Pour lutter contre la fraude endémique, le gouvernement a créé et lancé une structure de lutte contre ce fléau en vue de rentabiliser les revenus de l’Etat.
Serait-ce un début de solution à l’épineuse question de la maximisation des recettes fiscales en République démocratique du Congo ? Les différentes pistes de solution préconisées tant au niveau du gouvernement que de l’Assemblée nationale convergeaient vers une seule solution : mettre sur pied une structure pour sécuriser les recettes douanières. Cela a conduit à la création, par le gouvernement, de la Société d’exploitation du guichet unique du commerce extérieur (SEGUCE), lancé officiellement le 25 juillet. À cette occasion, un séminaire national d’information sur le démarrage des activités du Guichet unique intégral du commerce extérieur a été consécutivement organisé par le ministère du Commerce extérieur dans trois villes du pays à savoir, Kinshasa, Lubumbashi et Matadi. La mission confiée à cette structure demeure « la conception, la mise en œuvre et la gestion du guichet unique du commerce extérieur ». Dans le cadre de ce séminaire, Elie Sawaya, directeur général de SEGUCE, présentant les avantages a souligné que les opérateurs économiques verront notamment les délais et les coûts d’importations et d’exportations diminuer considérablement, ce qui aura un impact positif sur l’économie et la sécurisation des recettes ».
Pour ce faire, cette société de lutte contre l’évasion fiscale permettra aux acteurs économiques de déposer des informations et des documents standardisés auprès d’un organisme unique, afin de remplir l’ensemble de leurs obligations réglementaires en matière d’impôt, de transbordement et de transit. La Société d’exploitation du guichet unique du commerce extérieur intégrera aussi les modules de pré et post dédouanement autour de la composante douanière sur tous les modes de transport : aérien, ferroviaire, maritime, fluvial, lacustre, terrestre, et sur huit corridors principaux. En outre, la SEGUCE participera à la coordination des flux d’informations entre les différents acteurs visant la facilitation du commerce extérieur et à la sécurisation des recettes de l’État. Pour ce qui concerne la facturation, il est prévu qu’elle s’effectue par l’émission d’un bordereau de frais unique (BFU) qui centralisera tous les éléments propres aux différentes structures impliquées dans les phases successives de la chaine logistique.
Le déclic
Les fraudes massives observées notamment au niveau des postes frontaliers en République démocratique du Congo avaient mis la puce à l’oreille des membres du gouvernement et des députés, au point de les amener à faire des propositions concrètes pour endiguer ce fléau. En effet, lors d’une mission dans la province du Katanga en 2014, Patrice Kitebi Kibol Mvul, alors ministre délégué aux Finances, avait décelé de graves dysfonctionnement dans les régies financières de cette province, principalement au niveau de la Direction générale des douanes et accises (DGDA). Un réseau maffieux dénommé « Douaniers-déclarants » (Dode) opérait impunément et affaiblissait terriblement les recettes publiques. Après avoir fait son rapport au gouvernement, celui-ci avait déclaré une guerre ouverte à la fraude fiscale, se décidant d’attaquer le mal à la racine. C’est ainsi qu’à l’issue de sa réunion hebdomadaire, la Troïka stratégique, organe technique du gouvernement, avait chargé Patrice Kitebi à engager des actions pour juguler la fraude, ce mal qui ronge les trois régies financières du pays : la Direction générale des douanes et accises (DGRAD), la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD), et la Direction générale des impôts (DGI).
Mais bien avant cette descente du ministre délégué aux Finances d’alors, le gouvernement avait organisé, en mai 2013, des travaux sur « le coulage des recettes publiques ». C’est lors de ces travaux que des propositions sur la maximisation des recettes fiscales en République démocratique du Congo ont été faites. Il s’en était dégagé la nécessité de mettre en place une autorité de contrôle des revenus fiscaux, un dispositif légal solide, la création d’un réseau informatisé du système douanier et d’un guichet unique de paiement des taxes. Pour sa part, le vice-Premier ministre en charge du Budget de l’époque, Mukoko Samba, en appelait à la mise en place par le gouvernement d’un système fiscal simple et transparent pour décourager la fraude et l’évasion fiscale.
Le conseiller spécial du chef de l’État chargé de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption, Luzolo Bambi, a affirmé que « la République démocratique du Congo enregistre chaque année une fraude fiscale et des détournements évalués à 10 et 15 milliards de dollars, alors que son budget annuel est de 8 milliards ». Pour le député Samy Badibanga (opposition), «le pays pourrait sans peine atteindre un budget de 20 milliards de dollars si le gouvernement appliquait ce système de guichet unique.