutôt en matière de mise en oeuvre que se posent les principaux problèmes, dont le manque de moyens des juridictions judiciaires (nombre insuffisant de magistrats, peu d’informatisation…) n’est pas le moindre. Par ailleurs, les modes alternatifs de règlement des différends commerciaux, arbitrages et conciliations, tardent à se répandre.